Gaza - 16 juin 2011
Par Cheikh Abu Musab
Entretien réalisalé par Michele Giorgio, édition de mercredi 15 juin de il manifesto
Les ravisseurs de Vittorio Arigoni se sont déclarés membres de Al Tawhid wal Jihad, formation qaediste qui a fait son apparition il y a à peine plus de deux ans à Gaza, et a formé ses propres cellules, souvent en compétition si ce n’est en opposition au Hamas (qu’elle accuse de ne pas appliquer le « véritable Islam »). Elles ont affirmé avoir séquestrer Vittorio dans le but d’obtenir la libération du cheikh égyptien al-Saidani, connu aussi sous le nom de Abu Walid al-Maqdisi, arrêté un mois auparavant. Tawhid al Jihad a nié être impliquée dans l’enlèvement de l’activiste italien mais, à Gaza, on continue à parler des liens entre ce groupe qaediste et les ravisseurs. Le cheikh Abu Musad, un des leaders de Tawhid wal Jihad, a accepté de répondre aux questions du manifesto sur l’enlèvement d’Arrigoni. Il nous reçoit, mitraillette et visage en partie dissimulé par un keffieh, dans le camp de réfugiés de Jabaliya au nord de Gaza.
Vous niez avoir un rôle dans la séquestration et l’assassinat de V. Arrigoni, et on continue pourtant à vous mettre en cause.
Quelqu’un veut nous impliquer à tout prix dans cet affaire mais Tawhid wal Jihad n’a planifié ou participé en aucune manière à la séquestration de l’activiste italien. Notre démenti a été immédiat, nous avons immédiatement clarifié notre position : les ravisseurs ne faisaient pas partie de notre projet de jihad. Ces jeunes ont utilisé notre nom parce qu’il est connu et qu’ils voulaient se faire connaître.
Cependant le Jordanien Abdel Rahman Breizat, le cerveau de l’enlèvement, était proche de votre organisation.
Oui, mais jusqu’à un certain point. Beaucoup de nos combattants le connaissaient. C’était un garçon dévot qui voulait faire de la Palestine le point de départ d’une nouvelle renaissance de l’Islam, pour la victoire du jihad in dar al Islam. Mais il n’a jamais fait partie de la structure de Tawhid wal Jihad ; c’était un extérieur et tout ce qu’il a fait il l’a organisé avec ses amis (ceux qui ont séquestré Vittorio, ndr) à notre insu.
Mais vous, vous connaissiez personnellement Breizat ?
Bien sûr, parce que dès son arrivée à Gaza (au début de 2010, ndr) il avait immédiatement pris contact avec la salafiyya (les cellules quaedistes de Gaza qui se réfèrent au salafisme, ndr). Je me souviens d’avoir parlé plusieurs fois avec lui, de la grandeur du prophète (Mohammed) et des devoirs des musulmans. Il insistait beaucoup sur l’absence de respect de la part des peuples musulmans des préceptes coraniques et des enseignements du prophète. Il était irrité par l’indifférence de beaucoup de musulmans envers la religion.
Mais qu’avait à voir Vittorio Arrigoni avec cela, il n’était pas musulman…
Je crois que sa séquestration servait à Breizat et à ses amis pour affirmer l’existence de leur cellule, de leur groupe. En échange de sa libération, il a demandé la libération du cheikh Al Saidani, arrêté injustement seulement pour avoir parlé au nom de l’islam. Breizat a mis sur pied une opération spectaculaire pour se faire de la publicité.
Vous parlez de libération et d’échange de prisonniers mais Vittorio a été tué immédiatement, les ravisseurs n’ont même pas respecté l’ultimatum qu’ils avaient lancé.
Parce que Breizat et ses confrères ont organisé quelque chose qu’ils n’ont pas été en mesure de gérer. Ils ont immédiatement été sous pression, ils se sont sentis pris au piège et ont tué leur otage.
Mais l’enlèvement advenu le soir du 13 avril n’a été connu que peu avant le soir du 14 et la police de Hamas est intervenue quand la nuit était tombée. Selon une thèse, Vittorio Arigoni pourrait avoir été tué au début de l’après-midi, peut-être était-il déjà mort ou dans le coma dans la vidéo postée par les ravisseurs.
La pression n’est pas venue que de la police et des enquêtes mais aussi de l’impréparation, du manque d’organisation mentale et militaire. Gérer un enlèvement est complexe et seul un groupe déterminé et bien structuré peut le conduire. Breizat et ses compagnons ont peut-être perdu la tête.
Et que dites-vous des rumeurs sur une gestion occulte, depuis le Sinaï semble-t-il, de l’enlèvement ?
Je ne sais rien de tout cela mais je ne peux pas exclure que Breizat ait quelqu’un au-dessus de lui, quelqu’un qui l’a convaincu d’agir et de frapper cet Italien. Peut-être le Mossad est-il derrière tout cela. Je peux dire avec certitude seulement que Tawhid wal Jihad n’a pas enlevé Vittorio Arrigoni.
Vous connaissiez Arrigoni, vous étiez au courant de sa présence et de ses activités à Gaza ?
Je l’avais vu une fois à bord d’une ambulance dans le nord de Gaza pendant l’agression sioniste (l’offensive israélienne « Plomb durci », décembre 2008-janvier 2009). Parfois quelqu’un me parlait de lui. Pour moi, c’était un ami des Palestiniens et pas un ennemi de l’Islam. Son assassinat a été un crime. Nous ne nous opposons pas à la présence des occidentaux à Gaza, s’ils viennent pour aider les Palestiniens et les musulmans, on ne doit pas les toucher. Notre religion les protège.
Quelqu’un veut nous impliquer à tout prix dans cet affaire mais Tawhid wal Jihad n’a planifié ou participé en aucune manière à la séquestration de l’activiste italien. Notre démenti a été immédiat, nous avons immédiatement clarifié notre position : les ravisseurs ne faisaient pas partie de notre projet de jihad. Ces jeunes ont utilisé notre nom parce qu’il est connu et qu’ils voulaient se faire connaître.
Cependant le Jordanien Abdel Rahman Breizat, le cerveau de l’enlèvement, était proche de votre organisation.
Oui, mais jusqu’à un certain point. Beaucoup de nos combattants le connaissaient. C’était un garçon dévot qui voulait faire de la Palestine le point de départ d’une nouvelle renaissance de l’Islam, pour la victoire du jihad in dar al Islam. Mais il n’a jamais fait partie de la structure de Tawhid wal Jihad ; c’était un extérieur et tout ce qu’il a fait il l’a organisé avec ses amis (ceux qui ont séquestré Vittorio, ndr) à notre insu.
Mais vous, vous connaissiez personnellement Breizat ?
Bien sûr, parce que dès son arrivée à Gaza (au début de 2010, ndr) il avait immédiatement pris contact avec la salafiyya (les cellules quaedistes de Gaza qui se réfèrent au salafisme, ndr). Je me souviens d’avoir parlé plusieurs fois avec lui, de la grandeur du prophète (Mohammed) et des devoirs des musulmans. Il insistait beaucoup sur l’absence de respect de la part des peuples musulmans des préceptes coraniques et des enseignements du prophète. Il était irrité par l’indifférence de beaucoup de musulmans envers la religion.
Mais qu’avait à voir Vittorio Arrigoni avec cela, il n’était pas musulman…
Je crois que sa séquestration servait à Breizat et à ses amis pour affirmer l’existence de leur cellule, de leur groupe. En échange de sa libération, il a demandé la libération du cheikh Al Saidani, arrêté injustement seulement pour avoir parlé au nom de l’islam. Breizat a mis sur pied une opération spectaculaire pour se faire de la publicité.
Vous parlez de libération et d’échange de prisonniers mais Vittorio a été tué immédiatement, les ravisseurs n’ont même pas respecté l’ultimatum qu’ils avaient lancé.
Parce que Breizat et ses confrères ont organisé quelque chose qu’ils n’ont pas été en mesure de gérer. Ils ont immédiatement été sous pression, ils se sont sentis pris au piège et ont tué leur otage.
Mais l’enlèvement advenu le soir du 13 avril n’a été connu que peu avant le soir du 14 et la police de Hamas est intervenue quand la nuit était tombée. Selon une thèse, Vittorio Arigoni pourrait avoir été tué au début de l’après-midi, peut-être était-il déjà mort ou dans le coma dans la vidéo postée par les ravisseurs.
La pression n’est pas venue que de la police et des enquêtes mais aussi de l’impréparation, du manque d’organisation mentale et militaire. Gérer un enlèvement est complexe et seul un groupe déterminé et bien structuré peut le conduire. Breizat et ses compagnons ont peut-être perdu la tête.
Et que dites-vous des rumeurs sur une gestion occulte, depuis le Sinaï semble-t-il, de l’enlèvement ?
Je ne sais rien de tout cela mais je ne peux pas exclure que Breizat ait quelqu’un au-dessus de lui, quelqu’un qui l’a convaincu d’agir et de frapper cet Italien. Peut-être le Mossad est-il derrière tout cela. Je peux dire avec certitude seulement que Tawhid wal Jihad n’a pas enlevé Vittorio Arrigoni.
Vous connaissiez Arrigoni, vous étiez au courant de sa présence et de ses activités à Gaza ?
Je l’avais vu une fois à bord d’une ambulance dans le nord de Gaza pendant l’agression sioniste (l’offensive israélienne « Plomb durci », décembre 2008-janvier 2009). Parfois quelqu’un me parlait de lui. Pour moi, c’était un ami des Palestiniens et pas un ennemi de l’Islam. Son assassinat a été un crime. Nous ne nous opposons pas à la présence des occidentaux à Gaza, s’ils viennent pour aider les Palestiniens et les musulmans, on ne doit pas les toucher. Notre religion les protège.
Source : Il Manifesto
Traduction : Marie-Ange Patrizio