mercredi 16 septembre 2009

Les colons juifs de Yitzhar craignent Dieu, pas un gel de la colonisation

16/09/2009
Yitzhar, bastion juif ultraorthodoxe proche de Naplouse, a la réputation d’être l’implantation la plus extrémiste de la Cisjordanie occupée.                                                                       Menahem Kahana/AFP
Yitzhar, bastion juif ultraorthodoxe proche de Naplouse, a la réputation d’être
l’implantation la plus extrémiste de la Cisjordanie occupée.
Menahem Kahana/AFP
Quatre avant-postes de la colonie sont sur la liste des implantations illégales que le gouvernement israélien a promis de démanteler.
« Nous ne cesserons pas de construire car c'est notre terre », assure Nevo Katz, maire de la colonie juive de Yitzhar, qui dit ne pas craindre un gel de la colonisation israélienne en Cisjordanie.
Yitzhar, bastion juif ultraorthodoxe, a la réputation d'être l'implantation la plus extrémiste de la Cisjordanie occupée. Proche de la ville de Naplouse, elle est souvent le théâtre d'affrontements entre les colons et les Palestiniens ou les forces de sécurité israéliennes. Hier matin, des colons venus de Yitzhar ont blessé par balle un berger palestinien et ont également égorgé dix moutons dans un village proche de Naplouse, selon des habitants. En soirée, d'autres colons ont attaqué pour la première fois une Jeep militaire à la bouteille incendiaire. Les militaires, qui ont pour consigne de tirer à balles réelles à chaque fois qu'ils sont attaqués à la bouteille incendiaire par des Palestiniens, n'ont cette fois-ci pas riposté, voyant que les agresseurs portaient des phylactères (que portent les juifs pieux). Quatre avant-postes de la colonie sont sur la liste des implantations illégales que le gouvernement israélien a promis de démanteler. Sans effet pour l'instant, malgré les pressions des États-Unis qui réclament un gel total de la colonisation. Le maire de Yitzhar ne comprend pas l'intérêt de l'administration américaine pour ces avant-postes : « Le fait que Barack Obama soit si intéressé par chaque colline de Judée-Samarie (Cisjordanie) prouve à quel point le peuple juif a une place centrale dans le monde », ironise-t-il.
À Givat Shalevet, un avant-poste situé à quelques centaines de mètres de la colonie, tracteurs et pelleteuses effectuent des travaux de terrassement. « Il s'agit du chantier de dix nouvelles maisons, grâce à des permis obtenus depuis des années. De toute façon, ce n'est pas la communauté internationale qui va nous dicter où et quand construire », se défend le maire. Yossef, un homme âgé qui vit sur la colline depuis sept ans, ne voit pas pourquoi il faudrait détruire sa maison, en fait un préfabriqué. « Je ne sais pas ce que signifie illégal, je ne crois pas à l'État, à aucun État », confie-t-il, les larmes aux yeux. « Que les Américains s'occupent de leurs problèmes et ne se mêlent pas des nôtres », ajoute-t-il. La plupart des colons de la région de Naplouse citent la Bible pour exciper de leurs droits de propriété. « Nous avons le droit de construire sur toute la terre d'Israël car c'est Dieu qui nous l'a donnée », argue le vieil homme. À quelques kilomètres de Yitzhar, l'avant-poste de Havat Gilad est l'un des plus menacés de destruction. Là encore, des affrontements ont lieu sporadiquement avec les forces de sécurité israéliennes qui tentent d'empêcher toute construction sur le site. Une vingtaine de familles vivent sur cette colline, ainsi qu'une dizaine d'étudiants de la yechiva (séminaire talmudique) Shirou Lamelekh (Chanter pour le Roi). « Dieu est le roi ! » proclame un graffiti sur le mur de cette yechiva, érigée dans « l'esprit du roi David ». « Le roi David composait des chansons, mais il savait aussi utiliser sa fronde contre les ennemis de Dieu », plaide le jeune rabbin Arié Lipo, qui s'est installé à Havat Gilad pour « vivre comme au temps de la Bible ». Le gel de la colonisation ne l'effraie pas car « la seule loi de Havat Gilad, c'est la loi divine ». La tête couverte du talit, le châle rituel pour la prière, et des tefilines, des phylactères contenant des parchemins sacrés que les juifs pratiquants portent durant la prière, le rabbin Lipo préfère évoquer « le royaume divin qui doit régner sur toute la terre » plutôt que les pressions américaines ou les affrontements avec les forces de l'ordre. « Le monde doit reconnaître que nous sommes le peuple de la Bible qui revient sur sa terre comme Dieu nous l'a promis », prêche-t-il. Il ne croit pas que le gouvernement va détruire sa maison, mais il est prêt à toute éventualité. « Si on vient me déloger, je dirai haut et fort que c'est ma terre, celle du peuple juif, et que personne n'a le droit de nous forcer à la quitter ».

Michael BLUM (AFP)