Si l’objectif à l’origine d’un projet de résolution pour la reconnaissance d’un État palestinien était d’imposer la reconnaissance du droit de propriété des Palestiniens sur leur terre et saper ainsi la légitimité de l’expansion des colonies, les clauses [de la présente résolution], d’autant plus qu’elles ont été modifiées conformément aux pressions américaines, cherchent en vérité à renforcer l’occupation israélienne et à empêcher toute résistance politique, culturel ou armée palestinienne.
- L’échec programmé à l’avance de la résolution présentée par Abbas illustre une nouvelle fois la vacuité de la prétendue stratégie diplomatique adoptée par l’Autorité de Ramallah : capitulation sur capitulation, discussions stériles, initiatives qui ne sont que des écrans de fumée pour dissimuler une complète inaction - Photo : EPA
Alors que le projet initial n’affichait aucune volonté de transiger sur les droits des Palestiniens, il ne fait plus aucune référence explicite au droit au retour des Palestiniens, sauf pour dire que le sort des réfugiés doit être résolu comme cela est stipulé dans la Résolution 194 des Nations Unies. La formulation adoptée n’appelle pas à la pleine application de la résolution mais ne fait que s’y référer comme une à quelque chose de non négociable, ce qui est franchement un problème en soi.
La formulation vague de la résolution 194 des Nations Unies est si ambiguë qu’elle présente une sorte de faille qui donne aux pouvoirs politiques la possibilité d’ignorer totalement le droit des réfugiés palestiniens à revenir dans leurs foyers. Et pourtant, comme si l’ambiguïté de cette résolution n’était pas suffisante pour les États-Unis, ceux-ci ont également insisté sur l’ajout d’amendements qui obligeraient le peuple palestinien à renoncer à ses exigences initiales sur la Palestine historique, renonçant ainsi à leur revendication sur toute la Palestine et le droit de retour.
Il est également faux de penser que l’ampleur des injustices cesserait, parce que les Palestiniens renonceraient à leur droit sur la Palestine historique en échange de la création d’un État palestinien sur moins de 20 pour cent de la terre d’origine, avec Jérusalem-Est comme capitale. Les nouveaux amendements soulignent que Jérusalem serait la capitale conjointe des deux camps, une suggestion qui déclare finalement que les Israéliens ont un droit sur l’ensemble de Jérusalem et qui renvoie à la suggestion israélienne que l’Autorité palestinienne pourrait étendre son mandat sur Abu Dis et les quartiers environnants, situés juste à l’extérieur de Jérusalem.
Ainsi, il ne suffit pas d’empêcher les Palestiniens d’établir un État palestinien ou de leur permettre d’établir un semblant d’entité semi-souveraine et géographiquement fragmentée et composée de la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est. Les nouveaux amendements proposent maintenant de procéder à des échanges de terres et d’ignorer complètement le caractère illégitime des colonies israéliennes. Ces modifications non seulement ignorent entièrement les timides tentatives des Nations Unies de sauver les restes d’un État palestinien, mais elles impliquent en plus l’abandon de grands blocs de terres occupés par les colonies israéliennes, et l’annexion de la vallée du Jourdain entre autres régions voulues par Israël .
Afin d’empêcher le peuple palestinien d’exercer son droit à décider de son sort, deux nouveaux amendements ont été introduits, l’un d’eux interdisant aux deux côtés de prendre des décisions unilatérales, y compris la confiscation de terres, le déplacement de leurs propriétaires et les bombardements israéliens, mais ils interdisent aussi aux Palestiniens jusqu’à l’usage de la voie diplomatique et des forums internationaux, sapant toute tentative de résistance palestinienne.
Toutes ces mesures rendent caduques finalement tous les anciens résolutions internationales, y compris la quatrième Convention de Genève et de la Charte des Nations Unies.
[...]
Enfin, l’accent qui a été mis la sécurité d’Israël fournit une condition préalable à tout pas en avant, avec ou sans le veto des États-Unis. En résumé [cette résolution] entrave tout progrès et, surtout, rend le veto [américain] complètement hors de propos puisque les modifications mentionnées ci-dessus servent les intérêts israéliens.
L’administration palestinienne devrait immédiatement renoncer à déposer cette résolution.
* Lamis Andoni est analyste et commentatrice pour le Middle Eastern and Palestinian Affairs