Publié le 23-08-2010
Où l’on constate que, même très minoritaires, les opposants israéliens restent partie prenante de la mobilisation contre l’expulsion des habitants palestiniens de la ville et que certains sont prêts désobéir aux ordres et à aller en prison pour défendre la justice.
(...) Jeudi après-midi avec l’aide de deux jeunes Palestiniens, avec Isabelle, une photographe normande qui a passé cette semaine avec moi pour un de ses projets sur les habitations, nous sommes allés rencontrer des habitants du quartier Arabe de Sheikh Jarrah dans la partie Est (arabe) de Jérusalem où des familles sont actuellement expulsées et où des familles Juives prennent leur place. Certaines familles expulsées ont campé dans la rue pendant plusieurs mois jusqu’à ce que la police les fasse partir.
L’an dernier, en octobre, nous avions rencontré la famille Hanoun, cette fois c’est la famille Al Kurd qui nous a reçus. Nous entendons la détresse de ces gens qui vivent pour la deuxième fois l’exil et la dépossession. En 1948, ils ont été chassés de leurs maisons sans pouvoir rien emporter, ensuite, comme réfugiés, au moment où la Jordanie occupait Jérusalem-Est ils ont été relogés officiellement à Sheikh Jarrah avec l’assurance qu’ils étaient chez eux et la promesse d’obtenir des titres de propriété…
Malheureusement, la guerre des Six Jours a fait partir les Jordaniens avant que les titres n’aient été signés. Depuis les années 70 il y a une longue bataille juridique, certains avaient obtenu des contrats de location officiels et sont dans une relative sécurité, les autres sont expulsés petit à petit et des familles juives reprennent les maisons. Tout cela fait partie d’une politique globale actuelle pour grignoter les quartiers arabes de Jérusalem et remplacer les habitants arabes par des habitants juifs. C’est aussi le cas dans le quartier de Silwan et bien d’autres encore. Les ordres d’expulsion et de démolition sont fréquents, souvent les habitants sont avisés de l’exécution de ces ordres dans l’heure qui précède et ils voient l’armée les faire sortir sans rien et leur maison est démolie sous leurs yeux ou vidée de son contenu sur la voie publique.
Depuis un an il y a des manifestations hebdomadaires pour protester contre cette politique qui chasse les familles Palestiniennes de Jérusalem.
Nous sommes allées à celle de Sheikh Jarrah où se retrouvent de nombreux manifestants qui parfois viennent en car depuis Tel Aviv : parmi ces manifestants on trouve de nombreux jeunes Israéliens. Ce qui est nouveau c’est qu’on trouve parmi eux des Juifs pratiquants qui pensent qu’il y a là une grande injustice et que leur Foi ne leur permet pas de se taire et que leur devoir en tant que Juifs est d’être présents lorsqu’il y a une injustice.
Parmi les panneaux, écrits en Arabe et en Hébreu on peut lire : « La colonisation de Jérusalem = un obstacle à toute solution de Paix » et puis aussi « Arabes et Juifs, nous ne sommes pas des ennemis ». C’est une atmosphère joyeuse et amicale, un grand jeune homme avec Kippa danse avec des petits enfants Palestiniens, des jeunes femmes Israéliennes lancent des chants que tous reprennent en chœur, des discussions animées se nouent entre les uns et les autres. Un lieu privilégié pour rencontrer l’humanité de l’autre. Les soldats se tiennent à l’écart : il n’y a pas eu hier de réaction violente de l’armée comme il y a chaque semaine à Bil’in.
Je rencontre Nitza une femme Israélienne que j’avais rencontrée l’an dernier au village Bédouin. Avec onze autres femmes Israéliennes, elles ont lancé dans le quotidien Haaretz un manifeste : « Nous n’obéirons pas ! » et malgré les interdictions, elles sont allées chercher des femmes palestiniennes dans les Territoires et ont passé avec elles une journée à la mer. Dans la foulée, une pétition a été lancée et 300 autres femmes Israéliennes ont annoncé qu’elles décidaient la désobéissance civile. Les unes et les autres risquent 2 années de prison."
Salam Shalom
Roseline (lettre circulaire envoyée le 22 août 2010)
CAPJPO-EuroPalestine