dimanche 6 décembre 2009

Au Proche-Orient, un espoir nommé Marouane Barghouti

publié le samedi 5 décembre 2009

Bernard Guetta
Où trouver le moindre espoir d’apaisement au Proche-Orient ? A s’en tenir aux faits, la réponse est claire : nulle part.

Après avoir envisagé de charger la France et la Russie d’enrichir son uranium à un niveau interdisant tout usage militaire, l’Iran a si bien semé la confusion sur ses intentions qu’il est parvenu à faire l’unanimité des grandes puissances contre lui. (... [1])

Président sortant de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas ne veut plus se représenter car il ne croit plus en la possibilité d’un règlement définitif fondé sur la coexistence de deux Etats. Il se retire faute d’une perspective à offrir à son peuple et va laisser un vide que seul le Hamas paraît à même de combler. L’impasse pourrait difficilement être pire sur tous les fronts, mais cette réalité dit-elle tout ? (...)

Rien n’est joué à Téhéran et la situation n’est pas moins mouvante sur le front israélo-palestinien. Que les négociations entre le Hamas et Israël aient ou non permis, cette semaine, l’échange d’un millier de détenus palestiniens contre Gilad Shalit, le soldat israélien capturé en 2006, leur ouverture indique à elle seule un besoin commun de faire bouger les lignes. Les islamistes veulent démontrer que la force peut faire plier les Israéliens. Benyamin Netanyahou aspire, lui, au prestige que la libération de Shalit lui donnerait sur sa scène intérieure mais, au-delà de ces intérêts immédiats, tous poursuivent, aussi, des objectifs à plus long terme.

Les islamistes voudraient progresser vers une reconnaissance internationale qui leur permettrait de s’imposer en force palestinienne reconnue par Israël. Ils voudraient que leur bunker ne soit plus hermétiquement fermé par les Israéliens et leur devienne un atout dans la négociation d’un modus vivendi tandis que Benyamin Netanyahou, lui, voudrait pouvoir intégrer, un jour, les islamistes à la recherche d’un règlement car le statu quo n’est plus tenable pour Israël. Sans solution politique, les islamistes deviendront vite la force politique dominante en Cisjordanie alors qu’ils sont déjà maîtres de Gaza. Sans création d’un Etat palestinien, les Israéliens n’auront bientôt plus d’autre solution que de réoccuper l’ensemble des Territoires palestiniens. Leur image internationale en serait encore dégradée et leur économie en souffrirait aussi car l’occupation n’a pas qu’un prix politique.

Israël a tout autant besoin de bouger que le Hamas et toute leur négociation ne portait, en fait, que sur une seule libération, celle de Marouane Barghouti, le plus populaire des dirigeants palestiniens. Le reste n’était qu’habillage car, à la fois partie prenante des accords d’Oslo et organisateur de la deuxième Intifada, radical dans le combat mais modéré dans ses buts, Marouane Barghouti est le seul homme qui puisse refaire l’unité du Hamas et du Fatah dont il est membre, négocier en leur nom et, le jour venu, faire avaliser par l’ensemble de son peuple un compromis acceptable pour les Israéliens. Sous le coup de cinq condamnations à vie et candidat déclaré à la succession de Mahmoud Abbas, ce quinquagénaire au sourire juvénile est la carte de la paix. Qu’il ait été ou non libéré cette semaine, elle passera par lui.

[1] Les passages qui ne traitent pas directement du proche Orient mais plus spécifiquement de l’Iran sont mis entre parenthèses par la rédaction du site. Voir l’entièreté sur l’article source

Bernard Guetta est membre du conseil de surveillance de Libération.

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