jeudi 9 septembre 2010

Le boycott d’Ariel : l’arbre qui cache la forêt

mercredi 8 septembre 2010 - 07h:00
PACBI
En Israël, l’élan pris par le BDS international comme moyen efficace de résister à l’oppression coloniale israélienne n’est pas passé inaperçu. Dans ce contexte, il est permis d’affirmer que ces récents efforts de réduire l’objet du boycott contre Israël ratent délibérément la forêt pour ne voir que l’arbre.
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La colonisation de la Palestine sous occupation a toujours été une constante de l’idéologie raciste et colonialiste sioniste.
Provoqués par la récente annonce de l’inauguration d’un centre culturel à Ariel, la quatrième plus grande colonie juive dans les territoires palestiniens occupés, 150 universitaires, écrivains et personnalités culturelles israéliennes éminentes ont déclaré qu’elles « ne prendront part à aucune sorte d’activité culturelle au-delà de la Ligne Verte, ni à des discussions, séminaires ou conférences de toute nature, dans le cadre universitaire, dans ces colonies » [1].
Quelques protestataires sont allés jusqu’à réitérer le fait que toutes les colonies israéliennes construites sur le sol palestinien occupé violent la Quatrième Convention de Genève et constituent par conséquent un crime de guerre.
Cette position de dizaines d’universitaires et d’artistes Israéliens à causé beaucoup de controverses dans le monde public israélien, provoquant les reproches venant de tout le spectre politique et particulièrement de l’establishment universitaire et culturel.
Tous les grands théâtres ont rapidement déclaré leur refus de boycotter Ariel sous prétexte de servir « tous les Israéliens » ; les directions universitaires ont fait écho à cette position ou se sont tues, tout en continuant à traiter comme d’habitude avec Ariel et les autres colonies. Les termes du débat, toutefois, soulèvent plusieurs questions pour les supporters des droits palestiniens. Si les actes de protestation contre toute manifestation du régime israélien de colonialisme et d’apartheid sont les bienvenus, nous croyons que ces actes doivent être moralement cohérents et ancrés sur la loi internationale et les droits humains universels.
D’abord, nous croyons que l’accent exclusif mis sur les institutions des colonies ignore et masque la complicité de toutes les institutions universitaires et culturelles israéliennes dans leur soutien au système de contrôle colonial et d’apartheid sous lequel souffrent les Palestiniens. Le PACBI pense qu’il y a des preuves solides de la collusion de l’establishment universitaire et culturel israélien avec les principaux organes d’oppression de l’État d’Israël. Se focaliser seulement sur des institutions évidemment complices, telles que les centres culturels d’une colonie de Cisjordanie, sert à protéger les institutions israéliennes principales de l’opprobre ou, en définitive, du mouvement de boycott mondial émergeant qui vise de façon cohérente toutes les institutions complices.
De plus, l’approche sélective, derrière le ciblage d’une colonie notoire au cœur de la Cisjordanie occupée, détourne l’attention sur les autres institutions construites sur la terre occupée. Il faut demander aux supporters de ce boycott particulièrement sélectif : donner une conférence ou se produire à l’Université hébraïque, dont le campus de Mont Scopus est situé sur la terre occupée de Jérusalem Est, est-il acceptable ?
Si l’opposition à l’occupation militaire d’Israël dirige ce mouvement, alors pourquoi l’étouffement déplorable des institutions culturelles dans Jérusalem occupée, par exemple, a-t-il été ignoré ? En 2009, la Ligue Arabe, avec le soutien de l’Unesco, a déclaré Jérusalem Capitale Culturelle Arabe pour l’année. Des célébrations qui devaient avoir lieu dans toute la ville au cours de l’année, mettant en valeur le rôle historique et culturel de Jérusalem dans la société palestinienne et au-delà, ont été interdites et parfois attaquées physiquement par les forces de sécurité israélienne, dans leurs efforts permanents d’asphyxier les expressions que l’identité palestinienne dans la ville occupée. Dans des scènes à la Kafka, les activités organisées dans tout Jérusalem Est ont été sommairement annulées, tandis que les artistes, écrivains et personnalités culturelles palestiniennes faisaient appel à des techniques clandestines pour célébrer l’héritage culturel et populaire de leur ville [2].
Si le rôle des artistes et intellectuels comme voix de la raison morale est derrière ce récent appel à boycotter Arial, où étaient ces voix quand les institutions universitaires et culturelles étaient délibérément détruites dans la guerre d’agression d’Israël sur Gaza en 2008 2009 ?
En Israël, l’élan pris par le BDS international comme moyen efficace de résister à l’oppression coloniale israélienne n’est pas passé inaperçu. Dans ce contexte, il est permis d’affirmer que ces récents efforts de réduire l’objet du boycott contre Israël ratent délibérément la forêt pour ne voir que l’arbre.
Il est important de rappeler la logique et les principes moralement cohérents de la campagne de boycott palestinienne contre Israël.
Le mouvement BDS tire ses principes à la fois des exigences de l’Appel BDS palestinien, signé par plus de 170 associations de la société civile palestinienne en juillet 2005 [3] et, dans les domaines universitaires et culturels, de l’Appel palestinien PACBI au boycott universitaire et culturel d’Israël de juillet 2004 [4]. Ensemble, les appels BDS et PACBI représentent les déclarations stratégiques les plus représentatives et largement soutenues ayant émergé en Palestine depuis des décennies ; toutes les factions politiques, les organisations du travail, étudiantes et de femmes, et les groupes réfugiés dans la monde arabe ont soutenu et signé ces appels. Les deux appels soulignent la croyance palestinienne prédominante que la forme de solidarité internationale la plus efficace avec le peuple palestinien est l’action directe et la pression continue destinées à mettre fin au régime colonial et d’apartheid d’Israël, juste comme le régime d’apartheid en Afrique du Sud a été aboli, en isolant Israël internationalement par des boycotts et des sanctions, le forçant à se conformer à la loi internationale et à respecter les droits palestiniens.
Ceux qui se disent concernés par l’application cohérente de la loi internationale et par la primauté des droits humains sont vivement appelés à reconnaître la « forêt » de la complicité universitaire et culturelle derrière les « arbres » d’Ariel, et à agir en conséquence et en permanence.
Notes :
Cet article a été publié comme rubrique du PACBI (Appel palestinien au boycott universitaire et culturel d’Israël) dans le numéro de septembre de la newsletter du BRICUP britannique.
Septembre 2010 - PACBI - Vous pouvez consulter et article à :
http://www.pacbi.org/etemplate.php?...
Traduction de l’anglais : Jean-Pierre Bouché
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