vendredi 1 octobre 2010

Le vrai visage des pourparlers

jeudi 30 septembre 2010 - 06h:29
Vittorio Arrigoni
Il y a quelques jours, à la morgue de Beit Hanoun, le vrai visage des pourparlers de paix se trouvait mutilé devant moi.
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Israël est un état voyou, criminel, au-dessus des lois... Massacrer des civils a toujours été son point fort - Photo : Vittorio Arrigoni
Dans les chambres froides grandes ouvertes, se présentait le véritable résultat des rencontres voulues par Benjamin Netanyahu, la pratique israélienne de la paix : alors que d’une main plâtrée et en costume sombre, il donne des tapes sur l’épaule des marionnettes de Ramallah, de l’autre, il manœuvre le hachoir d’une occupation qui n’a jamais été désamorcée.
Les visages des dernières victimes civiles palestiniennes présentent les scarifications du rituel de Shalom tel que l’entend Netanyahu, tel que l’entendaient avant lui Olmert, Sharon, Perez, Rabin, Golda Meir, Ben Gourion et bien avant eux les plans infâmes annoncés par Théodore Herzl à la fin du 19ème siècle.
Une existence pacifique qui dans la vision sioniste est synonyme de nettoyage ethnique de la population autochtone. Si à Jérusalem et en Cisjordanie cette existence se concrétise par les hectares de terre que les bulldozers dévorent chaque jour en rasant les maisons et en abattant les oliviers millénaires, ici à Gaza elle continue à extirper sans cesse des vies humaines.
Le 14 septembre dernier, à Beit Hanoun, vers 17h, Ibrahim Abu Sayed, berger bédouin âge de 91 ans, se trouvait au Nord de Sharab Street avec Hossam, son petit-fils de 17 ans et l’un de ses amis, Ismail Abu Oda, 16 ans. Ils s’occupaient du bétail sur leur terre située à environ 700 mètres de la frontière, lorsque dans une incursion rapide des blindés israéliens, un coup de canon a été tiré directement sur eux, réduisant leurs corps en lambeaux.
À l’hôpital de Beit Hanoun, nous avons rencontré les familles de ces nouvelles victimes du terrorisme israélien. La femme d’Ibrahim, ravagée par la douleur, hurlait toute l’horreur à laquelle elle venait d’assister.
“J’étais avec eux une demi-heure avant l’attaque”, nous a dit un parent proche, Mohammed Abu Oda, en s’avançant vers nous, “je les ai vu s’occuper de leurs brebis. Puis, lorsque je me suis éloigné, j’ai entendu les coups tirés par les chars israéliens, les tirs qui ont tué les membres de notre famille”.
Ils sont morts sur le coup, d’après ce que nous a dit un médecin préférant garder l’anonymat. Sur la poitrine et sur l’estomac, Ibrahim présentait de nombreuses blessures causées par des fragments d’explosif. Lorsque Hossam est arrivé à l’hôpital, il lui manquait la partie postérieure du crâne. Ismail, l’ami de Hossam, est arrivé lui aussi à l’état de cadavre devant les médecins, une partie importante de sa tête était également mutilée.
“Israël déclare que notre terre se trouve dans la buffer zone, mais nous sommes au moins à 700 mètres de la frontière”, nous a raconté l’oncle d’Ismail, Majdi Abu Oda. “Nous sommes tous paysans et bergers, nous vivons ici depuis très longtemps. Nous ne sommes pas des ennemis d’Israël, nous ne représentons aucun danger pour eux. Ils ont des caméras de surveillance placées le long de la frontière et ils nous ont vus des centaines de fois. Ils ont nos photos, ils nous connaissent, ils savaient très bien que les trois hommes tués aujourd’hui étaient des civils et non des combattants.”
L’indignation suscitée dans le monde par le meurtre des colons israéliens ne s’est pas manifestée à Gaza cette fois non plus face au massacre de ces trois bergers qui, selon les lois internationales et contrairement aux colons, se trouvaient sur leur terre et ne représentaient aucune menace pour Israël.
Pour marquer la fin macabre d’un grand-père, de son petit-fils et d’un autre adolescent, le lendemain, à Beit Hanoun, une manifestation a été organisée à la frontière. Saber Zaneen, coordinateur de l’association de bénévoles Local initiative et organisateur de ce rassemblement, a déclaré :
“Aujourd’hui l’occupation israélienne a commis un nouveau crime à ajouter à son infinie liste noire, 3 martyrs reposent maintenant au ciel avec honneur et dignité. Nous demandons avec force à la communauté internationale et à toute la société civile de se mobiliser afin que cessent ces crimes contre l’humanité, contre les civils palestiniens, et de s’engager à protéger la population de la Bande de Gaza”. Restons Humains.
* Vittorio Arrigoni réside à Gaza ville. Journaliste freelance et militant pacifiste italien, membre de l’ISM (International Solidarity Movement), il écrit notamment pour le quotidien Il Manifesto. Il vit dans la bande de Gaza depuis 2008. Il est l’auteur de Rester humain à Gaza (Gaza. Restiamo umani), précieux témoignage relatant les journées d’horreur de l’opération « Plomb durci » vécues de manière directe aux côtés des ambulanciers du Croissant-Rouge palestinien.
Son blog peut être consulté à :
http://guerrillaradio.iobloggo.com/
14 septembre 2010 - Communiqué par l’auteur
Traduction de l’italien : Y. Khamal
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