mardi 8 septembre 2009

Pour les Etats-Unis, un gel de la colonisation juive en Palestine n’est plus un préalable

lundi 7 septembre 2009 - 07h:23

Ramzy Baroud


Les Etats-Unis ont décidé d’être « flexibles » sur la question d’un gel total par Israël de l’expansion de ses colonies juives - complètement illégales au regard du droit international - dans les territoires palestiniens occupés.

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La colonisation de la terre palestinienne n’a jamais cessée, avec une complicité internationale qui n’a jamais faibli ! - Photo : AP/Sebastian Scheiner

Un haut fonctionnaire s’est exprimé, mais sous couvert d’anonymat, devant des journalistes le 27 août. « Il était plus important que l’étendue d’un gel des colonies soit acceptable aux Israéliens et aux Palestiniens plutôt qu’aux Etats-Unis, » a rapporté l’agence Reuters, citant le haut fonctionnaire. Ceci signifie que les négociations de paix peuvent reprendre tandis que les tanks israéliens lacèrent la terre palestinienne, démolissent des maisons et déracinent des arbres.

Cela signifie également que le rejet israélien de la seule et unique demande venant des Etats-Unis et qui a jusqu’ici défini le rapport du président Barack Obama au conflit du Moyen-Orient, a prévalu sur la fermeté américaine supposée. En d’autres termes, les Etats-Unis ont officiellement cédé aux pressions israéliennes et pro-israéliennes, à Tel Aviv et à Washington.

Ceux qui ne sont pas familiarisés avec une certaine terminologie dans ce conflit peuvent ne pas réaliser que cela signifie en réalité que les Etats-Unis n’exigeront plus un gel de la part des Israéliens de la « croissance naturelle » de ses colonies, particulièrement dans la zone occupée de Jérusalem où des dizaines de milliers de Palestiniens sont exposés au nettoyage ethnique israélien.

Des familles comme les familles Hanoun et Ghawi ont été expulsées de leurs maisons et jetées à la rue avant le lever de soleil. « La police est venue pour eux à l’aube, un dimanche, fortement armée, portant des casques et des boucliers anti-émeute pendant qu’ils forçaient les portes en métal des maisons et traînaient les deux familles palestiniennes à l’extérieur à la rue, » a rapporté le « Guardian » le 24 août.

Ces événements, à briser le cœur, de personnes innocentes jetées à la rue sans avoir commis la moindre faute et seulement pour faire de la place à encore plus d’habitants juifs, ont eu lieu devant des caméras de télévision et n’ont guère mérité plus que quelques mots de timide réprobation. C’était en fait un message politique, envoyé par le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu au gouvernement des États-Unis et à n’importe qui oserait remettre en cause la politique coloniale israélienne.

Cela s’est produit alors que l’appel d’Obama pour un gel des colonies était le plus fort. Imaginez à présent comment Israël se comportera, maintenant que l’unique demande des Etats-Unis est officiellement abandonnée. Le gouvernement israélien d’extrême-droite accélérera probablement son programme d’extension coloniale pour saboter toute future demande de gel. Beaucoup plus de familles Hanoun et Ghawi, avec leurs enfants, se retrouveront à la rue simplement pour le fait de ne pas être juifs, même s’ils sont les légitimes propriétaires de leur terre.

La logique israélienne est cependant d’une extrême limpidité. Deux semaines avant que les expulsions aient eu lieu, Netanyahu a pris la parole devant son cabinet ministériel, disant que Jérusalem (Jérusalem-est occupé y compris) est « la capitale du peuple juif et de l’état d’Israël » et que « notre souveraineté ne peut pas y être contestée. » Il a poursuivi, « nous ne pouvons pas accepter l’idée que les juifs n’aient pas le droit de vivre et d’acheter dans toutes les parties de Jérusalem. »

Malgré son communiqué exceptionnellement ferme selon lequel les expulsions étaient « profondément regrettables », la secrétaire d’état des Etats-Unis, Hillary Clinton n’a eu le pas de réponse pour les familles de jérusalemites demandant un recours en faveur de leurs maisons volées. C’est justement cela, une plus grande flexibilité américaine.

Tandis que les Palestiniens, et ceux qui les soutiennent et sympathisent avec leur lutte légitime, sont accoutumés aux violations provocatrices d’Israël à l’égard de la loi internationale et humanitaire, et à l’appui direct et indirect des Etats-Unis en faveur d’Israël, beaucoup avaient la témérité d’espérer que les choses pourraient changer sous la nouvelle présidence américaine. Le discours d’Obama au Caire, en dépit de ses nombreuses faiblesses, a été considéré comme un signe prometteur montrant que les Etats-Unis joueront un rôle plus favorable pour l’établissement d’une solution juste au conflit et à la continuelle tragédie vécue par les Palestiniens.

Certains estimaient qu’Obama voulait commencer par quelque chose d’élémentaire, en exigeant simplement un gel de l’expansion des colonies. C’était très loin d’exiger leurs pleins droits pour les Palestiniens, ou même d’exiger le ciment, la nourriture et les médicaments pour Gaza qui se meurt, mais c’était néanmoins un début.

Et tandis que les Palestiniens, les Israéliens, la région entière et les médias du monde entier attendaient les résultats de la confrontation des volontés d’Obama et de Netanyahu, lsraël a avancé plusieurs pions qui sont pourtant passés inaperçus.

Sur le plan extérieur, Israël a profité de la pression supposée des Etats-Unis pour exercer une contre-pression sur ces mêmes Etats-Unis pour que soient appliquées des sanctions plus graves sur l’Iran - voir plus - donnant une date limite pour la fin des efforts diplomatiques visant à diminuer la forte tension à propos du programme nucléaire iranien. C’était aussi le message que Netanyahu a transmis à la réunion avec le délégué des Etats-Unis pour le Moyen-Orient, George Mitchell, à Londres la semaine dernière.

Et Israël veut toujours plus, allant jusqu’à exiger - avec la bénédiction des Etats-Unis - une normalisation avec le monde arabe en échange de sa disposition jamais appliquée à stopper temporairement l’expansion des colonies. Mitchell était également de l’opinion que « les états arabes (devraient) faire quelques gestes dans le sens d’une normalisation des relations avec Israël, » d’après Reuters.

Sur le plan intérieur, les choses sont allés dramatiquement vers le pire. Cela a commencé par le vote d’une loi à la Knesset israélienne (parlement) qui entraînera l’emprisonnement des Arabes qui commémoreront la Nakba [ou la Catastrophe] palestinienne de 1948 qui a vu l’expulsion de presque 800 000 Palestiniens de leur terre. Puis il y a eu la nouvelle loi qui impose le remplacement des dénominations arabes sur des panneaux routiers au profit de leur équivalent hébraïque, même si les lieux en question sont connus par leur nom arabe depuis des millénaires.

Ce sont ni les premières ni les dernières initiatives fascistes destinées à interdire à toute trace d’identité palestinienne (musulmane ou chrétienne) de coexister avec le caractère « exclusivement juif » d’Israël.

C’est ceci et beaucoup d’autres choses qui se se sont produites tandis que les Palestiniens et d’autres, remplis d’espoir, retenaient leur souffle, attendant qu’Obama agisse, jusqu’à la toute récente expression de la flexibilité américaine.

A présent, les Palestiniens sont face à deux possibilités : soit continuer à souscrire à l’illusion que les Etats-Unis sont capables, ou simplement disposés - et en leur nom - à s’opposer aux transgressions israéliennes de la justice et des Droits de l’Homme, soit faire le ménage des chefs égoïstes et corrompus, unifier leurs rangs et poursuivre leur lutte pour une Palestine réellement libre et indépendante.

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Ramzy Baroud est écrivain et rédacteur en chef de « PalestineChronicle.com ». Ses écrits ont été publiés dans de nombreux journaux, magazines et anthologies dans le monde entier.
Son dernier livre est The Second Palestinian Intifada : A Chronicle of a People’s Struggle (Pluto Press, London). Et son prochain : My Father Was a Freedom Fighter : Gaza’s Untold Story(Pluto Press, London).

Site Internet :

www.ramzybaroud.net

31 août 2009 - Communiqué par l’auteur

Traduction de l’anglais : Claude Zurbach