lundi 24 mai 2010

Non-prolifération nucléaire ; Négociations difficiles à New York

publié le dimanche 23 mai 2010
Stéphane Bussard
 
Un échec de la Conférence de suivi du TNP, qui s’achève le 28 mai prochain au siège des Nations unies, n’est pas exclu
Le sort de la Conférence de suivi du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) pourrait tenir à deux pays : l’Egypte et les Etats-Unis. Réunis à l’ONU à New York depuis début mai, près de 150 Etats sur les 189 qui ont ratifié le TNP, vont entamer leur dernière semaine de négociations pour tenter de s’entendre sur une déclaration finale censée renforcer le traité et par là le régime de non-prolifération nucléaire. Des messages contradictoires se dégagent de New York, certains annonçant déjà l’échec de la conférence, d’autres laissant entendre que les derniers jours de pourparlers seront décisifs.
Moyen-Orient dénucléarisé ?
Le contexte international n’a pas facilité les travaux à New York. Lundi, le Brésil et la Turquie, deux membres non permanents du Conseil de sécurité, concluaient un accord avec l’Iran pour un transfert d’uranium en Turquie contre du combustible enrichi. Mardi, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, déclarait qu’un accord avait été trouvé au sein des cinq membres permanents du Conseil de sécurité pour imposer un quatrième train de sanctions à l’Iran. Enfin une enquête internationale vient de révéler que la Corée du Nord, qu’on soupçonne de fabriquer la bombe, aurait torpillé une corvette sud-coréenne en mer Jaune.
Les nouvelles sanctions ont hérissé plusieurs pays non alignés qui « poussent à considérer l’accord turco-brésilien avec l’Iran comme un bon accord », relève un expert de la non-prolifération qui souhaite garder l’anonymat. Ils aimeraient le faire figurer dans la déclaration finale dont un projet circule, prévoyant un plan d’action en 26 points.
De fait, le dossier qui pourrait faire capoter la conférence est la question de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. En 2005, l’Egypte, qui juge la création d’une telle zone indispensable avait précipité l’échec de la conférence de révision du TNP qui se tient tous les cinq ans. Les Etats-Unis ont intérêt à ne pas rejeter d’un revers de main la proposition égyptienne. Washington a besoin du Caire et des autres capitales arabes pour contrer les ambitions nucléaires iraniennes. L’Egypte n’entend pas non plus apparaître à nouveau comme un rabat-joie. Fait nouveau : ces dernières semaines, la presse israélienne a ouvert le débat sur la posture nucléaire du pays alors qu’Israël est toujours resté muet sur son arsenal nucléaire non déclaré. « Un changement est dans l’air », souligne-t-on alors que Tel-Aviv semble apparemment inflexible sur la question.
L’Egypte a dès lors proposé d’organiser en 2011 déjà une conférence sur l’éradication des armes nucléaires du Moyen-Orient avec la participation de tous les Etats de la région. Les Etats-Unis proposent de la convoquer pour 2013, mais précisent qu’une interdiction de l’arme nucléaire incluant Israël serait impossible sans que la paix règne sur le Moyen-Orient.
Echecs successifs
Qu’est-ce qui fera de la conférence de New York un succès ou un échec ? Pour Keith Krause, professeur à l’Institut de hautes études internationales à Genève, « une feuille de route indiquant comment maintenir et renforcer le régime de non-prolifération ces prochaines années serait un succès. Rappelons que quatre conférences de suivi ont été des échecs. Un échec en soi ne serait pas une surprise. » Un engagement des puissances nucléaires à aller plus loin dans le désarmement serait aussi un pas positif, comme l’acceptation, par les Etats non nucléaires, d’agir en toute transparence en coopération étroite avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).