Le 10 juillet dernier, nous publiions un article traduit de Slate.com intitulé «A Gaza, Israël fait tout pour minimiser les pertes civiles»
qui expliquait les mesures prises par l'armée israélienne pour abattre
ses cibles (des membres et des infrastructures du Hamas) en faisant le
moins de victimes civiles possibles, une tâche rendue difficile par la
stratégie de boucliers humains du Hamas. De nouvelles informations
viennent aujourd'hui remettre en question cette affirmation.
Selon une ONG palestinienne, le Palestinian centre for human rights, l’armée israélienne utilise des obus qui relâchent des milliers de fléchettes en acier dans le cadre de ses opérations à Gaza. Le Guardian, qui relate l’information, précise que six tirs ont été effectués
sur le village de Khuzaa le 17 juillet, et publie des photos de ces
petits projectiles récupérés au sol par un membre de l’ONG
palestinienne.
Cette arme est constituée d’un obus qui renferme de très petites
fléchettes (voir le schéma ci-dessous), tiré depuis le canon de 105 mm
d’un char. Le projectile explose en vol, libérant les fléchettes qui se
répandent en forme conique sur une distance de 300 mètres de long et 90
mètres de large, explique une autre ONG, israélienne celle-ci, B’Tselem.
L’armée israélienne n’a pas démenti l’information, tout en précisant
que l’IDF («Israelian Defense Forces», «Forces de défense israéliennes»)
n’emploie que des armes autorisées par le droit international qui
règlemente les conflits armés. Ces obus remplis de fléchettes ne sont
pas interdits. S'ils ont été utilisés dans de précédents conflits pour
atteindre des combattants dans des zones densément boisées, l’ONG
B’Tselem note que la situation à Gaza rend leur utilisation
particulièrement dangereuse pour les civils:
«L’un des principes les plus fondamentaux [du droit humanitaire, NDLR] est l’obligation de distinguer entre ceux qui sont impliqués et ceux qui ne sont pas impliqués dans le combat, et d’éviter dans la mesure du possible de blesser ceux qui ne le sont pas. De ce principe dérive l’interdiction de l’utilisation d’armes imprécises qui risquent de causer des blessures chez les civils».
En 2009, Amnesty international évoquait l’utilisation de ces fléchettes par l’armée israélienne dans la bande Gaza:
«Outre le phosphore blanc, l'armée israélienne a utilisé diverses autres armes dans des zones civiles très peuplées de la bande de Gaza au cours du conflit de trois semaines ayant débuté le 27 décembre [de l’année 2009, NDLR]. [...]
Armes anti-personnelles conçues pour pénétrer une végétation dense, ces fléchettes ne devraient jamais être utilisées dans des zones civiles construites. Depuis plusieurs années, l'armée israélienne y a régulièrement recours dans la bande de Gaza. Dans la plupart des cas, leur utilisation se solde par des morts ou des mutilations.»
Selon B'Tselem, ces armes avaient tués entre 2001 et 2002 au moins neuf Palestiniens, et avaient été utilisées au Liban lors du conflit contre le Hezbollah, où elles avaient «tué et blessé des douzaines de civils libanais qui n'étaient pas impliqués dans les hostilités, incluant des enfants».
Les fléchettes ont été utilisées durant la Première Guerre mondiale,
larguées par avion derrière des lignes ennemies, ou lors de la guerre
du Vietnam, où les Américains avaient recours à un «Beehive»,
littéralement une «ruche», surnommée ainsi en raison du bourdonnement
que faisaient les fléchettes fusant à basse altitude. Les obus étaient
tirés au sol par un obusier de 105 mm.