Marc Henry
Où l’on croit rêver : le colonisateur, qui viole quotidiennement le droit international, demande des "compensations" pour arrêter d’en violer une partie pendant un court laps de temps. Et réclame que soit appliqué l’engagement du néoconservateur Bush d’accepter l’annexion de plus encore de terre palestinienne illégalement occupée et de nier les droits -inscrits dans le droit international et les déclarations des Nations unies- des réfugiés palestiniens (CL).
Benyamin Nétanyahou fait monter les enchères. Le premier ministre israélien réclame que Barack Obama reprenne à son compte la lettre de garanties adressée en 2004 par George Bush à Ariel Sharon. Dans cette missive, le précédent président s’engageait, selon l’interprétation des responsables israéliens, à accepter une future annexion des grands blocs de colonies où vivent la majorité des Israéliens installés en Cisjordanie dans le cadre d’un accord de paix avec les Palestiniens. De plus, George Bush avait accepté le fait que les réfugiés palestiniens ne pourraient pas retourner en Israël, mais seulement rentrer dans les limites de leur futur État. Deux « cadeaux » de poids que Benyamin Nétanyahou voudrait voir confirmer par Barack Obama. Selon le quotidien Yediot Aharonot, le premier ministre exige cette « compensation » en échange d’une prolongation de deux à trois mois du gel de la construction de logements dans les colonies de Cisjordanie. Or ce dossier est au cœur de toutes les discussions menées en coulisses. Mahmoud Abbas a proclamé qu’il suspendrait toute négociation si la colonisation reprenait de plus belle après un gel de 10 mois, décidé par Benyamin Nétanyahou sous la pression de Barack Obama.
« Paquet cadeau »
Le président américain, qui a fait de la reprise des pourparlers une affaire personnelle, a déjà consenti des « gestes » pour inciter Benyamin Nétanyahou à plus de souplesse. Dans une autre lettre évoquée par les médias israéliens, dont la Maison-Blanche a jusqu’à présent nié l’existence, le président américain s’est dit favorable au maintien d’une présence militaire israélienne dans la vallée du Jourdain. Il s’est aussi engagé à imposer un veto américain à toute tentative de condamnation de l’État hébreu à l’ONU tout en promettant de fournir une nouvelle fournée d’armes sophistiquées. Ce « paquet cadeau », comme l’ont qualifié les commentateurs, n’a pas suffi.
Benyamin Nétanyahou n’a en effet qu’une confiance limitée dans le président actuel. « Dans le passé, nous avons obtenu des garanties et des lettres de la part des États-Unis, mais l’Administration actuelle ne les a pas reconnues », rappelle Gilad Erdan, le ministre de l’Environnement, un proche de Benyamin Nétanyahou. Bref, tout le suspense porte sur le prix que Barack Obama est prêt à payer pour obtenir un moratoire de la colonisation et la reprise de négociations qui avaient à peine repris au début de septembre.
En attendant d’en savoir plus, Nétanyahou tente de contrer d’avance l’opposition des « durs » de sa majorité. Il a annoncé un projet de loi contraignant les candidats à la nationalité israélienne à prêter serment d’allégeance à Israël, défini comme un « État juif et démocratique ». Selon les commentateurs, Benyamin Nétanyahou entend ainsi donner des gages à son principal allié et rival, son ministre des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman.