mardi 24 novembre 2009

Monsieur le Président, permettez-moi de jurer aujourd’hui

Brésil - 22-11-2009
Par Iqbal Tamimi
Vous souvenez-vous des malheureux réfugiés palestiniens qui vivaient dans le désert, dans le camp d’Al-Rweished, à la frontière jordano-irakienne ? C’est à eux que le gouvernement brésilien a promis en 2007 de leur offrir un refuge et leur sauver la vie. Eh bien devinez-quoi ? Ils sont arrivés au Brésil pour découvrir que toutes les promesses s’étaient évaporées, y compris celles des Nations-Unies qui leur avaient promis une vie digne, des études pour leurs enfants et des soins médicaux ; aucune de ces promesses n’a été tenue.




















Le camp de réfugiés palestiniens d'al-Rweished, à la frontière jordano-irakienne, "évacué" en 2007 (A.van Genderen Stort/UNHCR)


Depuis, les réfugiés, qu’on a sortis d’un trou pour les mettre dans un cratère, protestent parce que personne ne veut entendre leur agonie. Les Nations-Unies leur ont dit que s’ils n’étaient pas contents, ils pouvaient toujours repartir dans le Camp Tanf du désert, ou en Irak. Ces mêmes réfugiés, dont Dieu seul sait combien de fois ils ont été réfugiés depuis que l’Etat sioniste les a chassés de leur patrie, disent que vivre dans le désert est plus clément que de rester au Brésil, sans aide ni protection ; certains ont été attaqués, volés ou tués, mais personne n’a tenté de les aider, eux et leurs enfants. En bref, leur opération de sauvetage fut un de ces coups de pub propagandistes, un peu de sel médiatique sur un cadavre dans l’espoir qu’il ait meilleur goût.

Les bonnes nouvelles sont arrivées avant les cadeaux de Noël et les réfugiés palestiniens se sont réjouis que Mahmoud Abbas, le président de leur pays, soit en visite au Brésil, et qu’il rencontre les Palestiniens aujourd’hui, dimanche 22 novembre, MAIS la fédération palestinienne au Brésil, dirigée par Oliyan Tahir, a demandé à ces malheureux de payer pour rencontrer Abbas. Ils doivent payer pour rencontrer leur propre président. On a demandé à chaque réfugié de payer une somme égale à 27$ pour rencontrer Abbas.

Si aucun de ces réfugiés, trimballés entre différents pays d’enfer, ne peut payer le prix pour rencontrer son propre dirigeant en visite auprès de la Diaspora, alors tant pis, voir les dirigeants coûte de l’argent, les shows de notre président ne sont pas gratuits. Et comme les réfugiés pauvres, sans abri, n’ont pas d’argent, cela veut dire qu’ils ne peuvent pas se plaindre, ni rencontrer celui qui justement pourrait soulager leurs souffrances.

Nous exigeons une réponse : quand la corruption va-t-elle cesser ? Quand quelqu’un interviendra-t-il pour stopper les richards de faire ce qu’ils font ?

Ces réfugiés, à qui on demande de payer 27$ pour rencontrer leur président qui est déjà payé pour faire son boulot, sont les plus pauvres parmi tous les Palestiniens, ils n’ont pas d’argent pour manger, pour payer un loyer, pour envoyer leurs enfants à l’école, comment diable peut-on attendre qu’ils paient 27$ pour rencontrer Abbas et lui parler de leur misère ? Comment diable peuvent-ils payer pour voir les nouvelles chaussures bien cirées de leur propre Président ?

On leur a dit que ces 27$ couvraient le dîner qu’ils pourraient avoir avec Abbas. Pour l’amour de Dieu, un peu de pitié ; 27$ nourriraient tous les membres de leur famille, s’ils pouvaient se le permettre. Ils ne veulent pas le voir pour manger, ils veulent juste se plaindre et rentrer chez eux.

L’auteur palestinien Safa JadAllah, qui vit au Brésil depuis 20 ans, a dit que les Palestiniens qui veulent rencontrer Abbas sont censés payer le prix d’un repas, mais non seulement ça, ils sont censés couvrir également les frais d’hébergement de leur président et des gens qui sont venus avec lui.

Quand a-t-on jamais entendu une telle absurdité ? Quand a-t-on jamais entendu parler d’une pauvre nation de réfugiés vivant en Diaspora qui doit soutenir financièrement son président, ou financer ses déplacements politiques ? Pourquoi Abbas n’est-il pas financé par son propre fils, le millionnaire, s’il ne peut se payer ses frais d’hôtel ? Pourquoi ne reste-t-il pas chez lui et faire son boulot par téléphone ? Il épargnerait au moins à son peuple la charge financière. Je me demande si cette visite à quoique ce soit à voir avec les réfugiés palestiniens, au départ.

Ahmad Qteesh est un de ces réfugiés palestiniens sans abri qui a été mis à la porte de chez lui parce qu’il ne pouvait plus payer le loyer ; est-il même compréhensible qu’il doive payer pour l’hébergement de la délégation palestinienne alors que ses propres enfants dorment dans la rue ? Abbas ne peut-il pas soutenir cette famille, pour changer ?

Peres est allé au Brésil, et maintenant Abbas est au Brésil, et le Brésil veut jouer un rôle d’intermédiaire, mais tout le monde se fiche des réfugiés. On m’a dit qu’Abbas a rencontré le président brésilien, et devinez quoi ? Les discussions ont porté sur l’admiration d’Abbas pour le Brésil, en particulier après que le Brésil ait désigner pour accueillir les jeux olympiques en 2016 !

Je n’ai jamais juré de ma vie, mais aujourd’hui, j’ai une furieuse envie de vomir d’abord, et ensuite de jurer, jurer de toutes mes forces. Monsieur le Président et le reste de la bande, ayez pitié de ces réfugiés et de leurs familles. Il n’est pas juste que vous dormiez dans un lit, dans un bel hôtel, avec ceux qui vous accompagnent, pendant que les réfugiés sans abri doivent payer la facture de votre confort. Ne vous servez pas des réfugiés palestiniens de la Diaspora pour couvrir vos luxueux déplacements.