lundi 7 septembre 2009

L’eau, nerf de la guerre en Palestine

publié le dimanche 6 septembre 2009

Nadir Dendoune
La guerre de 1967 a permis à Israël d’accaparer les ressources hydrauliques de Gaza, de la Cisjordanie et du Golan.

Il y a des rumeurs qui cavalent d’Est en Ouest et du Nord au Sud : la maman de Salah Hamouri (citoyen français emprisonné depuis quatre ans dans une geôle israélienne sans que le Quai d’Orsay se bouge trop le troufion pour le faire libérer, électoralement parlant délivrer un moitié-Bougnoule, ce n’est pas très intéressant et surtout c’est primordial de ne pas heurter la sensibilité de nos amis et alliés israéliens) se parfumerait avec la meilleure des eaux de Cologne du pays. Il parait également que ce serait le même parfum qu’utilise ma mère. Si c’est vrai, alors prenez rendez-vous le plus vite possible avec Madame Hamouri et serrez-là très fort dans vos bras. C’est d’ailleurs ce que je compte faire en rentrant à Paris.

En attendant, pas très loin de Yabad, au Nord-Ouest de la Cisjordanie, un Palestino d’une cinquantaine d’années avec une moustache années 50, dirige avec le cœur une belle exploitation agricole. Il fait beau ce jour-là quand je rencontre M.

Le ciel a mis son smoking, les nuages sont rentrés au vestiaire. Il y a plusieurs manières d’entuber un peuple. Soit par devant, comme les Boers en Afrique du Sud qui l’avaient joué cash : nous, Hommes Blancs, auront tout et vous les Négros, vous aurez que dalle. Les Israéliens, des vicelards en puissance, préfèrent mettre de la vaseline. Israël c’est comme le Canada Dry, « ça a la couleur de la démocratie, le goût de la démocratie…mais ce n’est pas de la démocratie ». Les enfoirés ont compris que, dans une région archi-aride, priver les Palestiniens d’eau, c’était comme les amputer de leurs deux jambes.

« Moi, si je veux construire un puits, je dois obtenir un permis délivré par les autorités israéliennes (ce qui vous vous en doutez bien est quasi-impossible), commence à me dire M., le patron qui emploie une quinzaine de personnes. Je pourrais avoir cinquante salariés, cultiver des tas d’autres fruits, je pourrais même lancer un élevage de vaches, si j’avais accès à plus d’eau ».

La guerre de 1967 a permis à Israël d’accaparer les ressources hydrauliques de Gaza, de la Cisjordanie et du Golan. De fait, la majeure partie des eaux du Jourdain est détournée par l’Etat raciste avant qu’elle n’atteigne les Territoires occupés. Deux mesures sont également prises à cette période : interdiction de toute nouvelle infrastructure hydraulique, de forages ou de puits sans autorisation et confiscation des ressources en eau, conformément à la loi israélienne de 1959 qui fait de l’eau « une propriété publique ».

un puits clandestin

Les Palestino n’ont donc pas accès à la totalité de leurs ressources hydrauliques. De nombreux villages palestiniens ne sont toujours pas reliés à un système de distribution d’eau. Comme M. est un battant, il a été obligé de jouer la caillera et de construire un puits illégal, « si ils le découvrent, je suis foutu » me confie-t-il. Comme l’eau récupérée avec son puits n’est pas suffisante (il ne flotte pas énormément), M. doit acheter de l’eau amenée par camion-citerne (l’eau acheminée coûte un peu plus cher), venue tout droit d’Israël et vendue, en principe, au même prix que celle vendue aux Israéliens, sauf que le PIB est vingt fois plus élevé en Israël qu’en Palestine !

« L’eau représente un tiers de mon budget. En plus, avec les check-points, les couvre-feux et autres blocus, on n’est pas toujours approvisionné ». La Palestine est occupée militairement, ça même Sarko, président métèque d’origine hongroise est au courant, mais pour couronner la Reine d’Angleterre, elle est de plus en plus entourée de colonies juives et sauvages. Comme en ce moment c’est l’Aid-El-Kébir tous les jours pour eux, la quantité d’eau que reçoivent ses squatteurs illégitimes, sans cœur et sans foi, est, chaque année, en constante augmentation. De plus, l’eau y est subventionnée, ce qui signifie donc que le Palestino-de-base, beaucoup plus pauvre que l’Israélien-de-base doit débourser davantage pour s’approvisionner. Sympa. M. a mis vingt ans pour mettre sur pied son exploitation agricole. La sienne est de loin la plus prospère. Il a commencé avec wallou et aujourd’hui il peut être fier et il l’est, il n’y a qu’à regarder ses yeux, d’être à la tête d’une entreprise florissante. Ses plantes sont magnifiques et ses fruits ont la patate olympique.

« Je ne vais pas me plaindre, la plupart des agriculteurs de la région n’arrivent pas à joindre les deux bouts, certains se voient même contraints d’abandonner leur propriété. Moi, je vis bien, hamdulillah, mais on pourrait faire tellement mieux . » M. me raconte ensuite qu’il doit faire face également à des coupures d’eau, « ça arrive surtout l’été ». Au moment où il en a donc le plus besoin…En 1941, David Ben Gourion, le premier des Premiers ministres d’Israël avait déclaré : « Nous devons nous rappeler que, pour parvenir à enraciner l’Etat juif, il faudra que les eaux du Jourdain et du Litani soient comprises à l’intérieur de nos frontières ». Trop fort. Alors, la démocratie, vous la préférez avec ou sans vaseline ?