L’Espagne et le Royaume-Uni ont annoncé, le 4 août, la révision de leur politique d’exportation d’armes vers Israël en raison du conflit à Gaza, preuve que les États-Unis ne sont pas les seuls à équiper Tsahal.
Contrairement aux idées reçues, les États-Unis ne
sont pas les seuls à vendre des armes à Israël. Réagissant au conflit à
Gaza, deux pays européens, l’Espagne et le Royaume-Uni, ont annoncé, lundi 4 août, leur décision de revoir leurs exportations de matériel militaire vers l’État hébreu.
Madrid a choisi de suspendre totalement ses ventes d’armes à Israël.
Mais la mesure est plus symbolique qu'autre chose car elle ne représente
que cinq millions d’euros. Le Royaume-Uni ne va pas aussi loin. Le
gouvernement britannique a seulement annoncé vouloir s’assurer que
l’équipement militaire livré ne serait pas utilisé à Gaza. Mais dans le
cas britannique, les sommes en jeu citées par le "Financial Times" sont bien plus importantes puisqu'il s'agit de 8 milliards de livres sterling (10 milliards d'euros, 13 milliards de dollars).
Ce montant a de quoi surprendre. Le Royaume-Uni aurait-il détrôné les
États-Unis ? Washington ne vend, en effet, qu'entre 2,5 et 3 milliards
de dollars de matériel militaire à Israël. "C’est vrai que le chiffre
avancé par Londres est étonnant, mais il ne faut pas oublier qu’il ne
s’agit pas de matériel livré mais d’autorisation d’exportation
[c’est-à-dire la valeur des licences pour d’éventuels exportations,
NDLR], qu’on ne connaît pas leur durée de validité et qu’on ne sait pas
non plus si ce montant englobe les licences accordées à des filiales
d’entreprises israéliennes implantées au Royaume-Uni”, explique Pieter
Wezeman, chercheur sénior, spécialiste des ventes d’armes au Stockholm
International Peace Institute (SIPRI). Pour lui, les véritables
exportations d'armes britanniques vers Israël sont bien moins
importantes.
La France petit joueur, l’Allemagne dans la cour des grands
L’Espagne et le Royaume-Uni ne sont pas les seuls pays européens qui
fournissent du matériel militaire à Israël. La France, par exemple, a
accordé en 2012 des autorisations d’exportations d’une valeur de plus de 200 millions d’euros.
Elles concernent, essentiellement, des roquettes, missiles, aéronefs et
du matériel électronique (guidage, brouillage de radar etc.). Mais
comme Madrid, Paris n’est qu’un petit joueur.
Outre les États-Unis, le seul autre pays à avoir un poids
relativement important dans ce commerce avec Israël est l’Allemagne.
Berlin “vend des sous-marins et les moteurs pour les tanks israéliens”,
explique Pieter Wezeman. Le circuit des exportations de moteurs est
cependant cocasse. Ils sont produits en Allemagne puis envoyés “aux
États-Unis où ils sont assemblés afin de pouvoir être considérés comme
des produits d’exportations américains qu’Israël peut payer avec
l’argent avancé chaque année par Washington à Tel Aviv pour s’équiper”,
précise cet expert du SIPRI.
Et puis au fil du temps, Israël a développé un complexe
militaro-industriel très performant, lui permettant d'être indépendant
dans bien des secteurs. “Israël est très fort pour tout ce qui concerne
les équipements radars, le matériel pour le renseignement et les puces
électroniques”, précise Pieter Wezeman. Le pays est aussi à la pointe de
la conception de drones, même si Tel Aviv achète certains composants,
comme les moteurs, à l’étranger, notamment au Canada. Le grand point
faible d’Israël concerne les avions de chasse, de transport et les
navires. “C’est trop lourd et coûteux à construire pour un petit pays”,
explique Pieter Wezeman. D’où l’intérêt de Tel Aviv pour les sous-marins
allemands, par exemple.
Réduire les importations plutôt que les exportations
Pour l’instant, Israël peut continuer à mener son opération contre le
Hamas à Gaza sans craindre d’être à court de munitions… ou autres
matériels militaires. “Les États-Unis et l’Allemagne n’ont montré aucun
signe d’une volonté de réduire leurs exportations d’armement vers
Israël”, souligne Pieter Wezeman. Pour ce spécialiste, tous les autres
pays peuvent bien décider d’arrêter de livrer du matériel à l’État
hébreu, “ça ne changera rien à la situation”.
Mais si réduire les exportations ne changera pas grand chose, baisser
les importations de matériels militaires conçus en Israël pourrait être
plus efficace pour les pays européens voulant protester contre la
violence à Gaza, d'après Pieter Wezeman. Le commerce d’armes rapporte,
en effet, environ sept milliards d’euros à Tel Aviv tous les ans et
environ 10 % de ces exportations sont destinés à des pays européens.