dimanche 31 octobre 2010

Fouiller les décombres entraîne les Gazaouis vers la dangereuse « zone tampon »

vendredi 29 octobre 2010 - 08h:29
Mel Frykberg - E.I
Passage d’Erez, Bande de Gaza occupée (IPS) - La scène se produit au niveau du tunnel à armature métallique, reliant la partie israélienne de la frontière au nord de Gaza, en direction du point de contrôle palestinien où plusieurs groupes de jeunes gens et garçons palestiniens apparaissent fouillant dans les tas de décombres.
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Sur la photo : Un adolescent Palestinien a reçu une balle à la cheville alors qu’il fouillait à la recherche de matériaux de construction, octobre 2010 (Anne Paq/ActiveStills)
Ces décombres sont le résultat de l’invasion militaire israélienne sur Gaza, menée de décembre 2009 jusqu’au mois de janvier 2010 et dénommée « Opération Plomb Durci ». Détruites et bombardées, les maisons palestiniennes cèdent la place à un décor marqué par des restes de béton brisé et de métaux difformes.
Tout à coup, plusieurs coups de feu retentissent. Les tirs proviennent des tours de surveillance militaires israéliennes et visent les jeunes qui se trouvaient à quelques centaines de mètres de là. Pour rappel, Israël avait notifié et délimité une zone de sécurité de 300 mètres entre la clôture de la frontière et le nord de Gaza.
Depuis la fin de l’opération Plomb Durci, les coups de feu israéliens dans la zone tampon ont fait au moins 25 morts Gazaouis, dont six enfants, et quelques 146 blessés.
Dans un rapport du mouvement Defense for Children International(i), il a été mentionné qu’au cours du trimestre passé, dix jeunes palestiniens ont été la cible de tirs ; le plus jeune d’entre eux n’avait que 13 ans, alors que le plus âgé n’en avait que 17. Les animaux, eux aussi n’ont pas été épargnés puisque trois chevaux et un baudet ont été abattus.
En fait, d’après le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs - OCHA) : « Il y a une grande ambiguïté et un manque de transparence flagrant quant à l’exactitude des frontières des zones à accès restreint, des conditions qui dictent les raisons d’un éventuel refus ou acceptation d’accès à ces zones ainsi que les conséquences d’une entrée illicite ».
« S’agissant des frontières, l’armée israélienne avait physiquement et manifestement manqué de tracer les zones à accès restreint, bien qu’elle y mène des incursions au sol à raison de trois ou quatre fois par semaine ».
Par ailleurs, Karl Shembi, représentant d’Oxfam(ii) à Gaza rapporte à l’IPS que, outre les fermiers empêchés de cultiver leurs terres (représentant plus de 30% des terres très fertiles de la Bande), les palestiniens qui ramassent des débris dans le but de les recycler sont ciblés par des tirs, parfois mortels, des soldats israéliens du haut des 1500 mètres de la clôture.
Dans ce contexte, Shembri ajoute : « Non seulement les palestiniens se voient privés des matériaux de construction, mais ils sont pris pour cible par les balles israéliennes pendant qu’ils essaient de pallier la pénurie intolérable en recyclant ce qui reste de leurs maisons et usines détruites ».
Aussi, il a été rapporté par le groupe de droits israéliens « Gisha(iii) » qu’actuellement, seulement 4% du besoin en matériaux de construction est autorisé à accéder à Gaza ; un fait ayant encouragé quelques mouvements d’aide internationale à projeter la construction de stations d’épuration, de puits et de centres de loisirs. Toutefois, la plupart des maisons et des commerces des Palestiniens restent endommagés ou bien détruits.
Cette situation affecte aussi les écoliers. Ainsi, ne parvenant pas à satisfaire les fortes demandes d’inscription, l’Office de Secours et de Travaux des Nations Unies pour les Réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) avait été contrait de refuser quelques 40.000 enfants gazaouis, en droit de s’inscrire dans ses écoles pour cette année scolaire et ce, faute de pouvoir construire 100 nouvelles écoles. L’insuffisance de classes a poussé la plupart des écoles de Gaza à organiser des doubles vacations dans des classes pouvant accueillir jusqu’à une cinquantaine d’étudiants.
Outre la construction et l’éducation, l’agriculture. En effet, OCHA cite que depuis juin 2009, un total de 46% des terres agricoles dans la Bande de Gaza ont été jugées inaccessibles ou non productives en raison des destructions engendrées par le Plomb Durci et des zones à accès interdit qui longent la zone tampon de sécurité.
A l’intérieur de la zone tampon s’étend une zone le long de la frontière nord et Est avec Israël. Evaluée au tiers des terres cultivables de la Bande de Gaza, la zone reste, cependant, interdite d’accès aux fermiers et aux éleveurs. Il convient de rappeler que l’IPS avait été, à maintes reprises, témoin des scènes où ces nombreux garçons, travaillant à proximité de la frontière, reçoivent des balles dans les jambes ou dans les bras et ce, en guise d’avertissement.
Telles sont donc les marques de la pauvreté et du chômage humiliants à Gaza. Dans un climat où 80% de la population sont tributaire de l’aide alimentaire, et conformément aux standards de vie dans la Bande de Gaza, ces adolescents mettent leur vie en péril et au risque de perdre un bras ou une jambe, ou même la vie, ils tentent de gagner des revenus avantageux.
En effet, le travail quotidien éreintant qu’ils accomplissent, du matin au soir, en train de récupérer les gravats et de ramasser les bribes et morceaux de métaux est rémunéré à environ $40 net. Pourtant, quelques sites de collecte se trouvent à l’intérieur de la zone tampon. Très souvent, des morceaux et déchets de béton déterrés, broyés puis mélangés de nouveau pour obtenir des briques, de qualité médiocre, sont vendus aux entrepreneurs et aux usines ; ce qui a rendu la collecte de débris une activité relativement lucrative.
C’est pourquoi, le nombre des Gazaouis à s’aventurer dans la zone tampon ne cesse s’élargir.
Notes :
-  i) DEI : Organisation non gouvernementale indépendante pour la protection des droits des enfants sur les plans mondial, régional, national et local. Œuvrant pendant plus de 30 ans, elle est représentée dans 40 pays à travers le monde. Son secrétariat est basé à Genève, Suisse.
-  ii) Association internationale de 14 organisations travaillant ensemble dans 99 pays et en collaboration avec des partenaires et des alliés dans le monde entier pour trouver des solutions durables à la pauvreté et à l’injustice.
-  iii) Organisation israélienne à but non lucratif fondée en 2005. Son objectif est d’œuvrer pour la liberté de mouvement des Palestiniens, surtout pour les habitants de Gaza.
Du même auteur :
20 octobre 2010 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction de l’anglais : Niha
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