Fadwa Nassar
6 septembre 2014
Nombreux sont les commentateurs internationaux, sionistes et même arabes, qui refusent d’admettre la victoire de la résistance au cours de la récente guerre sioniste contre la bande de Gaza, mettant en avant le nombre de victimes palestiniennes et les destructions massives ainsi que sur le plan militaire, la destruction de quelques tunnels « offensifs » (ceux qui débouchent dans les territoires occupés en 48) et l’assassinat de quelques dirigeants militaires de la résistance (notamment des mouvements Hamas et du Jihad islamique), la proclamation du cessez-le-feu avant la levée du blocus, l’attitude attentiste sinon collaboratrice de plusieurs régimes arabes avec l’agresseur. Certains ont d’ailleurs analysé la guerre comme si elle se déroulait entre deux forces militairement équivalentes et lorsque d’autres prenaient en compte la disparité des forces militaires en présence, c’est pour mieux déconsidérer la résistance, la jugeant incapable d’affronter la puissance sioniste, en insistant sur le peu de dégâts occasionnés par les fusées de la résistance, en comparaison avec les armes de l’ennemi. Mais ceux-là ont juste oublié de mentionner la portée psychologique et mentale de ces fusées, à court et long terme, sur une population coloniale habituée à se sentir en sécurité.
Il est vrai que les destructions infligées à Gaza et à sa population par l’agresseur sioniste sont incommensurables, mais elles traduisent la véritable nature de l’ennemi qui, depuis sa colonisation de la Palestine, n’a fait que détruire la Palestine, la société palestinienne et ses réalisations. Depuis 1947, avant même la fondation de cette entité coloniale, ce ne sont que destructions, expulsions, meurtres, massacres, une violence inouïe contre toute expression de la volonté palestinienne de récupérer son droit ou simplement de continuer à vivre en Palestine. De ce point de vue, clarifier la nature agressive et criminelle de l’entité coloniale demeure un des objectifs de la résistance palestinienne, de ses alliés et amis dans le monde. La violence exercée par les envahisseurs au cours de l’agression n’a fait que traduire la véritable nature de cette entité, qu’elle est parvenue parfois à masquer aux yeux de l’opinion internationale, à l’aide des puissances et des médias occidentaux. Elle a clairement indiqué qu’aucune « paix » n’est possible entre un Etat colonial et un peuple aspirant à la liberté, car tout règlement entre les envahisseurs et les peuples arabes signifie en réalité leur soumission et leur désagrégation.
Au-delà des massacres et des destructions, la victoire de la résistance à Gaza s’est manifestée par l’impossibilité de réaliser l’objectif de l’agression, consistant à déraciner la résistance palestinienne, détruire ses armes ou même essayer de les supprimer par le biais de décisions internationales. Il faut rappeler que c’est l’entité sioniste qui a déclenché l’agression et que la résistance a riposté, en utilisant son arsenal militaire, introduit et fabriqué sur place dans des conditions de blocus international. La résistance palestinienne n’a pas voulu la bataille, elle n’a fait que se défendre. Cependant, la capacité militaire de la résistance, développée depuis plusieurs années, a obligé l’entité coloniale à accepter un cessez-le-feu, sous les feux de la résistance. Quelques minutes avant l’entrée en action du cessez-le-feu, la résistance palestinienne lançait ses fusées sur Tel-Aviv, capitale de l’entité coloniale. Tout au long de l’agression, les résistants ont continué à fabriquer les fusées et les diverses munitions, se préparant à une longue guerre d’usure.
Depuis 1948, et pour la première fois, la résistance palestinienne réussit à s’armer de manière conséquente à l’intérieur du pays occupé pour affronter l’ennemi et riposter à ses agressions. Avant 1948, le peuple palestinien avait développé une résistance armée pour s’opposer au plan sioniste et avait mené des batailles conséquentes dans plusieurs villes, sur la côte (Yafa, Haïfa, entre autres) ou dans l’intérieur (al-Quds et ses environs). Après la Nakba, le peuple palestinien n’est parvenu qu’à introduire quelques armes et explosifs, outre ceux qu’il pouvait obtenir des dépôts de l’ennemi. C’est dans les milieux des réfugiés que la résistance avait réussi à s’armer de manière importante et c’est des pays frontaliers (Liban, Jordanie, Syrie ou Egypte) que les fidayin entraient dans leur pays pour mener des opérations offensives contre la présence sioniste en Palestine. Si les accords d’Oslo en 1993 ont autorisé l’Autorité palestinienne à posséder quelques armes, mis entre les mains des services sécuritaires, la personnalité de Yasser Arafat, qui a compris la mystification sioniste, a permis de développer un armement plus important et des membres des services sécuritaires ont participé à certaines batailles lors de l’Intifada al-Aqsa. Lors de la glorieuse bataille du camp de Jénine, menée en 2002, les résistants ne possédaient que quelques armes et ont manqué de munitions, ce qui a entraîné la chute militaire du camp, après avoir infligé de lourdes pertes à l’armée sioniste. C’est pourquoi la présence de résistants armés et le développement de l’armement de la résistance, sur le sol même de la Palestine, depuis une dizaine d’années, sont d’une grande importance puisqu’ils instaurent dans la conscience et dans les faits que la résistance armée est non seulement possible, mais indispensable et incontournable.
Le blocus contre la bande de Gaza et les tentatives sionistes pour l’isoler et la couper du reste de la Palestine sont des manœuvres pour empêcher la résistance armée de s’étendre vers les autres territoires occupés. L’ennemi a échoué à détruire militairement cette résistance armée, mais il poursuit ses manœuvres sur les plans politique et sécuritaire, profitant de la situation régionale et internationale, tantôt en voulant contrôler la reconstruction de Gaza, tantôt en voulant isoler la résistance, en insistant sur le Hamas et en fomentant des troubles entre ce dernier et l’Autorité palestinienne. Mais la résistance n’est pas seulement le Hamas, et la popularité de la résistance au sein des masses palestiniennes et arabes va au-delà de la popularité de Hamas. Ce qui signifie que le Hamas ne peut être isolé, étant donné qu’il est une partie intégrante de la résistance.
La période qui s’ouvre après la bataille victorieuse de Gaza n’est comparable à aucune autre période : la présence armée palestinienne à l’intérieur des frontières de la Palestine instaure une nouvelle guerre de libération, et désormais, toute la superficie de la Palestine occupée est une cible possible de la résistance. La popularité de la résistance qui s’est affirmée lors de la bataille de Gaza indique que seule la lutte armée est porteuse d’avenir pour les Palestiniens et les peuples arabes. Les difficultés internes de l’entité sioniste indiquent l’impasse de toute entreprise coloniale lorsque le peuple se défend par les armes. Par ailleurs, l’Autorité palestinienne issue des accords d’Oslo et affaiblie n’est plus crédible aux yeux des sionistes, des USA, des pays européens et de pays arabes, qui l’accusent d’avoir failli à sa tâche. Les accords d’Oslo ont été enterrés, malgré les gesticulations ridicules de son président, et le mouvement du Fateh, coincé entre la résistance qu’il proclame et son président qu’il affirme soutenir, vit des moments extrêmement difficiles.
Il est certain que la résistance à Gaza n’a pas libéré la Palestine, ni un bout de territoire de la Palestine, et le chemin reste à parcourir. Mais il est aussi certain qu’elle a ébranlé des fondements de l’entité sioniste, puisqu’elle a précipité le départ définitif de milliers de colons (jeunes et laïcs surtout) et que ceux vivant dans la « couronne » de Gaza ne veulent plus y retourner, par manque de confiance dans leurs dirigeants. Et comme l’a déclaré dr. Ramadan Shallah, secrétaire général du mouvement du Jihad islamique en Palestine, lors de la conférence de presse de la victoire, la bataille de Gaza a instauré les fondements de la bataille ultime pour libérer la Palestine. Aucune décision ne pourra la contourner ou nier sa présence, qu’elle soit internationale ou régionale. Elle se prépare déjà aux batailles prochaines et a l’intention de s’étendre vers le reste de la Palestine.
Transmis par l'auteur