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          L’achèvement imminent par l’Égypte de l’installation d’une  barrière en acier souterraine et en surface le long de sa frontière avec  la bande de Gaza met les Gazaouis sur les nerfs : comment vont-ils  survivre sans l’important commerce qui passe par les tunnels ?         
Un travailleur descend dans un tunnel près  de Rafah, au sud de Gaza. L’Égypte a presque terminé la construction  d’un mur métallique le long de sa frontière avec Gaza pour essayer d’en  finir avec la contrebande par les tunnels - Photo : Suhair Karam/IRIN
Un trafic de contrebande lucratif transite par les  tunnels pour toute une gamme de produits depuis qu’Israël a imposé un  embargo économique contre la bande de Gaza après la prise de pouvoir par  le Hamas en juin 2007. La Banque mondiale et les économistes  palestiniens estiment qu’au moins 80 pour cent des importations totales  vers Gaza passent par les tunnels.
« Creuser des tunnels et y travailler est l’un des rares  emplois disponibles pour les jeunes Gazaouis », a dit Omar Sha’ban,  économiste à Gaza.
« Les personnes qui travaillent dans les tunnels  gagneraient 25 dollars par jour, une somme énorme pour l’économie  palestinienne actuelle. Mais ils sont exposés aux bombardements  quotidiens ... par les forces aériennes israéliennes, à l’effondrement  des tunnels et aux incendies ».
Ziad al-Zaza, ministre de l’Économie du gouvernement du  Hamas, a dit qu’environ 20 000 personnes travaillaient dans les tunnels  avant l’opération militaire israélienne à Gaza, début 2009, et qu’ils ne  sont maintenant plus que la moitié. L’armée israélienne a dit qu’elle  avait endommagé ou détruit 60 à 70 pour cent des tunnels lors de  l’offensive.
Abu Antar*, propriétaire et gérant d’un tunnel, âgé de  45 ans, a dit que fermer les tunnels entre Gaza et Rafah, en Égypte,  signifierait que lui et les centaines d’autres personnes qui travaillent  grâce aux tunnels n’auraient plus de revenus.
« Nous avons réussi à traverser la clôture égyptienne,  mais maintenant, ce que nous craignons c’est que les Égyptiens  l’électrifient et ajoutent des capteurs sismiques pour détecter notre  présence sous terre, ce qui rendrait notre mission impossible. Les  tunnels sont notre unique source de revenus », a dit à IRIN ce père de  sept enfants.
La barrière en acier posée par l’Égypte fera 10 à 11  kilomètres de long et descendra jusqu’à 18 mètres sous terre, ont dit  les autorités égyptiennes. Le quotidien égyptien al-Shorouqa récemment annoncé que « le chantier du  mur principal était dans sa quatrième et dernière phase », après quoi  des caméras et des détecteurs seront installés.
Cette opération devrait durer quelques semaines et une  période d’essai devrait ensuite avoir lieu avant que l’installation ne  devienne complétement opérationnelle.
Un travail dangereux
Abu Antar a dit que 50 personnes travaillaient dans son  tunnel.
« Chaque jour, nous travaillons dans les tunnels et nous  nous demandons si nous allons sortir vivants. La terre s’est effondrée  de nombreuses fois... La mort est inévitable dans ce genre de travail.  Nous avons peur 24 heures sur 24. Beaucoup de gens sont morts. Chaque  mois, il y a de nouvelles victimes des bombardements aériens  [israéliens] dans les tunnels », a-t-il dit.
Palestine Square, à Gaza (photo d’archives).  Au moins 80 pour cent des importations vers Gaza passent par les  tunnels - Photo : Erica Silverman/IRIN
Les accidents sont fréquents dans les tunnels. Selon  l’organisation palestinienne de défense des droits humains Al-Mezan, 120  trafiquants travaillant dans les tunnels ont été tués au cours des  trois dernières années.
Les personnes travaillant dans les tunnels estiment  qu’il existe plus de 1 000 tunnels entre Gaza et la ville de Rafah, du  côté égyptien de la frontière. Ils font de 15 à 35 mètres de profondeur  et jusqu’à un kilomètre de long.
« Une catastrophe humanitaire »
« [La construction] d’un tunnel coûte environ 200 000  dollars, alors lorsqu’ils seront détruits par les avions israéliens, ou  qu’ils seront bloqués par le mur égyptien, la pauvreté et le chômage  augmenteront de plus en plus », a-t-il dit. « Bloquer les tunnels  entraînera une terrible catastrophe humanitaire. Tous les habitants de  la bande de Gaza dépendront alors de l’aide alimentaire des Nations  Unies », a dit le ministre du Hamas, M. al-Zaza.
« Nous appelons les gouvernements égyptien et israélien à  désinvestir Gaza et à laisser les Palestiniens travailler sur terre et  non sous terre et les Gazaouis vivre dans la dignité et la fierté », a  dit M. al-Zaza.
Israël a imposé à la bande de Gaza de strictes  restrictions à l’importation après la prise de pouvoir par le Hamas en  2007 et en guise de représailles après les tirs de rockets de Gaza sur  Israël. L’interdiction d’importer touche tout ce qui pourrait aider le  Hamas à fabriquer des armes, notamment le fer, l’acier et la plupart des  matériaux de construction. Toutes les exportations sont interdites et  les importations sont limitées à quelques biens humanitaires. Les  articles tels que les cahiers scolaires, les bureaux, le matériel  médical, les appareils ménagers et les abris montables accusent  d’importants retards.
Israël a salué les efforts de l’Égypte pour combattre la  contrebande. L’Égypte dit que sa sécurité était menacée par le flux  croissant de biens illicites et de militants vers son territoire par les  tunnels.
Israël accuse le Hamas d’utiliser les tunnels pour  importer des armes, une allégation niée par le Hamas.
Lors d’une visite à Gaza, plus tôt ce mois-ci, le  coordinateur des secours d’urgence des Nations Unies, John Holmes, a mis  en garde contre de gros problèmes si les tunnels étaient bloqués.
« Si ces tunnels sont bloqués, si indésirables qu’ils  puissent être, et aussi indésirables que puissent être leurs  conséquences sur la société et l’économie de Gaza, la situation sans les  tunnels serait complètement insoutenable », a dit M. Holmes. Il a  renouvelé ses appels à Israël pour mettre fin au blocus du territoire  palestinien.
                30 mars 2010 - Irin News - Vous pouvez consulter cet article  à : 
http://www.irinnews.org/Fr/ReportFr...
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