Par Omar Barghouti
En dépit du siège de Gaza par Israël et du déplacement accru de populations dans le Néguev et à Jérusalem Est, les Palestiniens ont quelques raisons de se réjouir. A Washington, une coopérative alimentaire a voté une résolution appelant au boycott des produits israéliens (1), confirmant que le mouvement de boycott – cinq ans le mois dernier – a finalement traversé l’Atlantique. Le soutien à la démarche est venu de personnalités éminentes, dont les prix Nobel Desmond Tutu et Máiread Maguire, et du rapporteur spécial des Nations Unies pour les territoires palestiniens, Richard Falk.
Le Mouvement pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BDS) contre Israël a été lancé en 2005, un an après que la Cour Internationale de Justice ait déclaré que le mur et les colonies construits par Israël sur le territoire palestinien occupé étaient illégaux. Plus de 170 partis politiques, syndicats, mouvements de masse et ONG palestiniens ont approuvé le mouvement, qui est dirigé par le BNC, une coalition d’organisations de la société civile.
Enracinée dans un siècle de résistance civile palestinienne, et inspirée par la lutte anti-apartheid, la campagne a chapeauté des boycotts précédents, partiaux, pour présenter une approche globale pour la réalisation de l’autodétermination palestinienne : unifier les Palestiniens en Palestine historique et en exil, en face d’une accélération de la fragmentation.
BDS évite la prescription de tout programme politique particulier et insiste, au contraire, sur la réalisation des droits fondamentaux, reconnus par les Nations Unies, qui correspondent aux trois principaux segments du peuple palestinien : mettre fin à l’occupation et à la colonisation israéliennes de toutes les terres occupées depuis 1967 ; mettre fin à la discrimination raciale contre les citoyens palestiniens ; et reconnaître le droit des réfugiés palestiniens à revenir chez eux, comme stipulé par la Résolution 194 des Nations Unies.
Créé et dirigé par des Palestiniens, BDS combat toutes formes de racisme, y compris l’antisémitisme, et est ancré dans les principes universels de liberté, de justice et d’égalité des droits qui a motivé les luttes antiapartheid et pour les droits civiques aux Etats-Unis.
Caractériser le système légalisé d’Israël de discrimination comme étant de l’apartheid – comme l’ont fait Tutu, Jimmy Carter et même un ancien procureur général israélien (2) – ne met pas Israël sur le même plan que l’Afrique du Sud. Les deux régimes oppressifs ne sont pas identiques. L’attribution par Israël de droits et de privilèges en fonction de critères ethniques et religieux correspond à la définition de l’apartheid définie par les Nations-Unies.
BDS a connu une croissance sans précédent après la guerre d’agression contre Gaza et l’attaque de la flottille. Des gens de conscience du monde entier semblent avoir franchi un seuil, recourant à la pression, et non à l’apaisement ou à « l’engagement constructif », pour mettre fin à l’impunité d’Israël et à la collusion occidentale qui maintiennent son statut d’Etat au-dessus des lois.
« Assiéger votre siège » - le cri du poète palestinien Mahmoud Darwish – prend un nouveau sens dans ce contexte. Parce que convaincre une puissance coloniale de tenir compte d’arguments moraux pour la justice est, au mieux, délirant, beaucoup comprennent maintenant qu’il est nécessaire de « assiéger » Israël par des boycotts pour augmenter le prix de son oppression.
Les militants BDS ont réussi à convaincre des institutions financières en Scandinavie, en Allemagne et ailleurs, de se désinvestir de compagnies complices des violations israéliennes du droit international. Plusieurs syndicats internationaux ont endossé le boycott. A la suite de l’attaque de la flottille, des syndicats de dockers en Suède, en Inde, en Turquie et aux Etats-Unis ont repris un appel des syndicats palestiniens de bloquer le déchargement des navires israéliens.
Les soutiens à BDS par des personnalités culturelles comme John Berger, Naomi Klein, Iain Bnaks et Alice Walker, et la vague d’annulations d’événements en Israël par des artistes, dont Meg Ryan, Elvis Costello, Gil Scott-Heron et les Pixies ont promu le caractère international du mouvement, le rapprochant du courant principal occidental. Le scepticisme sur son potentiel n’est plus de mise.
Le Boycott de l’Intérieur (“Boycott from Within”), un mouvement de protestation important en Israël aujourd’hui, a été créé en 2009 pour adopter l’appel BDS palestinien.
Un projet de loi qui imposerait de lourdes amendes aux Israéliens qui s’engageraient ou inciteraient à des boycotts contre Israël a été récemment adopté en première lecture à la Knesset. Cela souligne les craintes d’Israël vis-à-vis de la portée mondiale et de l’impact de BDS comme campagne non violente, moralement cohérente pour la justice. A bien des égards, cela souligne que le « moment sud-africain » palestinien est arrivé.
Omar Barghouti
(1) “Food co-op in Rachel Corrie's hometown boycotts Israeli goods”, par Natasha Mozgovaya, Ha’aretz, 20 juillet 2010
(2) “The war's seventh day”, par Michael Ben-Yair, Ha’aretz, 3 mars 2002
Le Mouvement pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BDS) contre Israël a été lancé en 2005, un an après que la Cour Internationale de Justice ait déclaré que le mur et les colonies construits par Israël sur le territoire palestinien occupé étaient illégaux. Plus de 170 partis politiques, syndicats, mouvements de masse et ONG palestiniens ont approuvé le mouvement, qui est dirigé par le BNC, une coalition d’organisations de la société civile.
Enracinée dans un siècle de résistance civile palestinienne, et inspirée par la lutte anti-apartheid, la campagne a chapeauté des boycotts précédents, partiaux, pour présenter une approche globale pour la réalisation de l’autodétermination palestinienne : unifier les Palestiniens en Palestine historique et en exil, en face d’une accélération de la fragmentation.
BDS évite la prescription de tout programme politique particulier et insiste, au contraire, sur la réalisation des droits fondamentaux, reconnus par les Nations Unies, qui correspondent aux trois principaux segments du peuple palestinien : mettre fin à l’occupation et à la colonisation israéliennes de toutes les terres occupées depuis 1967 ; mettre fin à la discrimination raciale contre les citoyens palestiniens ; et reconnaître le droit des réfugiés palestiniens à revenir chez eux, comme stipulé par la Résolution 194 des Nations Unies.
Créé et dirigé par des Palestiniens, BDS combat toutes formes de racisme, y compris l’antisémitisme, et est ancré dans les principes universels de liberté, de justice et d’égalité des droits qui a motivé les luttes antiapartheid et pour les droits civiques aux Etats-Unis.
Caractériser le système légalisé d’Israël de discrimination comme étant de l’apartheid – comme l’ont fait Tutu, Jimmy Carter et même un ancien procureur général israélien (2) – ne met pas Israël sur le même plan que l’Afrique du Sud. Les deux régimes oppressifs ne sont pas identiques. L’attribution par Israël de droits et de privilèges en fonction de critères ethniques et religieux correspond à la définition de l’apartheid définie par les Nations-Unies.
BDS a connu une croissance sans précédent après la guerre d’agression contre Gaza et l’attaque de la flottille. Des gens de conscience du monde entier semblent avoir franchi un seuil, recourant à la pression, et non à l’apaisement ou à « l’engagement constructif », pour mettre fin à l’impunité d’Israël et à la collusion occidentale qui maintiennent son statut d’Etat au-dessus des lois.
« Assiéger votre siège » - le cri du poète palestinien Mahmoud Darwish – prend un nouveau sens dans ce contexte. Parce que convaincre une puissance coloniale de tenir compte d’arguments moraux pour la justice est, au mieux, délirant, beaucoup comprennent maintenant qu’il est nécessaire de « assiéger » Israël par des boycotts pour augmenter le prix de son oppression.
Les militants BDS ont réussi à convaincre des institutions financières en Scandinavie, en Allemagne et ailleurs, de se désinvestir de compagnies complices des violations israéliennes du droit international. Plusieurs syndicats internationaux ont endossé le boycott. A la suite de l’attaque de la flottille, des syndicats de dockers en Suède, en Inde, en Turquie et aux Etats-Unis ont repris un appel des syndicats palestiniens de bloquer le déchargement des navires israéliens.
Les soutiens à BDS par des personnalités culturelles comme John Berger, Naomi Klein, Iain Bnaks et Alice Walker, et la vague d’annulations d’événements en Israël par des artistes, dont Meg Ryan, Elvis Costello, Gil Scott-Heron et les Pixies ont promu le caractère international du mouvement, le rapprochant du courant principal occidental. Le scepticisme sur son potentiel n’est plus de mise.
Le Boycott de l’Intérieur (“Boycott from Within”), un mouvement de protestation important en Israël aujourd’hui, a été créé en 2009 pour adopter l’appel BDS palestinien.
Un projet de loi qui imposerait de lourdes amendes aux Israéliens qui s’engageraient ou inciteraient à des boycotts contre Israël a été récemment adopté en première lecture à la Knesset. Cela souligne les craintes d’Israël vis-à-vis de la portée mondiale et de l’impact de BDS comme campagne non violente, moralement cohérente pour la justice. A bien des égards, cela souligne que le « moment sud-africain » palestinien est arrivé.
Omar Barghouti
(1) “Food co-op in Rachel Corrie's hometown boycotts Israeli goods”, par Natasha Mozgovaya, Ha’aretz, 20 juillet 2010
(2) “The war's seventh day”, par Michael Ben-Yair, Ha’aretz, 3 mars 2002