Par Christian Merville | 18/03/2010
Le point
Il est difficile de croire Benjamin Nentanyahu quand, la main sur le cœur, il prétend que la reconstruction de la synagogue de Hurva représente « un message de coexistence interreligieuse ». Il faut croire par contre Ariel Atias, ministre israélien de l'Habitat, lorsqu'il affirme que la construction de logements se poursuivra dans la Vieille Ville de Jérusalem, précisant : « Des milliers d'habitations vont être édifiées cette année. Aucun gouvernement n'a autorisé un dialogue sur notre droit à édifier des maisons dans la capitale. » Un tel sujet qui serait matière à négociations, vous n'y pensez pas - les Israéliens non plus...
Depuis lundi, les portes de l'enfer se sont entrouvertes dans les territoires occupés, à un moment où, circonstance aggravante, les relations sont au plus mal avec le Big Brother américain et où le dialogue avec les Palestiniens ne semble pas près de reprendre, Mahmoud Abbas lui-même (eh ! Oui) exigeant l'arrêt, et non plus le gel, des implantations pour engager des pourparlers indirects. À Washington, les plus fidèles alliés du « rempart de la démocratie » en terre proche-orientale peinent à le protéger, imités en cela par l'Aipac (American Israel Public Affairs Committee) qui s'est contentée, à l'adresse des deux camps, d'un timide appel à la raison, d'ailleurs resté sans réponse.
Il faut remonter au tout début des années 90 pour retrouver un climat aussi tendu entre Washington et Tel-Aviv. À l'époque, George H. Bush avait bloqué la garantie d'un prêt de 10 milliards de dollars destiné à financer la construction d'infrastructures en Cisjordanie et à Gaza tant que l'État hébreu n'aurait pas renoncé à l'aménagement de colonies dans ces deux zones. En signe de représailles, il n'avait obtenu que 12 pour cent des voix juives à la présidentielle de 1992 (35 pour cent en 1988). Cette fois, à en croire un de ses conseillers, Barack Obama est « furieux » pour la rebuffade essuyée par Joe Biden la semaine dernière quand, à son appel à une relance des pourparlers de paix, il avait été répondu par l'annonce d'un projet de 1 600 nouveaux blocs de maisons dans la partie orientale de Jérusalem.
Après avoir haussé le ton, la Maison-Blanche a laissé filtrer les premiers signes d'une légère détente : mardi soir, le vice-président et Netanyahu ont procédé par téléphone à un rapide tour d'horizon de la situation et Hillary Clinton a carrément écarté l'hypothèse d'une crise « entre deux pays, deux peuples unis par des liens indéfectibles ». Des gestes qui répondaient, semble-t-il, à un appel lancé par Eric Cantor, chef de la minorité républicaine à la Chambre basse. Auprès de Rahm Emanuel, le représentant républicain de la Virginie estimait que l'administration démocrate cherchait à imposer son point de vue à son allié en saisissant le prétexte d'« un incident diplomatique mineur ». Dans l'autre camp aussi on s'efforçait de limiter les dégâts : l'ambassadeur israélien, Michael B. Oren, démentait avoir parlé de crise historique, se disant certain que le différend sera bientôt surmonté.
Or, à peine dissipés - oh !
Partiellement, peut-être même provisoirement - les nuages gris qui avaient commencé à s'amonceler que surgissait lundi l'affaire de la synagogue. En réalité, les travaux de restauration de ce lieu de culte, détruit par l'armée jordanienne
lors de la guerre de 1948, étaient en cours depuis des années ; c'est son inauguration lundi qui a mis le feu aux poudres, embarrassant un peu plus encore les ministres modérés du gouvernement de coalition et apportant de l'eau au moulin de ceux qui calquent leur attitude sur celle de David Axelrod, l'un des conseillers du président, partisan d'une ligne de conduite ferme.
Du côté palestinien, l'affaire Hurva est loin de faire l'unanimité contre elle, contrairement à celle des nouveaux points de peuplement. D'où la quasi-certitude, en dépit des appels en ce sens lancés par le Hamas, que l'on n'est pas à la veille d'une Intifada-III. Une opinion partagée par un officier supérieur de l'armée israélienne qui, sous le couvert de l'anonymat, estime improbable, dans une interview accordée au journal Haaretz, une reprise du conflit armé, « car nous sommes soucieux tous de ne pas lâcher la bride à la violence ».
Autant de bons et rassurants sentiments. D'où vient qu'ils ne calment pas, ou si peu, les appréhensions ? C'est que, ici, la droite ultra a le vent en poupe, et là un président apparaît en mauvaise posture, qu'il s'agisse de l'issue irakienne, de la guerre en Afghanistan, du programme nucléaire iranien, des problèmes économiques ou encore de la baisse de sa popularité. Une fois de plus, ce sont les militaires qui se chargent d'interpréter la multiplication des voyants rouges. L'absence de progrès au Proche-Orient nourrit le sentiment d'antiaméricanisme, lui-même né de l'impression que nous favorisons Israël. Foi de David H. Petraeus.
Depuis lundi, les portes de l'enfer se sont entrouvertes dans les territoires occupés, à un moment où, circonstance aggravante, les relations sont au plus mal avec le Big Brother américain et où le dialogue avec les Palestiniens ne semble pas près de reprendre, Mahmoud Abbas lui-même (eh ! Oui) exigeant l'arrêt, et non plus le gel, des implantations pour engager des pourparlers indirects. À Washington, les plus fidèles alliés du « rempart de la démocratie » en terre proche-orientale peinent à le protéger, imités en cela par l'Aipac (American Israel Public Affairs Committee) qui s'est contentée, à l'adresse des deux camps, d'un timide appel à la raison, d'ailleurs resté sans réponse.
Il faut remonter au tout début des années 90 pour retrouver un climat aussi tendu entre Washington et Tel-Aviv. À l'époque, George H. Bush avait bloqué la garantie d'un prêt de 10 milliards de dollars destiné à financer la construction d'infrastructures en Cisjordanie et à Gaza tant que l'État hébreu n'aurait pas renoncé à l'aménagement de colonies dans ces deux zones. En signe de représailles, il n'avait obtenu que 12 pour cent des voix juives à la présidentielle de 1992 (35 pour cent en 1988). Cette fois, à en croire un de ses conseillers, Barack Obama est « furieux » pour la rebuffade essuyée par Joe Biden la semaine dernière quand, à son appel à une relance des pourparlers de paix, il avait été répondu par l'annonce d'un projet de 1 600 nouveaux blocs de maisons dans la partie orientale de Jérusalem.
Après avoir haussé le ton, la Maison-Blanche a laissé filtrer les premiers signes d'une légère détente : mardi soir, le vice-président et Netanyahu ont procédé par téléphone à un rapide tour d'horizon de la situation et Hillary Clinton a carrément écarté l'hypothèse d'une crise « entre deux pays, deux peuples unis par des liens indéfectibles ». Des gestes qui répondaient, semble-t-il, à un appel lancé par Eric Cantor, chef de la minorité républicaine à la Chambre basse. Auprès de Rahm Emanuel, le représentant républicain de la Virginie estimait que l'administration démocrate cherchait à imposer son point de vue à son allié en saisissant le prétexte d'« un incident diplomatique mineur ». Dans l'autre camp aussi on s'efforçait de limiter les dégâts : l'ambassadeur israélien, Michael B. Oren, démentait avoir parlé de crise historique, se disant certain que le différend sera bientôt surmonté.
Or, à peine dissipés - oh !
Partiellement, peut-être même provisoirement - les nuages gris qui avaient commencé à s'amonceler que surgissait lundi l'affaire de la synagogue. En réalité, les travaux de restauration de ce lieu de culte, détruit par l'armée jordanienne
lors de la guerre de 1948, étaient en cours depuis des années ; c'est son inauguration lundi qui a mis le feu aux poudres, embarrassant un peu plus encore les ministres modérés du gouvernement de coalition et apportant de l'eau au moulin de ceux qui calquent leur attitude sur celle de David Axelrod, l'un des conseillers du président, partisan d'une ligne de conduite ferme.
Du côté palestinien, l'affaire Hurva est loin de faire l'unanimité contre elle, contrairement à celle des nouveaux points de peuplement. D'où la quasi-certitude, en dépit des appels en ce sens lancés par le Hamas, que l'on n'est pas à la veille d'une Intifada-III. Une opinion partagée par un officier supérieur de l'armée israélienne qui, sous le couvert de l'anonymat, estime improbable, dans une interview accordée au journal Haaretz, une reprise du conflit armé, « car nous sommes soucieux tous de ne pas lâcher la bride à la violence ».
Autant de bons et rassurants sentiments. D'où vient qu'ils ne calment pas, ou si peu, les appréhensions ? C'est que, ici, la droite ultra a le vent en poupe, et là un président apparaît en mauvaise posture, qu'il s'agisse de l'issue irakienne, de la guerre en Afghanistan, du programme nucléaire iranien, des problèmes économiques ou encore de la baisse de sa popularité. Une fois de plus, ce sont les militaires qui se chargent d'interpréter la multiplication des voyants rouges. L'absence de progrès au Proche-Orient nourrit le sentiment d'antiaméricanisme, lui-même né de l'impression que nous favorisons Israël. Foi de David H. Petraeus.