« Mon respect pour les blessés est infini, leur
détermination contenue en pleine souffrance, dans l’agonie et le
choc... », écrit le docteur Mads Gilbert.
- Un médecin palestinien évacue le corps d’une petite fille à Chajaya, en banlieue est de Gaza, pilonnée le 20 juillet 2014 [afp.com-Thomas Coex]
Gaza - dimanche 20 juillet 11h 06 -
Chers amis,
La nuit dernière a été extrême. L’invasion « terrestre » de Gaza a
amené des dizaines de véhicules surchargés de toutes sortes de
Palestiniens blessés, mutilés, déchiquetés, sanglants, tremblants,
agonisant – de tous âges, tous des civils, tous innocents.
Les héros dans les ambulances et dans tous les hôpitaux de Gaza
travaillent en équipes de 12 à 24 heures, gris de fatigue et de charges
de travail inhumaines (sans aucune rémunération depuis 4 mois à Shifa).
Ils soignent, trient, essaient de démêler l’incompréhensible chaos de
corps, de tailles, de membres - des humains marchant, ne marchant plus,
respirant, ne respirant plus, saignant. DES ETRES HUMAINS !
Maintenant, traités une fois de plus comme des bêtes par « l’armée la plus morale du monde » (sic !)
Mon respect pour les blessés est infini, leur détermination contenue
en pleine souffrance, dans l’agonie et le choc. Mon admiration pour le
staff de volontaires est infinie ; être proche du « soumoud »
palestinien me donne la force, même si par moments j’ai seulement envie
de crier, de serrer quelqu’un contre moi, de pleurer, de sentir la peau
et la chevelure de l’enfant chaud, couvert de sang, de nous protéger en
nous tenant dans les bras indéfiniment – mais nous ne pouvons pas nous
le permettre, et eux non plus ne peuvent pas.
Des visages de cendre – Oh NON ! Pas encore un chargement de dizaines de mutilés saignants !
Nous avons déjà des lacs de sang sur le sol des Urgences, des piles
de pansements saturés de sang à dégager – oh – les nettoyeurs, partout,
déblaient rapidement le sang et les serviettes, les cheveux, les
vêtements, les canules – vestiges de mort – ils les enlèvent tous pour
en préparer de nouveaux, pour recommencer le tout.
Plus de 100 cas sont arrivés à Shifa ces dernières 24 heures. Assez
pour un grand hôpital bien entraîné avec tout ce qu’il faut, mais ici –
il n’y a presque rien : pas d’électricité, d’eau, de matériel jetable,
de médicaments, de tables d’opération modulables, d’instruments, de
moniteurs – ils sont tous rouillés comme s’ils sortaient de musées des
cliniques de jadis. Mais ils ne se plaignent pas, ces héros. Ils
continuent avec ce qu’ils ont, comme des guerriers, de front,
extrêmement déterminés.
Et comme je vous écris ces mots, seul, sur un lit, mes larmes
coulent, les larmes chaudes mais inutiles de la douleur et de la colère,
de la rage et de la peur. Cela n’est pas vraiment en train de se
passer !
Et alors, juste maintenant, l’orchestre de la machine de guerre
israélienne redémarre sa répugnante symphonie, juste maintenant : des
salves d’artillerie depuis les navires de guerre juste au bas des
plages, les rugissants F-16, les drones écœurants (en arabe : zennanis :
les bourdons), et les Apache en pagaille.
Tous produits et payés par les Etats-Unis.
M. Obama, avez-vous un cœur ?
Je vous invite, passez donc une nuit, juste une, avec nous à Shifa. Déguisé en nettoyeur peut-être.
J’en suis convaincu à 100 % : cela changerait l’Histoire.
Personne ayant un cœur ET du pouvoir ne peut sortir d’une nuit à
Shifa sans être déterminé à mettre fin au massacre du peuple
palestinien.
Mais les sans-cœurs et sans-pitié ont fait leurs calculs et planifié d’autres massacres « dahyia » contre Gaza.
Les fleuves de sang continueront à couler la nuit qui vient. Je peux entendre comment ils ont accordé leurs instruments de mort.
Je vous en prie. Faites ce que vous pouvez. Ceci tout CECI ne peut pas continuer
Professeur et Chef de clinique
Clinique de médecine d’Urgence
Hôpital Universitaire de Norvège du Nord (UNN)
https://www.middleeastmonitor.com/a...
Traduction : Info-Palestine.eu - AMM