mercredi 26 mai 2010

Le casse-tête de Hezbollah

Syrie-Liban-Israël. Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, s’est rendu cette semaine à Damas et Beyrouth dans une mission dont l’objectif est d’apaiser les tensions et de faire pression sur les Syriens pour qu’ils ne soutiennent pas le Hezbollah.
« Personne ne parle plus de tension, ou alors cette tension est retombée ». Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, fait preuve d’optimisme. C’est en tout cas ce qu’il a déclaré à Beyrouth suite à ses entretiens avec le président libanais Michel Sleimane, le premier ministre Saad Hariri, et auparavant à Damas, avec le président syrien Bachar Al-Assad. Bernard Kouchner s’est dit « plutôt rassuré » après sa tournée. « Le ministre Kouchner a informé le président que sa tournée régionale vise à apaiser les tensions récentes, qui ont commencé à décliner ces derniers jours, notamment en ce qui concerne les menaces israéliennes », a déclaré le bureau de M. Sleimane après la rencontre entre les deux hommes.
M. Kouchner était venu jouer la carte des relations de la France avec Damas et Beyrouth, pour tenter de faire baisser la tension alors que des rumeurs faisaient état d’un éventuel prochain confrontement entre le Hezbollah et Israël.
La tension est davantage montée il y a quelque temps, lorsque des responsables israéliens ont accusé Damas de livrer des missiles à moyenne portée et même des missiles Scud au mouvement chiite libanais. Une information démentie par la Syrie à maintes reprises. Dans une conférence de presse conjointe avec M. Kouchner, Bachar Al-Assad a déclaré à l’adresse des journalistes libanais « qu’il n’y avait pas matière à s’inquiéter, qu’il n’y avait pas de Scud sur votre territoire ». Quant au ministre français, il a de nouveau appelé au respect de la résolution 1701, qui avait mis fin à la guerre dans le Sud-Liban et qui prévoit un embargo sur les armes à destination du Liban.
Or, malgré cet apaisement dont à longuement parlé le ministre français, les tensions restent vives. Alors que la France tente d’obtenir de la Syrie qu’elle limite son soutien au Hezbollah, Damas insiste de son côté sur « les violations israéliennes », jugeant inacceptable la politique occidentale qui « garde le silence » sur cette question. M. Assad a aussi fait valoir au ministre français que la tension actuelle était provoquée, selon lui, par Israël qui procède à des manœuvres militaires et effectue des survols du Liban, a indiqué une source diplomatique française. Le président syrien lui a affirmé, selon la même source, que Damas ne déclencherait jamais la guerre et le Hezbollah non plus, et estimé que ce n’était pas non plus l’intérêt de l’Iran (qui soutient le Hezbollah) de déclencher un conflit.
Aussi, la Syrie a répondu dimanche aux puissances occidentales qui l’invitent à ne pas soutenir le Hezbollah qu’elle refusait d’être « le gendarme d’Israël » en empêchant le mouvement chiite libanais de se procurer des armes. « Israël a-t-il jamais cessé de s’armer ? A-t-il cessé d’inciter  la violence ou de se livrer des manœuvres militaires ? Pourquoi les armes sont-elles interdites pour les Arabes et autorisées pour Israël ? », a demandé le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Moallem, à l’issue d’une rencontre avec son homologue allemand, Guido Westerwelle. « Israël bat le tambour de la guerre. En l’absence de paix véritable, tout est possible », a-t-il ajouté.
La Syrie, pays jugé critique par Washington pour la paix au Proche-Orient, n’a donc montré aucun signe de retrait de son appui au Hezbollah qui est aussi soutenu par l’Iran, bien que cette question ait compromis un rapprochement entre Damas et Washington. En effet, les armes du Hezbollah ont figuré en bonne place ces derniers mois des contacts diplomatiques des Occidentaux avec la Syrie. Le sénateur américain John Kerry, qui a évoqué la question le mois dernier avec le président Bachar Al-Assad, l’a rencontré de nouveau samedi à Damas. La question est aussi au centre des discussions entre le président américain, Barack Obama, et le premier ministre libanais, Saad Al-Hariri, lors de la première visite de M. Hariri aux Etats-Unis entamée lundi. Une visite qui intervient alors que le gouvernement libanais continue à exprimer ses craintes d’une possible attaque de la part d’Israël et que l’Etat hébreu entame une série de manœuvres militaires qui n’augurent de rien de bon.
Abir Taleb