C’est sous la pression internationale qu’Israël s’est résolu à desserrer l’étau imposé depuis quatre ans. Il autorise désormais les biens à usage civil, mais interdit dans les faits la plupart des produits.
C’est pour retoucher un visage si laid, fait de blocus illégal et d’attaques militaires contre des humanitaires, qu’Israël a été obligé de lâcher du lest. La coriandre, le cumin, les matelas et serviettes qui étaient bannis d’accès à Gaza depuis 4 ans, pour « protéger la sécurité d’Israël », seront désormais accessibles aux Palestiniens de cette bande encerclée de tous les côtés, y compris mer et air. Selon les médias israéliens, les nouvelles règles devraient prévoir l’établissement d’une « liste noire » d’environ 120 produits ou matériaux interdits, comme les matériaux de construction, dont les tuyaux, le ciment et le gravier, tandis que le reste serait libre d’entrer à Gaza. Le ciment et l’acier étaient, jusqu’à présent, totalement interdits, entravant la reconstruction de la bande de Gaza depuis la dernière guerre israélienne. Une centaine de produits sont actuellement autorisés contre 4 000 avant 2007, d’après l’organisation israélienne des droits de l’homme Gisha. Ce blocus a empêché les Nations-Unies d’acheminer les matériaux de construction nécessaires pour « la réalisation du plan accepté internationalement et visant à reconstruire des milliers de logements et d’autres bâtiments endommagés ou détruits lors de l’offensive israélienne », d’après Chris Gunness, porte-parole de l’Onu. Le blocus a également entraîné la fermeture de nombreuses usines, a privé de travail des milliers de personnes et a provoqué la paralysie de la fragile économie du territoire.
Sous pression internationale après son attaque sanglante contre la flottille humanitaire au mois de juin dernier, Tel-Aviv a opté pour la levée partielle. Un soupçon d’assouplissement dont les modalités restent très floues. Comment cette décision sera-t-elle mise en œuvre ? Nul ne le sait. Même l’Union Européenne (UE), qui a poussé dans cette direction dépêchant l’envoyé spécial du Quartette sur place, l’ignore. « C’est un pas dans la bonne direction. Ce sont les détails qui comptent », a néanmoins déclaré Cristina Galach, porte-parole de la présidence espagnole de l’UE.
Restaurer sa réputation
L’Europe juge pourtant insuffisante cette mesure. Elle veut en effet avoir une présence aux points de passage pour surveiller le transit des biens vers Gaza. La Suisse aurait présenté un mécanisme « pour assurer Tel-Aviv qu’il n’y a pas de contrebande d’armes ». Il apparaît que l’essentiel est la sécurité d’Israël et non le sort des 1,5 million de Palestiniens, dont plus de 80 % de la population dépendent de l’aide étrangère. Le quotidien de la majorité des Gazaouis est loin d’être facile. (lire reportage pages 4 et 5). Le constat est dramatique.
Concrètement, l’allégement du blocus ne concerne pas la mer de Gaza. Mais les voies maritimes du territoire resteront complètement closes, entravant, sous les yeux de la communauté internationale, la pêche des Gazaouis et paralysant un secteur assez florissant par le passé. Les postes-frontières entre Israël et Gaza seront également fermés et ne rouvriront qu’à certains moments pour les marchandises non cataloguées « soutien à la guerre ». C’est pourquoi l’Autorité palestinienne, tout comme le Hamas, a jugé cette déclaration de principe israélienne insuffisante, exigeant la levée totale du blocus imposé à l’enclave pauvre, d’autant plus qu’il reste illégal du point de vue juridique (lire page 6).
Mais Israël paie en partie le prix nécessaire pour restaurer sa réputation internationale après la désastreuse attaque de la flottille. A chaque fois que les pressions diplomatiques deviennent trop fortes, Israël lâche du lest sur le plan humanitaire, simplement pour ne rien céder au niveau politique. Cette fois, les Israéliens voulaient échapper aux pressions pour la création d’une commission d’enquête « internationale » sur l’attaque militaire contre le bateau humanitaire Marmara, où 9 Turcs ont été tués par des dizaines de balles israéliennes dans les eaux internationales. Tel-Aviv, qui veut mener l’enquête par ses propres moyens, a rejeté cette proposition et a annoncé la création d’une « commission publique » avec deux observateurs internationaux, sans droit de vote. Cette commission israélienne aura pour mission d’« enquêter sur les aspects relatifs à l’action entreprise par l’Etat d’Israël pour empêcher des navires d’atteindre les côtes de Gaza », selon un communiqué du bureau du premier ministre israélien.
Un moyen d’éviter une enquête « crédible ». Ankara, la plus concernée, a dénoncé par avance une « enquête impartiale », insistant sur la création d’une commission d’enquête « sous le contrôle direct des Nations-Unies », qui inclurait des représentants turcs et israéliens. C’est sans doute à cette fin que le premier ministre israélien Netanyahu doit se rendre le 6 juillet à Washington, pour rencontrer le président Barack Obama.
Samar Al-Gamal