lundi 28 juin 2010

Dévorer al-Quds en pleine lumière

Jérusalem - 28-06-2010

Par Khaled Amayreh 
 La décision prise récemment par le gouvernement israélien d’expulser quatre députés palestiniens de Jérusalem vers des secteurs de Cisjordanie dirigés par l'Autorité palestinienne (PA) est une autre expression répugnante de la politique israélienne de nettoyage ethnique dans la ville, lieu saint pour les musulmans, chrétiens et juifs. Cette politique non déclarée mais claire vise à minorer autant que possible la population non-juive de la ville afin qu'Israël puisse réaliser son mantra régulièrement invoqué de Jérusalem-Est « capitale éternelle et unie d'Israël. »















Les quatre députés arabes, Muhammad Abu Tir, Ahmed Atwan, Mohammed Totah et Khalid Abu Arafeh, (ci-dessus lors d'une rencontre avec M. Abbas vendredi 25 juin) n’ont ni violé les lois, ni commis aucun crime et n'ont certainement rien fait qui justifie leur arrachement à leur patrie naturelle, leur ville natale.
Israël prétend que les quatre sont affiliés à une organisation politique considérée comme « terroriste » par l'Etat juif. Israël juge tout un chacun, y compris les militants de la paix transportant du lait en poudre et de la nourriture à Gaza bloquée, comme « terroriste ». En fait, Israël classe les Palestiniens en deux catégories : les terroristes, qui doivent être éliminés, et les collaborateurs ou les informateurs. C’est tout.
C'est pourquoi l'accusation à caractère politique (appartenance à une organisation terroriste) n’est qu’un prétexte depuis que le Hamas est un parti politique légitime avec des centaines de milliers de partisans.
Que veut dont Israël et qui va bien au-delà de vilipender et affaiblir le Hamas ? Israël veut tout simplement d'atteindre l'objectif suivant : faire que le plus de Palestiniens possible quittent Jérusalem-Est, de gré ou de force, et se saisir du plus possible des terres et des biens arabes, principalement sous la rubrique de la traque et de la lutte contre le Hamas.
En fait, on peut avancer plutôt franchement que la diabolisation absolue du Hamas par Israël a très peu de rapport avec la participation du mouvement islamique à la résistance active contre la cruelle occupation israélienne de la Cisjordanie, la bande de Gaza et à Jérusalem.
Le Hamas est une organisation honnête. Elle n’accepte rien moins que le retrait total d'Israël des territoires occupés conformément au droit international. Le mouvement refuse d'être cajolé ou intimidé par Israël pour renoncer à l'inaliénabilité des droits palestiniens usurpés par Israël. Il ne se laissera pas corrompre par la carotte ni contraindre par le bâton, qui aident à maintenir en vie l'espoir palestinien d’une véritable indépendance et de la liberté. Ceci, et non la question de terrorisme, est la véritable raison de la fixation folle d'Israël sur le Hamas, un groupe formé en réaction à l'oppression et à la sauvagerie israéliennes contre le peuple palestinien.
C'est pour ces raisons que la décision d'expulser ces députés démocratiquement élus doit être replacée dans le contexte plus large des efforts visant à nettoyer ethniquement les Arabes jérusalémites de leur ville qui abrite al-Masjidul Aqsa, le troisième plus important sanctuaire islamique au monde.
Bien sûr, la décision de bannir les quatre leaders jérusalémites n'est qu'une expression de la persistance d'Israël à faire de Jérusalem une ville sans musulmans et sans chrétiens, autant que possible.
Ces derniers jours, les autorités israéliennes ont décidé de démolir plus de 88 habitations arabes dans le quartier de Silwan. L'objectif déclaré de cet acte de guerre contre la démographie arabe est de construire un parc talmudique dans la région. Cependant, de nombreux signes montrent que le véritable objectif ultime est de renforcer la présence de colons juifs dans la région ainsi que de contraindre davantage d’Arabes à partir.


Vue générale du projet sioniste sur Al-Bustan, au coeur de la banlieue de Silwan. (image MaanNews).
Selon l'organisation israélienne pour les droits de l’homme B'Tselem, Israël a confisqué leurs droits de résidence à plus de 6.000 habitants palestiniens au cours des trois dernières années seulement.
D’autres mesures draconiennes destinées à chasser les Palestiniens incluent une fiscalité excessive, la saisie des biens, ainsi que la promulgation de lois qui conduiraient à détériorer la vie quotidienne des Palestiniens et à forcer autant de Palestiniens que possible à partir.
Israël, par exemple, ne se contente jamais de démolir des maisons palestiniennes et de confisquer leurs droits de résidence au moindre prétexte. Il est désormais hors la loi de protester contre ces mesures manifestement illégales, et bien sûr criminelles. Selon des sources fiables à Jérusalem, les autorités d'occupation israéliennes ont commencé à appliquer de nouvelles sanctions contre les Palestiniens de Jérusalem, dont la révocation des droits de résidence, la réévaluation de l'impôt dû et la réduction des prestations sociales.
Selon Ziad al Hammouri, directeur du Centre de Jérusalem pour les droits juridiques, la dernière décision raciste pourrait bien être un « test » qui permettrait de déterminer les actes ultérieurs de nettoyage ethnique par Israël.
« Ils essaient de nous arracher à nos maisons. Nous sommes face au danger réel d'être déracinés tout simplement parce que Israël veut une Jérusalem exclusivement juive et que nous ne sommes pas juifs. Il semble donc que le message israélien soit le suivant : Ou vous partez, ou vous vous convertissez au judaïsme. »
Comme les Palestiniens de partout, les Palestiniens de Jérusalem sont apparemment en train de protester avec succès contre les dernières mesures de nettoyage ethnique à Jérusalem. Toutefois, on ne peut pas faire confiance à Israël pour traiter équitablement les griefs arabes. En fait, l'expérience montre qu'en l'absence de pression internationale massive, Israël ne fera aucun cas du plus élémentaire des droits humains et civils de ses victimes.
C'est pourquoi, des efforts internationaux significatifs sont vitaux pour arrêter la dernière campagne israélienne visant l'existence même de la communauté indigène arabe de Jérusalem-Est.
Le gouvernement américain a mollement protesté devant les plans israéliens de démolition de nombreuses maisons à Silwan. Toutefois, les autorités israéliennes ne semblent pas prendre les Américains vraiment au sérieux.
L'administration Obama, qui avait demandé à Israël de geler l'expansion des colonies juives à Jérusalem-Est et dans le reste de la Cisjordanie, principalement afin d'offrir une atmosphère propice à la reprise du processus de paix clairement moribond, a effectivement succombé à l'arrogance et à l'insolence israéliennes.
Il serait donc naïf et autodestructeur pour les Palestiniens, les Arabes et les musulmans de mettre le moindre espoir sur l’administration Obama pour obliger Israël à reconsidérer ses desseins criminels à Jérusalem.
Il est sûr que l'impuissance américaine vis-à-vis d'Israël n'est pas intrinsèque en nature. Les États-Unis, gardien et allié d'Israël, ne voit tout simplement aucun besoin urgent d’être dur avec Israël tant que ses intérêts vitaux dans le monde musulman ne sont pas le moins du monde menacés puisque les régimes arabes sont en lice pour plaire et apaiser Washington.
Ceci a lieu alors que la colère et l'indignation des masses arabes et musulmanes s’élèvent à de nouveaux niveaux, en particulier au lendemain de l'agression criminelle israélienne sur la Flottille de la Liberté à Gaza le 31 mai, qui a tué au moins neuf activistes turcs et blessé des dizaines d'autres.
En dernière analyse, les masses arabes et musulmanes, bien incapable de renverser leurs régimes tyranniques soumis à Washington, peuvent au moins montrer aux Américains que des centaines de millions de musulmans à travers le monde ne pardonneront jamais au gouvernement des États-Unis sa scandaleuse étreinte de la criminalité israélienne envers le peuple palestinien.
En ce qui concerne les Palestiniens eux-mêmes, il est temps de tourner le dos à la soi-disant stratégie de solution à deux Etats.
Israël a tout simplement tué la solution de deux Etats en rendant pratiquement impossible ou irréaliste la création d'une Etat palestinien viable en Cisjordanie, à cause de la prolifération des colonies juives sur toute la terre arabe occupée.
Peut-être une lutte populaire soutenue, semblable à celle qui a finalement mis fin à l'ancien régime blanc minoritaire d’apartheid en Afrique du Sud, devrait être tentée par les Palestiniens.
Certes, Israël peut sembler quelque peu invincible et puissant. Toutefois, il existe de nombreux signes que Israël est aussi en pleine désintégration de l'intérieur et qu’il perd sur de nombreux fronts. Israël est sur le chemin de sa perte. Et je suis sûr que de nombreux intellectuels juifs le savent.
Vidéo : « Vendredi 25 juin 2006, des centaines de Palestiniens, d’Israéliens et d’activistes internationaux ont participé à une marche à travers Silwan pour protester contre la décision de démolir 22 maisons palestiniennes, et contre la politique israélienne de violence et de vol à Jérusalem Est. La manifestation fut forte et puissante. Il y a eu des discours, des slogans et des tambours. Un colon nous a jeté une pierre, mais personne n’a été blessé.
Ce fut la manifestation la plus importante à Silwan de ces quelques dernières années, et elle a eu lieu à la place de la manifestation hebdomadaire de Sheikh Jarrah.
»