samedi 26 juin 2010

Mavi Marmara, et après

vendredi 25 juin 2010 - 16h:23
Amira Howeidy - Al Ahram
Le siège de Gaza est plus insupportable et plus difficile à gérer que Tel Aviv ne l’avait prévu, après le meurtre d’internationaux, militants de la paix, qui essayaient de mettre un terme aux 3 ans de blocus de la bande de Gaza.
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Des enfants palestiniens organisent une cérémonie, dans le port de Gaza, en hommage aux personnes assassinées dans le raid israélien contre la flottille humanitaire - Photo : AFP
En tuant un nombre indéterminé de militants internationaux dans les eaux internationales, Tel Aviv a provoqué de graves tensions diplomatiques sur de nombreux fronts. Tel Aviv est maintenant pris dans des confrontations à la fois politiques et diplomatiques avec 37 pays.
663 militants internationaux originaires de ces pays se trouvaient à bord de la flottille de 6 navires qui faisait route en Méditerranée, et se dirigeait vers Gaza en apportant du matériel humanitaire, quand elle a été attaquée par les commandos d’élite israéliens aux premières heures du 31 Mai.
A l’heure de la mise sous presse d’Al-Ahram Weekly mercredi, Israël n’avait toujours pas communiqué le nombre de militants tués sur le plus gros navire de la flottille, le navire turc Mavi Marmara. Les rapports des témoins suggèrent que ce nombre pourrait aller jusqu’à 19. Il semble que la majorité des morts soient citoyens Turcs. La flottille à destination de Gaza transportait 10.000 tonnes de matériel médical et de nourriture.
Par cette attaque, qui a eu lieu à 65km de Gaza, dans les eaux internationales , Israël viole un certain nombre de lois internationales. D’après Ali El Ghateet, professeur égyptien de droit international , en attaquant un navire en haute mer Israël a commis un crime international. En tant que puissance occupante Israël viole aussi les lois humanitaires internationales qui prévoient que l’occupant est responsable du transport et de la délivrance de l’aide humanitaire et du ravitaillement au peuple occupé.
Les commandos israéliens - ainsi que leurs supérieurs dans la chaîne de commandement - qui ont envahi le navire, blessé et tué ses passagers, en ont enlevé d’autres et obligé la flottille à se rendre dans le port d’ Ashdod, relèvent officiellement de la juridiction turque : en effet la scène du crime - le Mavi Marmara - en tant que navire turc, est partie intégrante du territoire turc. Craig Murray, ancien ambassadeur et chercheur à la faculté de droit de Lancaster interprète l’attaque comme un « acte de guerre illégal. »
« Israël se positionne comme étant en guerre avec la Turquie et cet acte est pour la juridiction internationale, un crime de guerre » analyse Murray sur son site mardi.
Ce que seront les prochaines actions, légales, politiques ou diplomatiques que prendra la Turquie, au-delà du rappel de son ambassadeur, ne sont pas claires. Le premier ministre turc a qualifié l’attaque de « crime odieux » Le ministre des affaires étrangères est allé plus loin. Mardi, à New York, il a appelé la communauté internationale à « mettre un terme » aux violations de la loi et de la légitimité internationales commises par Israël.
Au moment où le Weekly était mis sous presse, le Comité national de sécurité turc allait se réunir, sur fond d’indignation populaire et d’énormes manifestations anti-israéliennes.
Mercredi les juristes turcs ont appelé le gouvernement à revoir ses liens politiques, militaires et économiques avec Israël. Dans une déclaration approuvée à main levée, ils ont aussi réclamé qu’Israël fasse des excuses officielles pour l’attaque, indemnise les victimes et traduise en justice les responsables de l’attaque.
La Turquie, membre de l’OTAN , et jusque récemment , l’un des meilleurs alliés d’Israël dans la région, est devenue de plus en plus critique à l’égard de son allié. L’attitude d’Ankara envers Israël à la suit e du massacre va certainement avoir un impact sur toute la région, avec déjà des répercussions imprévues. Dès Mardi le parlement koweiti a poussé le gouvernement à se retirer de l’initiative de paix Arabe de 2002, à laquelle Israël n’a toujours pas répondu. Le jour suivant , en réponse à l’attaque, le Nicaragua a suspendu ses relations diplomatiques avec Tel Aviv.
Le massacre a attiré l’attention internationale sur la situation misérable de la Bande de Gaza, sous blocus israélien depuis Juin 2007. La guerre menée pendant 22 jours sur ce territoire en Décembre 2008, qui a causé la mort de 1400 palestiniens, en a estropié et blessé des milliers d’autres et détruit la plus grande partie des infrastructures de Gaza, a encore aggravé les terribles conditions de vie d’un million et demi des palestiniens. L’attention s’est aussi portée sur le poste frontière de Rafah, situé sur les 14 kms de frontière commune à l’Egypte et à Gaza, et qui est le seul passage non contrôlé par Israël, qui relie Gaza au reste du monde. Ces 3 derniers jours il y a eu en Egypte des manifestations pour exiger que le gouvernement ouvre la frontière et « mette fin au siège. »
Le Caire a subi des pressions arabes et internationales pour qu’il allège le siège en ouvrant la frontière.La réponse officielle de l’Egypte est qu’il existe un accord de 2005 entre Israël et l’Autorité Palestinienne pour gérer la frontière et que cet accord lui lie les mains depuis la prise de contrôle du Hamas en 2007. Les critiques font remarquer que cet accord est caduc depuis 2006, et que l’Egypte , état souverain, a le droit de gérer sa frontière avec Gaza comme elle l’entend.
Mardi, le président Mubarak a pris une décision surprenante en ouvrant la frontière pour « l’aide humanitaire » et....jusqu’à nouvel ordre. Les observateurs et les militants égyptiens ont accueilli cette décision avec un enthousiasme mitigé, tout particulièrement à cause de sa formulation imprécise.
Un convoi de matériel médical et de produits alimentaires est parti du Syndicat pharmaceutique d’ Alexandrie vers Rafah, à l’aube de mercredi, pour tester la décision.Ces derniers mois le syndicat a apporté du matériel médical à Gaza sans problème. Cette fois il a rajouté des produits alimentaires.
Ayman Abdallah, médecin qui accompagne le convoi a confié au Weekly que ses organisateurs ne sont pas certains que les autorités laisseront passer les produits alimentaires par Rafah. Le convoi a été arrêté plusieurs heures par les forces de sécurité, d’abord à Ismailia, puis dans le nord du Sinaï. Au moment où le Weekly était imprimé , Mercredi , le convoi avait été stoppé une troisième fois, à Beer Abad ,à 80kms d’ Arish, où il était censé passer la nuit avant de repartir pour Rafah aujourd’hui.
On ne sait pas quel impact aura la décision de Mubarak sur le siège de Gaza. Un grand nombre de journalistes locaux et internationaux sont partis vers Rafah mercredi pour voir comment la décision d’ « ouvrir la frontière » était mise en œuvre.
Le gouverneur du nord du Sinaï, Le général Murad Muwafi, annonce que 300 palestiniens sont allés en Egypte mercredi, par suite de la décision présidentielle. Treize générateurs électriques ont aussi pu entrer à Gaza.
S’adressant au Weekly par téléphone, Muwafi a précisé qu’avant cette dernière décision la frontière était ouverte, toutes les semaines, le mercredi et le jeudi pour les malades dans un état critique et une fois par mois pour ce qui n’était pas urgent. Elle sera maintenant ouverte pour tout tous les jours. Il a ajouté que si les personnes et le matériel médical seraient autorisés à entrer quotidiennement vers Gaza, les produits alimentaires seraient toujours contrôlés par les israéliens à la frontière d’Ouja qui est sous leur autorité.
http://weekly.ahram.org.eg/2010/100...
Traduction de l’anglais : Jackie Hugret
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