Palestine – CPI
En dix jours, beaucoup de choses
pourraient changer, beaucoup d’événements pourraient se produire. S’il
n’y a pas de surprises de dernière minute, à la fin de la semaine
prochaine, un accord historique sera signé entre Khaled Mechaal,
président du bureau politique du mouvement islamique du Hamas, et
Mahmoud Abbas, président de l’autorité palestinienne, un accord
concernant les élections législatives et présidentielles qui auront lieu
en mai 2012 (six ans après les précédentes élections législatives et
sept ans après l’élection d’Abbas). Les deux hommes se rencontreroent
sous l’égide du service égyptien des renseignements. Les contacts,
jusque-là secrets, ont pris place dans la capitale égyptienne, sous
l’égide de la même personne qui était derrière la réussite de la
transaction de Gilad Shalit : Nader Al-Asser, ancien consul égyptien en
"Israël".
L’accord de principe a déjà été signé par
Azzam Al-Ahmed, représentant du Fatah, et Moussa Abou Marzouq,
vice-président du bureau politique du mouvement du Hamas, qui s’étaient
discrètement rendus au Caire, récemment. Hier, Al-Ahmed a déclaré que
les élections auraient lieu dans le courant du mois de mai et qu’il y
aurait un gouvernement d’experts, non présidé par Salam Fayyad. En
effet, c’était la volonté insistante d’Abbas à ce que Fayyad préside le
gouvernement provisoire jusqu’aux élections qui mettait des bâtons dans
les roues de l’accord. Mais à cause d’agissements du gouvernement
israélien, Abbas a commencé, depuis quelques mois, à comprendre qu’il
était insensé de préférer Fayyad.
En fait, Abbas insistait sur Fayyad afin
que les Etats-Unis continuent à donner des fonds, ainsi que la
communauté internationale et "Israël". Maintenant, il a compris que le
gouvernement israélien ne se précipite pas à transférer l’argent des
taxes appartenant aux Palestiniens. Et parallèlement, le Congres
américain rendrait difficile l’arrivée d’aides financières à l’autorité
palestinienne, à cause de son orientation vers les Nations Unies. Abbas a
alors compris qu’il n’avait rien à perdre en laissant tomber Fayyad.
En outre, Abbas ne s’attend pas à grande
chose du gouvernement israélien actuel ; il ne lui reste que la
réconciliation entre les deux mouvements. Il n’est pas impossible qu’une
raison personnelle ait influencé la décision d’Abbas ; quasiment toute
personne qui a récemment rencontré Abbas l’a entendu dire qu’il
n’entrerait pas en compétition, dans les prochaines élections
présidentielles ; il préférerait se concentrer sur sa vie privée. Et
pour ce qui est du Hamas, il avait jusqu’à maintenant peur des
élections ; mais maintenant, plusieurs voix croient que le mouvement
gagnera aux élections prochaines pour diverses raisons :
Premièrement : la transaction de Shalit a renforcé la position du Hamas.
Deuxièmement : le printemps arabe, qui
devient de plus en plus un printemps islamique. La victoire du parti
An-Nahda en Tunisie et la victoire très possible des Frères Musulmans en
Egypte auraient des effets positifs sur le Hamas.
Troisièmement : le mouvement de la
résistance islamique Hamas sait qu’actuellement, le mouvement du Fatah
n’a pas de candidat avec la même popularité que celle d’Abbas. Il sera
même logique que le Hamas remporte les élections présidentielles.
Toutefois, plusieurs questions resteront
actuellement ouvertes. On ne sait pas trop qui remplacera Fayyad.
Quelques noms sont proposés, dont celui du milliardaire palestinien
Monib Al-Masri et Mohammed Mustapha, ancien conseiller économique
d’Abbas.
Cette fois, le nouveau premier ministre ne
pourrait rester dans son poste plus de six mois ou forcer le
gouvernement israélien à transférer l’argent à la caisse de l’autorité.
La question gênante est de savoir qui pourrait remplacer Abbas, s’il ne
voulait pas se présenter. C’est une question épineuse pour le mouvement
du Fatah, car le seul homme qui pourrait assurer la victoire du Fatah
contre le Hamas serait Marwan Al-Barghouthi, condamné à cinq perpétuités
dans les prisons israéliennes.
Notons enfin que même si Mechaal et Abbas
arrivent à un accord sur les élections en mai prochain, à un accord sur
la personne du premier ministre, on ne parle d’une réelle
réconciliation, car la route est longue et escarpée. Admettons que les
deux mouvements arrivent au mois de mai et aux élections en paix, il
n’est pas sûr que la victoire d’un de ces mouvements fasse disparaître
les éléments essentiels de la division palestinienne : le Hamas ne
désarmera pas ses hommes dans la bande de Gaza ; le Fatah ne se hâtera
pas de laisser tomber les services de sécurité et la mainmise exclusive
sur la Cisjordanie. Après quatre ans et demi de division, il n’est pas
certain que les élections puissent faire disparaître les haines et les
séquelles qui se sont accrues au fil du temps.
Article écrit par Avi Yamskharov,
dans le journal hébreu Haaretz, le 18 novembre 2011, traduit et résumé
par le département français du Centre Palestinien d’Information (CPI)