mardi 4 octobre 2011

Des juristes palestiniens affirment le rôle essentiel de l’OLP à l’ONU

mardi 4 octobre 2011 - 07h:17
Maan News
Alors que le Conseil de Sécurité examine la candidature de la Palestine pour une pleine adhésion à l’ONU, des avocats et juristes ont signé une déclaration commune exprimant leur inquiétude à propos des implications de la demande sur les droits des Palestiniens.
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Aujourd’hui encore, le défunt dirigeant palestinien Yasser Arafat continue de personnifier l’OLP. Ses épigones vont-ils réussir à liquider l’organisation qu’il avait su créer ? - Photo : AFP (Jordanie, année 1970)
Les initiatives de la direction palestinienne à l’ONU ont de profondes conséquences légales sur tous les secteurs du peuple palestinien en Palestine historique et dans le Shatat (Exil). Ces implications sont importantes à plusieurs niveaux, en particulier sur les questions constitutionnelles et de représentation, et sur leurs liens avec les aspects internationaux de la reconnaissance de la souveraineté.
Guidés par notre engagement pour la cause palestinienne, pour les droits inaliénables du peuple palestinien ainsi que pour les droits humains en général, notre responsabilité nationale et professionnelle en tant d’avocats ou juristes, et finalement par notre souci de préserver et de faire avancer les réalisations historiques palestiniennes dans la sphère du droit international, nous, soussignés, affirmons ce qui suit :
1. Les Palestiniens sont un seul peuple en Palestine historique et dans le Shatat (Exil). Le peuple palestinien à des droits inaliénables, dont les plus importants sont le droit au retour des réfugiés palestiniens dans leurs foyers et sur les terres d’où ils ont été expulsés de force ; le droit à l’autodétermination ; en plus du droit à l’indépendance nationale et à la souveraineté. En tant que tel, le peuple palestinien constitue un corps unique. Ses droits sont indivisibles et appartiennent au corps politique dans son ensemble. L’Assemblée générale des Nations unies a souligné, dans de nombreuses résolutions, que « le peuple palestinien est la principale partie intéressée à la question de Palestine... », dont les résolutions 3210 (XXIX) du 14 octobre 1974, 3236 (XXIX) du 22 novembre 1974 et 3375 (XXX) du 10 novembre 1975. Dans toutes ces résolutions, l’ONU ne fait pas de distinction parmi les Palestiniens suivant leur lieu de résidence. En conséquence, le peuple palestinien dans son ensemble possède le droit au retour et le droit à l’autodétermination.
2. Le peuple palestinien dans son ensemble est représenté par l’OLP, tant dans que hors de l’ONU. L’ONU et la ligue Arabe reconnaissent l’OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien. En accord avec la résolution de 3237 de l’Assemblée générale de 1974, l’OLP s’est vu accorder un statut d’observateur à l’ONU. En 1998, en accord avec la résolution 52/250 de l’Assemblée générale, la Palestine a gagné des « droits et privilèges supplémentaires pour ce qui est de participer aux sessions et aux travaux de l’Assemblée générale et des conférences internationales convoquées sous les auspices de l’Assemblée ou d’autres organes de l’ONU, ainsi qu’aux conférences des Nations Unies ».
3. Dans sa résolution 43/177 l’Assemblée générale a reconnu « la proclamation de l’État de Palestine par le Conseil national palestinien du 15 novembre 1988 » et a décidé que « prenant effet le 15 décembre 1988, la désignation ‘Palestine’ devrait être utilisée à la place de la désignation ‘Organisation de libération de la Palestine’ dans le système des Nations unies, sans préjudice du statut et des fonctions d’observateur de l’Organisation de libération de la Palestine au sein du système des Nations unies... ». Significativement, ceci assurait que le statut de l’OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien était préservé et réaffirmé par l’ONU.
4. Dans la « Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la Charte des Nations Unies », il est déclaré que : « En vertu du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, principe consacré dans la Charte des Nations Unies, tous les peuples ont le droit de déterminer leur statut politique, en toute liberté et sans ingérence extérieure, et de poursuivre leur développement économique, social et culturel... ». Ce droit à l’autodétermination est la base de la revendication de l’OLP d’être le seul représentant légitime du peuple palestinien. Et quoiqu’elle n’exerce pas actuellement la souveraineté sous la forme d’une autorité suprême et indépendante sur la terre de Palestine, l’OLP tient sa légitimité de son peuple dans la Palestine historique et en exil. Par conséquent son mandat n’est pas territorialement restreint.
Comme le professeur Guy Goodwin-Gill, qui fait autorité en droit international, l’a noté, « le mandat de l’OLP couvre par conséquent la totalité des questions découlant du déplacement continu des Palestiniens et de la lutte pour l’autodétermination - ceci inclut, entre autres, les questions du retour et des compensations soulignées dans la résolution 194 de l’Assemblée générale (III) et la question des frontières nationales, qui sont implicites dans la résolution 242 du Conseil de sécurité. Ces questions, par nécessité, concernent tout le peuple palestinien, indépendamment de son lieu de résidence actuel ».
5. Nous nous inquiétons de ce que toute initiative potentielle altérant le statut de l’OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien à l’ONU peut avoir des conséquences négatives sur la position légale du peuple palestinien, en particulier sur la représentation de ses droits indivisibles et collectifs. Nous allons dans le sens de l’opinion du professeur Guy Goodwin-Gill, qui déclare qu’une telle initiative comporte « le risque d’une fragmentation - où l’État représente le peuple dans l’ONU et où l’OLP représente le peuple hors de l’ONU. Une telle division de représentation irait à l’encontre du statut quo et de l’intention originelle de la communauté internationale de reconnaître l’OLP. Le défi est de maintenir l’unité dans ces circonstances uniques ». En particulier nous nous inquiétons qu’une telle fragmentation affecterait la représentation internationale des réfugiés palestiniens, qui constituent plus de la moitié du peuple palestinien.
6. Les droits inaliénables des Palestiniens, en particulier au retour et à l’autodétermination sont inscrits profondément dans le droit international, indépendamment de la nature de la représentation palestinienne à l’ONU. En plus d’être un droit collectif, le droit au retour est un droit individuel qui ne peut être ni aliéné ni abandonné. Mais sans l’OLP comme leur seul représentant légitime à l’ONU, les réfugiés palestiniens en particulier, comme partie d’un tout, perdront effectivement la possibilité de revendiquer leurs droits. Un droit peut exister dans la loi mais il ne veut rien dire aux gens s’il ne peut pas être revendiqué. Si le statut de l’OLP est retiré de son siège à l’ONU, ceci minera et affaiblira la lutte pour le droit au retour et pour l’autodétermination, plutôt qu’il ne le renforcera.
7. De plus, la substitution de la représentation de l’OLP à l’ONU pourrait signifier effectivement que les réfugiés palestiniens n’auraient pas de lien direct avec leurs représentants à l’ONU. Aucun organisme politique autre que l’OLP n’aura les compétences nécessaires ou le mandat pour les représenter.
8. Nous sommes aussi d’accord avec le professeur Goodwin-Gill que « jusqu’au moment d’un accord final, l’État de Palestine putatif n’aura pas de territoire sur lequel exercer une souveraineté effective, ses frontières seront indéterminées ou disputées, sa population, réelle et potentielle, indéterminée, beaucoup d’entre elle continuant à vivre sous occupation ou à l’état de réfugiés. Alors qu’il pourrait être un État observateur aux Nations unies, il n’atteindra pas les critères de souveraineté internationalement reconnus, avec de sérieuses implications pour les Palestiniens en général, particulièrement pour ce qui concerne la représentation populaire de ceux qui ne sont pas actuellement présents dans les territoires palestiniens occupés ».
9. Dans la sphère palestinienne, il y a des peurs légitimes que l’initiative actuelle conduirait à un changement (intentionnel ou non) au statut de l’OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien à l’ONU. À côté de ses implications légales négatives, un tel changement engendrerait plusieurs problèmes constitutionnels. D’après l’article 7(a) de la loi fondamentale de l’OLP : « le Conseil national palestinien est la plus haute autorité de l’Organisation de libération de la Palestine, et c’est l’organisme qui dessine la politique de l’OLP, ses plans et programmes ». De plus, l’article 5 de la loi fondamentale déclare que le CNP doit être directement élu par le peuple palestinien. Le système électoral, proclamé le 17 juillet 1965, déclare que « chaque Palestinien a le droit de vote aux élections du CNP s’il/elle a 18 ans, si son nom a été enregistré dans les registres électoraux mis à jour, s’il/elle est mentalement sain, et s’il/elle n’a pas été condamné pour crimes contre l’honneur national ».
10. Considérant que des élections directes pour le CNP doivent toujours avoir lieu, le mandat populaire large requis pour une telle restructuration majeure de la gouvernance et du statut représentatif de l’OLP ne peut pas être assuré actuellement. Constitutionnellement, et en accord avec la loi fondamentale de l’OLP, entreprendre une altération aussi radicale du statut et du rôle de l’organisation acquis depuis longtemps, réalisé et consolidé du fait de plusieurs décennies de lutte et de sacrifice national, va au-delà du mandat du Comité exécutif ou du Conseil central de l’OLP.
11. Notre opinion est que, constitutionnellement, le statut de l’OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien à l’ONU ne peut pas être légalement altéré ou remplacé par un autre organisme, l’État de Palestine, sans un large consensus populaire réalisé par une délibération large, reflétant par la convocation d’un nouveau Conseil national palestinien directement élu par le peuple palestinien quel que soit son lieu de résidence. La reconnaissance internationale devrait être recherchée pour soutenir ceci, et en conséquence la volonté populaire du peuple.
12. Sur la base de ces préoccupations et de ces doutes, nous demandons ce qui suit :
a. Que toutes les initiatives diplomatiques, y compris l’initiative de septembre à l’ONU, devrait préserver le statut de l’OLP comme seul représentant légitime à l’ONU, et protéger et consolider les droits inaliénables du peuple palestinien, avant tout le droit au retour sur les terres d’ou les réfugiés ont été chassés en 1948 ;
b. Que le Comité exécutif de l’OLP fournisse des assurances à cet effet ;
c. La demande d’élections immédiates et directes pour le Conseil national palestinien, afin que tous les Palestiniens - indépendamment de leur lieu de résidence - puissent voter. Ceci constituera la base démocratique pour mettre en place le programme politique national, et activera les institutions représentatives de l’OLP pour préserver, consolider et renforcer la représentation légale effective du peuple palestinien dans son ensemble.
Signataires :
-  Dr Anis Fawzi al-Qasem, Conseiller légal de la délégation palestinienne aux négociations de Madrid et de Washington
-  Dr. Anis Mustafa al-Qasem, Conseiller légal du Conseil National Palestinien, Secrétaire général de l’Organisation internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
-  Basheer al-Khairi, ancien membre du comité exécutif de l’OLP 
-  Ribhi Qatamesh, secrétaire de l’Association du barreau palestinien
-  Professor George Bisharat, professeur de droit, Collège Hastings de droit, Université de Californie
-  Mary Nazzal-Bataineh, présidente du conseil d’administration du Palestine Legal Aid Fund
-  Professor Mohammad Yousef Olwan, professeur de droit, Amman, Jordanie
-  Reem al-Botmeh, Editrice adjointe, Palestine Yearbook of International Law
-  Professor Mohammad Khalil al-Mousa, professeur adjoint de droit international, université de Bahrain University 
-  Professor Samera Esmeir, université de Californie, Berkeley
-  Professor Nadera Shalhoub-Kevorkian, faculté de droit, université hébraïque, Jerusalem
-  Dr. Lena al-Malak, consultante juridique
-  Nimer Sultany, école de droit, université de Harvard
-  Noura Eriekat, professeur adjoint remplaçante, Georgetown University 
-  Jamil Dakwar, Esq. (USA) 
-  Leen al-Khayat, avocate
-  Hania Sabaawi, avocate
-  Marwan Dalal, avocat
-  Mazen al-Masri, école de droit Osgoode Hall, York University
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