lundi 10 janvier 2011

Israël continue à coloniser et «ruine» les négos

09 janvier 2011
Hossam Ezzedine
Agence France-Presse
Ramallah
La démolition dimanche par Israël d'un ancien hôtel au coeur de Jérusalem-Est annexée, un bâtiment chargé de symbole pour les Palestiniens, sonne le glas des tentatives de reprise des négociations de paix, a estimé l'Autorité palestinienne.
«En opérant de la sorte, Israël a ruiné tous les efforts américains et mis fin à toute chance d'un retour aux négociations», a estimé Nabil Abou Roudeina, le porte-parole du président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, en exhortant Washington à intervenir contre de telles actions.
De son côté, le mouvement islamiste Hamas a dénoncé «une tentative de judaïser la ville et d'isoler la Vieille ville (de Jérusalem) des quartiers arabes voisins».
La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a dénoncé une «évolution préoccupante (qui) compromet les efforts de paix visant à établir deux Etats pour parvenir à une solution». «En fin de compte, l'absence d'une solution dans ce conflit nuit à Israël, nuit aux Palestiniens, nuit aux Etats-Unis ainsi qu'à la communauté internationale» a déploré Mme Clinton.
La démolition de l'ancien hôtel Shepherd, dans le quartier palestinien de Cheikh Jarrah, a été condamnée «fermement» par l'UE ainsi que par l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI).
«Je rappelle que les colonies sont illégales au regard du droit international», a affirmé le chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton dans un communiqué, en soulignant que «Jérusalem-Est fait partie des territoires palestiniens occupés» et que «l'UE ne reconnaît pas son annexion».
Israël a proclamé l'ensemble de la Ville sainte sa capitale «éternelle et indivisible», alors que les Palestiniens veulent établir dans la partie orientale la capitale de l'Etat auquel ils aspirent.
Les autorités israéliennes ont commencé à détruire dimanche matin toute une aile de l'ancien hôtel Shepherd, situé dans la partie orientale de Jérusalem annexée après son occupation en 1967, pour construire sur le site des logements destinés à des colons juifs.
Trois bulldozers ont démoli le bâtiment sous la protection de la police.
Ce projet, approuvé en mars 2010 par la municipalité, est chapeauté par l'homme d'affaires juif américain Irving Moskowitz, qui finance des organisations ultra-nationalistes encourageant la colonisation juive de la partie orientale de Jérusalem.
L'indignation des Palestiniens est d'autant plus vive que cette opération, qui s'inscrit pour ses promoteurs dans une stratégie de «judaïsation» de Jérusalem-Est, touche un bâtiment chargé d'histoire.
Il a appartenu en effet à la famille de l'ancien Grand mufti de Jérusalem Amine al Husseini et a servi de résidence à cette figure de proue de la Grande Révolte palestinienne de 1936 à 1939 contre les Britanniques et les sionistes, jusqu'à sa compromission durant la Seconde Guerre mondiale avec les nazis.
L'hôtel confisqué par les Britanniques après 1945, jusqu'à la fin de leur mandat en Palestine en 1948, a été saisi en 1967 par l'Etat d'Israël et revendu à l'homme d'affaires Moskowitz.
«L'Etat d'Israël démolit les propriétés palestiniennes les unes après les autres afin de nettoyer Jérusalem de son histoire, de son patrimoine et de ses habitants palestiniens», a protesté le négociateur en chef palestinien Saëb Erakat.
«Tandis que Netanyahu poursuit sa campagne de relations publiques sur le processus de paix, sur le terrain il agit rapidement pour empêcher l'établissement d'un Etat souverain palestinien», a accusé M. Erakat.
Les négociations de paix, brièvement relancées en septembre à Washington après une suspension de 20 mois, sont à nouveau suspendues, les Palestiniens exigeant la prolongation d'un moratoire de la colonisation juive, à laquelle le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est refusé.
Compte tenu de cette impasse et d'une totale absence de perspective d'accord, même en cas de reprise des négociations, une résolution palestinienne condamnant la colonisation israélienne pourrait être mise au vote au Conseil de sécurité de l'ONU dès la semaine prochaine.