dimanche 23 mai 2010

Dix ans plus tard, Israël n'a toujours pas réglé ses comptes avec le Liban

23/05/2010
En Israël, on continue de penser que la décision du retrait était 
la bonne en dépit du conflit de 2006, mais la manière dont le retrait a 
été mené a affecté l'image de supériorité militaire d'Israël./
En Israël, on continue de penser que la décision du retrait était la bonne en dépit du conflit de 2006, mais la manière dont le retrait a été mené a affecté l'image de supériorité militaire d'Israël./ AFP
Dix ans après le retrait de ses troupes du Liban, une décision unilatérale qui a coûté cher à son image en termes de supériorité militaire, Israël n'a toujours pas réglé ses comptes avec le Hezbollah, indique Hazel Ward dans une dépêche AFP datée de Jérusalem. Depuis le 24 mai 2000, date à laquelle l'armée israélienne a quitté le sud du Liban après 22 ans d'occupation, une guerre dévastatrice a d'ailleurs opposé Israël et le Hezbollah libanais, qui dispose d'un important arsenal militaire, pendant l'été 2006.
Et la tension à la frontière reste élevée: Israël a récemment accusé le Hezbollah d'accumuler les armes, y compris des missiles Scud, en vue d'un nouveau conflit.
Le retrait du Liban était censé mettre fin à ce que beaucoup dans l'État hébreu considéraient comme le Vietnam d'Israël, les Israéliens espérant que le "Parti de Dieu" se tournerait alors vers les affaires politiques libanaises.
En Israël, on continue de penser que cette décision était la bonne en dépit du conflit de 2006, mais la manière dont le retrait a été mené a affecté l'image de supériorité militaire d'Israël.
"L'image que le retrait a donnée, celle d'Israël forcé de se retirer sous la pression, a eu des conséquences presque immédiates. Quel qu'ait été le pouvoir de dissuasion d'Israël à l'époque, il a été perdu et a dû être rétabli à un coût considérable", a écrit l'ex-ministre israélien de la Défense Moshe Arens dans le quotidien Haaretz cette semaine.
La victoire morale du Hezbollah "contraignant" la machine militaire israélienne à partir a préparé le terrain à la seconde Intifada (soulèvement) palestinienne quelques mois plus tard.
Le retrait a "conduit à une dégradation considérable du pouvoir de dissuasion d'Israël et contribué aux événements qui ont eu lieu depuis, l'Intifada et la guerre de 2006", affirme Jonathan Spyer, chercheur au Centre pour la recherche globale en questions internationales à Herzliya. "Israël a payé cher", estime-t-il.
Pendant plusieurs années, une illusion de calme a régné le long de la frontière israélo-libanaise jusqu'à l'enlèvement en juillet 2006 de deux soldats israéliens par le Hezbollah, qui a déclenché la guerre.
Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah "a admis que s'il avait imaginé l'ampleur de la réponse israélienne, il ne se serait pas impliqué, ce qui signifie que nous n'avions pas de pouvoir de dissuasion", analyse M. Spyer.
Le processus s'est répété avec la bande de Gaza, dont Israël s'est retiré en 2005 avant de faire l'objet de tirs de roquette presque quotidiens de la part des groupes armés palestiniens. L'État hébreu a lancé alors une brève mais violente opération punitive contre l'enclave palestinienne pour, principalement, rétablir son pouvoir de dissuasion.
Selon l'État hébreu, le Hezbollah possède aujourd'hui plus de 40 000 roquettes dont certaines d'une portée supérieure à 300 km, capables donc d'atteindre les grandes villes d'Israël.
Mais les experts israéliens ne sont toutefois pas convaincus que cela soit synonyme de guerre prochaine.
"En ce moment, nous avons un pouvoir de dissuasion réciproque stable à la frontière septentrionale. Le Hezbollah est dissuadé par Israël mais Israël est aussi dissuadé par le Hezbollah", souligne Shlomo Brom, chercheur associé à l'Institut des études sur la sécurité nationale. "Tout le monde comprend que le prochain round de violence sera bien pire. Personne n'en a envie", relève-t-il.
Oussama Safa, qui dirige le Centre libanais pour les études politiques, juge que la guerre de 2006 a établi un nouvel "équilibre de la terreur" dans la région. "Aujourd'hui, la nouvelle équation est: on peut tous se lancer dans une nouvelle guerre mais ce sera très difficile d'y mettre fin", explique-t-il.