jeudi 15 avril 2010

L’épuisement et la perte de sa légitimité sont les plus grandes menaces pour Israël

mercredi 14 avril 2010 - 16h:41
Wadii Aawawda - Al Jazeera
L’étude sur la sécurité nationale, présentée lors de la dixième conférence d’Herzeliya (Israël), montre qu’Israël fait face aujourd’hui à des dangers stratégiques dus au développement de la résistance arabo-islamique. Le but de cette résistance est « l’épuisement et l’effondrement » d’Israël à travers des campagnes visant à lui enlever sa légitimité dans le monde.
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Soldat israélien blessé au Liban, juillet 2006 - Le Hizbollah a remis les pendules à l’heure en démontrant la faiblesse des troupes israéliennes sur le terrain face à une résistance arabe organisée et déterminée.
L’étude publiée par l’Institut de sécurité « Raout » - institut d’études créé en 2004 dont la mission est de conseiller les décideurs - affirme que les dernières guerres du Liban et de Gaza ont révélé un grand danger pour la légitimité d’Israël dans le monde.
A cause de son alliance avec les Etats-Unis, de ses rapports privilégiés avec les principaux Etats européens et de la paix avec l’Egypte et la Jordanie, Israël s’expose aujourd’hui à de dures campagnes dans le monde, y compris dans des Etats amis.
Boycott mondial
L’étude - à la préparation de laquelle ont participé de nombreux experts - indique qu’Israël est exposé à des opérations diaboliques qui cristallisent la menace de la dépossession de son droit à l’existence.
Pour preuve de cela, on cite les tentatives de boycott académique en Angleterre contre Israël et le boycott académique et économique dans certains pays européens, tandis que le rapport de Richard Goldstone (à propos de la guerre contre Gaza) marque le couronnement de ces campagnes.
Les auteurs de l’étude attirent l’attention sur les conséquences stratégiques résultant de la dégradation de la position d’Israël : la contraction de sa capacité de manœuvre dans l’utilisation de la force militaire, l’augmentation de l’intervention internationale dans les affaires concernant la situation des citoyens arabes israéliens et l’activité de tribunaux internationaux contre des Israéliens causant ainsi des tensions diplomatiques.
On pourrait penser qu’à priori les dangers et les défis auxquels fait face Israël paraissent anciens, mais par le passé également, il lui était difficile de consolider les acquis obtenus lors d’affrontements militaires, de même que le pays s’était exposé à de violentes critiques allant jusqu’à faire douter de sa légitimité, comme la décision des Nations-Unies en 1975 assimilant le sionisme au racisme.
Israël se trouve aujourd’hui devant un défi stratégique existentiel nouveau résultant de deux démarches coordonnées venant à maturité l’année dernière : la résistance arabo-islamique adopte une stratégie de l’épuisement d’Israël, pour aboutir à son effondrement, en utilisant plusieurs moyens : maintenir les charges qui pèsent sur Israël tout en les augmentant, développer une théorie de combat sur les fronts militaire et civil en tenant compte des rapports de forces inégales et enfin enlever à ce pays sa légitimité.
Les auteurs de l’étude observent que la résistance a remplacé ces dernières années le « discours de la destruction » direct basé sur l’invasion militaire, par le « discours de l’épuisement ». Ce dernier discours vise l’effondrement d’Israël de l’intérieur, par l’augmentation de la tension dans la société israélienne qui l’entraînerait à une guerre civile entre orientaux et occidentaux, faucons et colombes, religieux et séculaires ou juifs et arabes.
Exemples mondiaux
Le « discours de l’épuisement » a commencé en 1970 après l’échec de l’affrontement direct avec Israël, mais, dernièrement, ce discours a pris un nouveau départ qui s’est traduit par une série de lignes de conduite qui ont commencé à porter leur fruit.
Pour preuve du danger engendré par la stratégie de l’épuisement, l’étude présente des exemples de pays qui se sont effondrés suite à la perte de leurs assises politique et économique, comme l’Afrique du Sud, l’Union Soviétique et l’Allemagne de l’Est.
Et la prolongation (de la stratégique de l’épuisement) est la raison centrale de l’effondrement de ces pays qui s’est produit après un manque évident de l’équilibre entre les ressources et les besoins ou entre l’idéologie et la réalité.
Prolongation (de la stratégie de l’épuisement) et défis
Le sionisme fait face à cette stratégie depuis la guerre de 1967 qui a creusé un fossé entre ses valeurs traditionnelles appelant à un Etat juif démocratique et la réalité : l’occupation (de terres arabes) et la situation démographique qui en résulte.
L’étude signale également que la résistance a transformé l’occupation israélienne de fardeau en acquis pour elle : l’Organisation de libération (de la Palestine) a commencé à étayer sa nouvelle stratégie en 1974. Et certains voient dans les accords d’Oslo une des couvertures de cette nouvelle stratégie, la reconnaissance d’Israël par les Palestiniens (mentionnée dans ces accords) ne signifiant pas celle de son droit à l’existence.
Une autre démarche dangereuse se cristallise autour de la dé-légitimation d’Israël dans le monde, dans le but de le transformer en Etat atteint de la lèpre (symbole du mal envahissant), Etat qui finira par disparaître. Cette démarche fait découvrir la faiblesse du dispositif d’information israélien à destination de l’extérieur.
La menace contre le droit d’Israël à l’existence, représentée par la suppression de sa légitimité essentielle, représente l’un des défis principaux qui se posent à lui après 70 ans.
Cette menace est le produit des deux conduites mentionnées qui provoquent par leur interaction et leur alimentation une situation politique et diplomatique explosive qui peut se transformer en danger existentiel dans quelques années.
Méthodes de protection
L’étude - qui se base sur une enquête auprès de cent experts israéliens et étrangers et des enquêtes en Europe - montre clairement que la résistance (arabo-musulmane) agit aujourd’hui selon le « discours de l’épuisement » en relation avec les attaques politiques et économiques contre Israël.
Cette action vise à épuiser continuellement Israël afin de lui rendre le fardeau de l’occupation de plus en plus lourd et à lui enlever sa légitimité, en lui livrant une guerre de harcèlement sur le front intérieur, et tout ceci pour contrebalancer la supériorité militaire et technologique israéliennes.
L’étude insiste sur le fait que la résistance n’attend pas la fin de l’occupation israélienne de la Cisjordanie, mais elle utilise la cause palestinienne comme un moyen de se débarrasser d’Israël ; c’est pour cela que la création d’un Etat palestinien et la fin du conflit avec les Palestiniens n’arrêteront pas la démarche de la résistance visant à enlever sa légitimité à Israël.
Il est probable que la résistance arabe utilisera à l’avenir, si le règlement des deux Etats (palestinien et israélien) aboutissait malgré elle, d’autres arguments pour ébranler la légitimité d’Israël de l’intérieur et de l’extérieur comme : les Palestiniens de l’intérieur, l’arme nucléaire israélienne ou l’application des règlements relatifs aux Lieux Saints.
Pour relever les nouveaux défis, les auteurs de l’étude appellent Israël à s’appuyer sur des programmes dont les objectifs sont : le triomphe simultané sur les fronts militaire et politique, la fortification du front intérieur, le développement de l’information en passant de la défense à l’attaque par l’intermédiaire de nouveaux ambassadeurs non gouvernementaux, la construction de larges réseaux de relations personnelles avec des parties influentes dans le monde dans les différents domaines.
Il faut indiquer enfin qu’à la conférence d’Herzeliya, plusieurs exposés ont porté sur la guerre que doit mener Israël contre la prise de conscience du monde à son sujet et l’image que se fait ce monde d’Israël.
4 avril 2010 - Al Jazeera
Traduction de l’arabe : Siahmad Taleb
http://info-palestine.net/article.php3?id_article=8532