Kharroubi Habib - Le Quotidien d’Oran
Aussitôt annoncé par Alain Juppé, le ministre français des Affaires étrangères, le projet de Paris d’organiser dans l’Hexagone une conférence internationale en vue de remettre sur les rails le processus en panne des négociations de paix au Proche-Orient, est mort et enterré.
Sa mise à mort n’est pas le fait des Palestiniens, qui pourtant attendaient autre chose de la France, mais de Barack Obama et de sa secrétaire d’État, Hillary Clinton, qui ont opposé une fin de non-recevoir brutale à l’initiative française. Alain Juppé a pourtant plaidé que le projet de conférence internationale a pour but de faire renoncer Mahmoud Abbas et la direction palestinienne à leur intention de saisir l’Assemblée générale des Nations unies à l’effet de la reconnaissance internationale de l’État palestinien sur la base des frontières de 1967. Option dont ne veulent entendre ni le gouvernement d’Israël ni Washington.
Les Américains n’apprécient manifestement pas que la France veuille s’ingérer dans le dossier palestino-israélien, même avec l’intention d’éviter la saisine des Nations unies à laquelle ils s’opposent. C’est peu dire que Barack Obama a en l’occurrence infligé un humiliant désaveu au président français, qui veut à tout prix donner l’impression que la diplomatie française a son mot à dire sur les grands problèmes internationaux et celui du conflit du Proche-Orient principalement. Cette même diplomatie dont son chef, Alain Juppé, a dit qu’elle est prête à affronter le « veto » de la Russie sur le projet qu’elle a introduit avec d’autres puissances occidentales auprès du Conseil de sécurité en vue de faire condamner le régime syrien à cause des violences de sa répression des manifestations populaires en cours dans le pays.
Va-t-elle faire preuve de la même détermination à l’égard du « no » catégorique opposé par Washington à son projet de conférence internationale ? Va-t-elle surtout afficher son « indépendance » vis-à-vis de la politique américaine en se ralliant à l’intention de la direction palestinienne de porter la question de l’État palestinien devant l’Assemblée générale de l’ONU ?
En tout cas, Hillary Clinton a clairement fait comprendre aux Palestiniens et à la France que l’Amérique entend rester seule maîtresse du jeu dans le conflit du Proche-Orient et que toute démarche impliquant un autre processus que le tête-à-tête palestino-israélien sous « médiation » américaine est nulle et non avenue.
Benyamin Netanyahu, qui n’a même pas daigné commenter l’annonce du projet français, doit jubiler au camouflet que la secrétaire d’État a infligé à ses promoteurs, qui à ses yeux ne sont pas des alliés sûrs d’Israël pour la raison qu’ils prennent, même timidement, quelque distance avec la politique israélienne de rejet intransigeant des demandes palestiniennes.
Quant à Mahmoud Abbas, qui fonde de trop grands espoirs sur le rôle de la France dans le conflit palestino-israélien, il lui faut réviser ses calculs et ne compter que sur les capacités de son peuple à déjouer la stratégie d’enfermement que les États-Unis et Israël veulent leur imposer. Mahmoud Abbas doit désormais démontrer au monde qu’il s’exprime et agit au nom de tout le peuple palestinien et, pour ce faire, resserrer et consolider l’unité nationale de celui-ci en accentuant le processus de réconciliation dans lequel se sont engagés les différents courants politiques palestiniens.
Sarkozy n’avait d’intention dans ses rapports avec l’Autorité palestinienne que de donner l’illusion à l’opinion française d’être le seul chef d’État occidental ayant l’écoute des parties dans le conflit au Proche-Orient. Pour le reste, c’est-à-dire l’essentiel, il s’alignera sur Washington et Tel-Aviv, ainsi qu’il vient de lui être fermement intimé.