lundi 30 août 2010

L’AP sur les nerfs tandis que l’opposition aux pourparlers avec Israël-apartheid gagne du terrain

Hébron - 29-08-2010

Par Khaled Amayreh 
Les forces de sécurité loyales à l’Autorité Palestinienne (AP) soutenue par l’occident a donné l’assaut, vendredi, à la ville de Dura, au sud de la Cisjordanie, agressant les civils et assiégeant deux grandes mosquées. Les forces, à bord de véhicules flambant neufs « offerts » par les Etats-Unis, et portant le blason de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) ont empêché les gens d’accéder à la Grande Mosquée, dans le centre-ville, avant de donner l’assaut à la mosquée pour empêcher Sheikh Nayef Rajoub, chef islamique populaire, de donner son pré-sermon traditionnel ou homélie.











Sheikh Nayef Rajoub, lors de sa libération le 21 juin 2010, après 50 mois de prison dans les geôles sionistes
Rajoub, ancien Ministre des Wakf [legs pieux] et des Affaires islamiques, est l’un des dirigeants islamiques les plus populaires en Cisjordanie. Une popularité qui est cependant une source d’inquiétude pour le gouvernement contrôlé par le Fatah, dont le Ministre du Wakf, Muhammed al-Habbash, a rendu la semaine dernière une ordonnance interdisant à Rajoub de prêcher ou de donner des conférences islamiques dans les mosquées.
Rajoub a rejeté l’ordonnance, la qualifiant de « incompatible avec l’Islam. »
Selon les témoins, les troupes se sont comportées de façon provocante et ont choqué les sensibilités musulmanes. Elles sont entrées dans la mosquée en bottes, ce qui est considéré comme une offense et presque un sacrilège dans tout le monde musulman.
Cherchant à éviter une confrontation plus violente, Rajoub est allé dans une autre mosquée, la mosquée d’al-Mujahed, où il a commencé à prêcher sur les vertus du Mois sacré de Ramadan. Des centaines de troupes de l’AP, dont beaucoup en civil, ont alors poursuivi le Sheikh jusqu’à la Mosquée Mujahed, provoquant un choc.
Là aussi, les troupes ont profané la mosquée en entrant chaussées de leurs bottes. Une autre confrontation potentiellement violente entre les troupes et les fidèles en colère a été évitée de justesse, lorsque quelques dignitaires locaux ont convaincu le Sheikh d’arrêter son prêche.
Selon les témoins, les troupes lourdement armées ont sauvagement frappé les fidèles, dont un des frères de Rajoub.
Le raid sur la ville de Dura et l’attaque des mosquées a rendu furieux les citoyens locaux, qui ont traité les troupes de l’AP d’ « agents d’Israël » et de « soldats de Dayton ».
« Même les soldats israéliens ne se seraient pas conduits comme ça. Ce qui s’est passé aujourd’hui prouve que l’AP et Israël sont les deux faces de la même médaille, » a dit Adib Sharah, un étudiant.
Un fidèle a appelé les troupes « les collaborateurs d’Israël qui frappent et persécutent leur propre peuple pour le compte d’Israël. »
A la fin de la prière en congrégation, les forces de sécurité de l’AP ont mené une vaste campagne d’arrestation dans la ville et dans les environs.
Les sources locales avancent le chiffre de 40 à 50 personnes détenues, pour la plupart de jeunes activistes islamiques qui ont fait rempart autour de Rajoub pour le protéger des attaques des troupes.
S’adressant au Centre Palestinien d’Information vendredi soir, Rajoub a fustigé la conduite de l’AP comme étant une « expression de la faillite morale et politique. »
« Au lieu de combattre l’occupation israélienne et de permettre aux Musulmans d’avoir accès à la Mosquée Aqsa, l’AP donne l’assaut aux mosquées et les profane, ici, dans cette ville. Et ils font ça pour obtenir un certificat de bonne conduite de l’ennemi. »
Il a déclaré qu’aucune force sur terre ne pourrait empêcher un érudit musulman de communiquer et de prêcher le message de l’Islam.
Rajoub, qui est titulaire d’une maîtrise en Sharia, a dit que le ministre du Wakf de l’AP, al-Habbash, n’avait aucun droit d’empêcher les Uléma, ou savants musulmans, d’exercer leurs fonctions de base.
Pendant les élections de 2006, Rajoub a obtenu plus de votes que n’importe quel autre candidat dans le district d’Hébron.
Cependant, à cause de sa popularité, l’autorité israélienne d’occupation le persécute sans relâche, le jetant en prison pendant près de 50 mois sur des accusations montées de toutes pièces, comme le soutien à une organisation militante. Il n’y a que deux mois qu’il est sorti des geôles israéliennes.
Rajoub est toujours très populaire, ce qui inquiète l’AP qui essaie de limiter ses activités.
Les derniers événements de Dura se produisent au milieu d’accusations par les leaders islamiques palestiniens que l’AP combat de fait l’Islam pour plaire à Israël et aux Etats-Unis. Certains experts palestiniens et arabes sont convaincus que la satisfaction américaine et israélienne vis-à-vis de l’AP dépend largement de jusqu’où l’AP est prête à aller pour imposer des restrictions sur l’activisme islamique en Palestine occupée.
Mercredi dernier, les forces de sécurité de l’AP ont violemment bloqué une réunion organisée à Ramallah par des intellectuels libéraux et de gauche qui avaient l’intention de tenir une conférence de presse pour déclarer leur opposition à ce qu’ils considèrent être la capitulation de la direction de Ramallah aux diktats américains et israéliens.
La violente répression de la dissidence, renforcée ces derniers jours et semaines, est vue comme un mauvais présage par la plupart des Palestiniens. Ils craignent que l’AP ait recours à des tactiques très dures pour imposer un « accord de paix » impopulaire avec Israël, qui liquiderait la cause palestinienne en bradant ou en sacrifiant des droits palestiniens souverains comme Jérusalem et le droit au retour des millions de réfugiés palestiniens déracinés de leurs maisons et villages dans ce qui est maintenant Israël.