jeudi 20 août 2009

La présence du FNJ en Amérique du Sud perpétue l’injustice contre la Palestine

mercredi 19 août 2009 - 08h:13

Rahela Mizrahi
The Electronic Intifada


Faire pression sur les gouvernements du Venezuela et de Bolivie pour qu’ils virent le FNJ de leurs capitales.

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Entrée de la forêt d’Eshtaol, qui recouvre plusieurs villages palestiniens
détruits par les sionistes en 1948.
(Photo : IJAN)


Sans la moindre ironie, des terres de villages palestiniens détruits que s’était approprié le Fonds national juif (FNJ) ont été dédiées à des héros révolutionnaires sud-américains de la libération.

Depuis sa création en 1901, le FNG est un acteur clé dans la dépossession des Palestiniens et la colonisation de leur patrie. Comme Uri Davis le note dans son livre Apartheid Israel, la loi de 1953 relative au FNJ et la Convention de 1961 entre le gouvernement d’Israël et le FNJ sont au cœur du système juridique de l’apartheid israélien qui « nationalise » les propriétés privées des Palestiniens.

Malgré cela, le FNJ tient aussi des bureaux dans les capitales de la Bolivie et du Venezuela où il accumule des fonds pour mieux consolider un système raciste et effacer les traces du double crime d’Israël : le nettoyage ethnique de la Palestine, et la dissolution des communautés juives arabes de l’ensemble du monde arabe avec le transfert, par la tromperie et le terrorisme, des juifs d’origine arabe en Palestine.

Après avoir détruit la plupart des villages palestiniens sur le territoire qu’on appelle aujourd’hui Israël, le mouvement sioniste a logé des juifs transférés d’origine arabe dans certains de ces villages, le FNJ les utilisant pour planter des pinèdes sur les ruines mêmes des villages palestiniens.

Le FNJ et la Convention ont décidé que 93% de l’ensemble du territoire occupé par Israël en 1948 seraient des « terres nationales », affectées légalement à ces gens définis en vertu des lois de l’Etat d’Israël comme « juifs ». Ceci met effectivement ces terres hors de portée de la population palestinienne indigène et constitue une sorte de nettoyage ethnique légal. De plus, le FNJ a joué un rôle dans le camouflage des ruines de beaucoup, si ce n’est de la plupart, des localités palestiniennes nettoyées ethniquement par l’armée israélienne au cours et à la suite de la guerre de 1948. Selon Uri Davis, il a opéré en plantant des forêts et en développant des parcs de loisirs sur les terres qui avaient été nettoyées, et sur ce qui en restait.

Un exemple édifiant du double crime commis par les sionistes est la forêt d’Eshtaol. La plus grande partie de la forêt d’Eshtaol recouvre les terres de deux villages palestiniens : Islin, où vivaient 280 habitants, et Ishwa, anciennement foyer de 680 Palestiniens. Les habitants de ces terres ont été expulsés par la brigade Harel, de la milice Palmach, qui était partie du kibboutz Zoraa le matin du 18 juillet 1948. La forêt d’Eshtaol se trouve aussi sur les terres de deux autres villages : Beit Mahsir et Beit Susin, d’où furent expulsés respectivement 2 620 habitants le 11 mai 1948 et 230 le 20 avril 1948.

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Panneau indicateur pour les trois patios dédiés aux héros sud-américains

Dans la forêt d’Eshtaol, il y a trois patios. Le premier est dédié à la mémoire de Simon Bolivar, le libérateur vénéré de l’Amérique latine du colonialisme européen au 19è siècle, et se trouve sur les terres du village d’Ishwa. Les deux autres patios sont dédiés à un autre libérateur de l’Amérique latine, de la même période, le général José de San Martin ; ils sont sur les terres de Beit Mahsir.

Moshav (le terme sioniste pour village) Eshtaol, construit sur les ruines d’Ishwa, est un village d’immigrants du Yémen transférés par le mouvement sioniste en Palestine après le nettoyage ethnique de 1948. Dans le camp de transfert de Sana, capitale du Yémen, l’agence sioniste a pillé plus de 50 tonnes de livres et manuscrits sacrés anciens de la communauté juive yéménite, et nombre de tonnes de pièces d’orfèvrerie, un art dans lequel elle excellait. Dans le camp de transfert, des enfants ont été enlevés et livrés à des familles juives européennes pour adoption. Une fois au moshav d’Eshtaol et au moshav voisin de Yishi, qui connut une histoire identique, la communauté a réussi à rétablir en partie la vie comme elle était au Yémen.

Le retour des réfugiés palestiniens sur leurs terres ne signifierait pas nécessairement une nouvelle dépossession de cette communauté. Au contraire, il pourrait donner une occasion de créer des relations de voisinage qui détermineraient les torts causés tant aux réfugiés palestiniens qu’aux juifs des pays arabes par le mouvement colonial européen. Dans le même temps, il fortifierait la culture de la communauté juive yéménite du moshav Eshtaol et du moshav Yishi qui s’est toujours nourrie des civilisations arabes et musulmanes dans son pays d’origine. Il pourrait également servir à consolider leur dialecte arabe par rapport à l’hébreu, un dialecte et une culture menacés d’extinction par l’establishment ashkénaze sioniste.

Ce n’est que lorsque ces injustices historiques seront réparées que l’usage de ces noms de héros révolutionnaires sera justifié. Jusque-là, ceux qui s’intéressent à la justice sociale doivent faire pression sur les gouvernements du Venezuela et de Bolivie pour qu’ils virent le FNJ de leurs capitales.

Rahela Mizrahi est titulaire d’une maîtrise de l’art de l’Académie Betzalel de Jérusalem et termine actuellement un doctorat sur « l’organisation de l’expropriation, de la tranformation et de l’appropriation du patrimoine palestinien à travers l’art israélien » à l’université de Tel Aviv.

Une version de cet article a été publiée par IJAN, réseau international juif antisioniste sous le titre : Appel à Hugo Chaves and Evo Morales.

13 août 2009 - The Electronic Intifada - traduction : JPP