Plusieurs Etats européens s’apprêtent à reconnaître symboliquement un Etat palestinien. On peut se demander quelle motivation anime aujourd’hui ces Etats alors qu’aucun d’entre eux n’a eu le moindre geste symbolique pour dénoncer les massacres commis par les sionistes à Gaza au cours de l’été 2014.
Dans les médias occidentaux, on nous présente cette initiative partie de Suède comme un enjeu majeur vers le règlement du conflit. Pourtant un Etat palestinien est déjà reconnu par l’immense majorité des pays du monde, sans que cela ne change absolument rien sur le terrain. Il semble alors nécessaire de s’interroger sur la signification d’une telle démarche de la part de quelques ex-puissances coloniales, qui soutiennent de manière fervente le sionisme et l’Etat d’Israël. Il faut aussi se demander pourquoi maintenant et quelles peuvent en être les conséquences.
Mais d’abord de quel Etat parle-t-on ? L’ « Etat palestinien » que s’apprêtent à reconnaître quelques Etats européens est un territoire aux frontières non définies englobant une portion minime du territoire de Palestine, sans aucune souveraineté, sous occupation militaire et truffé de colonies toujours plus nombreuses où sont installés près de 600.000 colons juifs. C’est un territoire administré par des dirigeants illégitimes et corrompus, non élus et non mandatés par le peuple palestinien pour négocier sur ce point sans tenir compte des revendications nationales. Il s’agit de donner le statut d’Etat à des portions de territoire sous administration de l’Autorité Palestinienne, donnant ainsi l’illusion que le processus d’Oslo a eu quelques effets bénéfiques. Mais quid d’al-Quds comme capitale, chaque jour plus isolée du reste de la Cisjordanie en raison de la colonisation galopante ? Quid du retour des réfugiés, du démantèlement des colonies, de la libération des prisonniers politiques, lors de la reconnaissance de cet Etat fantoche ? Nul ne le sait.
Par cette démarche, l’Europe croit encore pouvoir ressusciter un « processus de paix » mort depuis longtemps et sauver l’Etat sioniste avant qu’il ne soit trop tard. Cette entité est la base avancée de l’impérialisme dans la région et tout doit être mis en œuvre pour protéger son existence. Les déclarations des dirigeants politiques, notamment en France, sont claires. Ils agissent pour la « sécurité d’Israël ». Cette reconnaissance vise aussi à apporter un soutien à Mahmoud Abbas et à ses acolytes collaborationnistes de l’Autorité Palestinienne qui se trouvent dans une posture particulièrement défavorable après la victoire de la résistance armée à Gaza.
Effectivement il n’est pas anodin que cette reconnaissance (ou non) apparaisse actuellement comme une priorité dans l’agenda politique des Etats européens alors que cette question n’avait pas engendré de réaction majeure de leur part lorsqu’elle avait été soumise à l’ONU en 2011. Il faut dire que la situation sur le terrain a bien changé. Depuis cette date, l’entitésioniste s’est particulièrement affaiblie. Elle a multiplié les échecs militaires face à la résistance palestinienne qui a quant à elle, intensifié sa force de frappe, comme elle a pu le montrer au cours de l’été 2014. Jamais auparavant, l’entité sioniste n’avait été déstabilisée à ce point par la résistance.
Il semble par ailleurs que la volonté d’unité palestinienne n’ait jamais été aussi forte que maintenant. Le peuple est unanimement aux côtés de la résistance armée et la coordination des organisations de la résistance a montré son efficacité sur le plan militaire, même si cela a du mal à se traduire pour l’instant en acquis politiques. En réponse à la poursuite de la colonisation sioniste en Cisjordanie , à la judéisation galopante d’al-Quds et aux menaces sur la mosquée al-Aqsa, la jeunesse palestinienne n’a plus rien à perdre face à l’occupant. Elle est déterminée à résister à la dépossession par tous les moyens à sa disposition. De plus, les puissances occidentales n’ont pas réussi à venir à bout des pays qui leur résistent comme l’Iran et la Syrie, ou des mouvements de résistance comme le Hezbollah libanais. La vitalité actuelle de la résistance palestinienne à Gaza, mais aussi l’éventualité d’une nouvelle Intifada en Cisjordanie et à al-Quds, représentent une menace centrale pour le camp impérialiste dans la région. Tout doit être mis en œuvre pour empêcher la résistance de se structurer et d’agir.
Mais les considérations de politiques étrangères n’expliquent pas à elles seules la démarche. Au cours de l’été 2014, les Etats européens ont pu mesurer une nouvelle fois le fossé entre leur soutien indéfectible à l’entitésioniste et l’immense solidarité populaire envers la résistance palestinienne, exprimée notamment par les populations arabo-musulmanes. Ce fut particulièrement le cas en France où le gouvernement socialiste a interdit plusieurs manifestations de soutien et continue à menacer des militants de la cause palestinienne. La reconnaissance de l’Etat palestinien portée à l’Assemblée nationale par quelques députés de gauche ne semble être qu’une manœuvre politicienne pour tenter de séduire l’électorat populaire qu’elle a perdu cet été.
Il ne fait aucun doute que cette reconnaissance ne traduit en rien une soudaine prise de conscience de la justesse de la cause palestinienne pour les Etats européens. Qui plus est, la création d’un Etat palestinien fictif constituerait un véritable piège pour les Palestiniens. La création de cet « Etat » figerait une situation coloniale en violant le droit à l’autodétermination et au retour des réfugiés palestiniens dans leurs foyers. On peut parier que les Etats européens agissent en toute connaissance de cause au profit de l’entité sioniste car ils savent parfaitement que la création d’un Etat palestinien, même dans les frontières de 67, est impossible. Impossible car la puissance occupante n’en veut pas, et les faits sur le terrain révèlent ses véritables intentions. D’un côté, la colonisation se poursuit inexorablement et de l’autre, le parlement sioniste vote des lois définissant officiellement l’entité sioniste comme l’ « Etat-nation de tous les juifs du Monde ». L’objectif est clair : finir ce qui a été commencé en 1948 !
Le mouvement de solidarité a la responsabilité de ne pas se laisser berner par ce marché de dupes et par des concepts vides imposés par les puissances occidentales. Toute autre posture relève de la naïveté ou de l’immaturité politique. Il faut se concentrer sur les strictes revendications nationales du peuple palestinien que sont le droit à l’autodétermination et le droit au retour des réfugiés. Il faut soutenir inconditionnellement la résistance pour la libération totale de la terre arabe de Palestine. La volonté palestinienne est là, et nulle part ailleurs !
COMITE ACTION PALESTINE
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Source : Comité Action Palestine