Saleh Al Naami - Al Ahram
Israël cherche à écraser le Mouvement islamique au sein des populations palestiniennes de 1948, qui est perçu comme menaçant directement les plans de l’Etat sioniste, selon Saleh Al Naami.
Le cheikh Raed Salah, président du mouvement islamique en Israël et figure emblématique de la résistance des Palestiniens vivant en Israël et du mouvement de défense du site d’Al Aqsa
Michael Ben Ari, membre de la Knesset aux franges de la droite extrémiste, n’est pas le seul parlementaire israélien à demander l’interdiction du Mouvement Islamique dirigé par Sheikh Rae d Salah , en Israël. La libération de Sheikh Salah emprisonné pendant 5 mois dans une prison israélienne et les propos qu’il a tenus subséquemment expliquent la position intransigeante d’Israël envers Sheikh Salah et son groupe. Ceux qui demandent la dissolution du Mouvement islamique sont des membres de la Knesset appartenant au parti [dit] centriste Kadima, au parti dirigeant d’extrême droite le Likud, ainsi que des représentants des divers partis religieux d’extrême droite.
Tous accusent Sheikh Salah d’instiguer des sentiments séparatistes parmi les Palestiniens de 1948. Ils disent qu’il incite les Palestiniens à créer une société autonome capable de se suffire à elle-même à tous les niveaux pour échapper aux répercussions des politiques racistes israéliennes à leur encontre .The Mouvement islamique a créé des organisations sociales, éducatives, culturelles et de charité pour combler le vide résultant de la négligence voulue par l’Etat d’Israël en ce qui concerne les services fournis aux Palestiniens de l948. Selon l’Institut national d’assurance israélien, 58 % de ces Palestiniens vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Yuil Hassoun, membre de la Knesset du parti Kadima pense que le Mouvement islamique table sur la méfiance des Palestiniens de l948 envers l’Etat pour encourager les idées séparatistes parmi eux . Le général Amos Gilboa , ancien directeur de recherche des services secrets de l’armée israélienne affirme que le mouvement se donne pour objectif d’islamiser la société palestinienne, ce qui encourage tout naturellement des idées séparatistes pour les Palestiniens de l948. Ceci découle de la logique selon laquelle les valeurs islamiques conduiront nécessairement les Palestiniens à adopter des positions hostiles envers l’Etat et à susciter un puissant désir de s’en séparer.
L’élite dirigeante à Tel Aviv affirme que le Mouvement islamique a joué un rôle certain pour désamorcer les tentatives d’Istraël visant à faire pencher en sa faveur la conscience collective des Palestiniens de l948 pour leur faire accepter le plan social et politique sioniste. Yaakov Peri , ancien chef des services secrets intérieurs, a indiqué que depuis l966 - quand le gouvernement israélien a été contraint de mettre un terme à l’administration militaire des Palestiniens - le gouvernement juif s’est efforcé d’obliger ces Palestiniens à s’intégrer dans la société et à effacer leur identité islamique, arabe et palestinienne.
Mais Tel Aviv en vient à comprendre que « l’israélisation » n’a pas seulement échoué mais a poussé les Palestiniens de 1948 à adopter un programme qui constitue un défi pour l’Etat et ses institutions. Moshe Shahal , qui a été ministre de la sécurité intérieure et de la justice dans le passé, a déclaré que l’un des principaux indices de l’échec de cette campagne est la croissance ( ou l’émergence, as you like ) du Mouvement islamique. Shahal dit que la création même du mouvement et sa popularité auprès des Palestiniens de 1948 est un signe fort que l’israélisation a échoué , non seulement du fait de l’existence du mouvement, mais du fait qu’il propose un plan alternatif d ’« islamification ».
Nombre d’experts israéliens considèrent que le refus du Mouvement islamique et de son chef de participer aux élections parlementaires - bien que ses membres aient le droit de le faire - conduit à proposer l’Islam comme antidote à l’identité israélienne. Yossi Ben-Aharon , directeur de cabinet de l’ancien premier ministre israélien Yitzhak Shamir , voyait dans l’intérêt que le mouvement portait aux élections locales un indice de « tendances séparatistes » .
Les décideurs israéliens s’inquiètent non seulement du fait que le mouvement a réussi à empêcher la jeunesse bédouine de se porter volontaire dans l’armée, mais aussi du fait que les zones bédouines sont de »venues des fiefs du mouvement . Ceci est un signe supplémentaire de l’influence israélienne décroissante ; la jeunesse bédouine autrefois considérée comme force de réserve pour l’armée israélienne, constitue désormais le coeur du Mouvement islamique . En conséquence, les institutions d’Etat travaillent à réduire les naissances parmi les femmes bédouines.
Le général Giora Eiland, ancien président du Conseil national de la sécurité d’Israël, a dit qu’il réunissait un groupe de chercheurs pour étudier les moyens de réduire les naissances dans la société bédouine, parce que « les femmes bédouines sont plus souvent enceintes que nécessaire ». Eiland a averti que si les taux de naissance demeuraient ce qu’ils sont, la population bedouine doublera en 15 ans.
Les autorités israéliennes perçoivent le Mouvement islamique comme une menace à la securité d’Israël. Le Shin Bet, l’agence des services secrets intérieurs, prétend que de nombreux mouvements de résistance de la Cisjordanie et de la bande de Gaza font appel aux membres du Mouvement islamique quand en mission à l’intérieur d’Israël, bien qu’il soit difficile de prouver que le mouvement a effectivement eu recours aux armes dans son conflit avec Israël.
Les responsables de l’appareil israélien de sécurité prétendent qu’il y a un haut niveau de coordination et d’harmonisation d’intérêt de même qu’un échange de rôles entre le Mouvement islamique en Israël et le Hamas . Shin Bet assure que les groupes civils et les organisations humanitaires affiliées au Mouvement islamique contribuent à créer un environnement social qui soutient la résistance sur la Cisjordanieet la bande de Gaza. Cette aide se manifeste au moyen de programmes sponsorisés apportant soutien aux orphelins, aux familles des martyrs et aux familles pauvres, grâce aux dons de riches Palestiniens de 1948.
Bien que les activités du mouvement soient publiques et dans le cadre de la loi israélienne, les services de sécurité israéliens n’ont pas hésité à fermer les organisations de charité du mouvement et à arrêter leurs responsables et leurs membres, au prétexte que cdes acticités constituent une assistance au « terrorisme ». L’ancien ministre de la sécurité intérieure Avi Dichter, par exemple, assure que le mouvement utilise son activité de bienfaisance pour servir les « activités terroristes » du Hamas, décrivant les oeuvres humanitaires du mouvement comme « complémentaires « de l’aile armée des mouvements de résistance palestinienne sur la Rive Droite et la Bande de Gaza. Dichter affirme que si un Palestinien sait que sa famille sera prise en charge s’il est tué ou arrêté en raison de son activisme « terroriste » , il n’hésitera pas à poursuivre sa mission.
L’administration de sécurité israélienne considère que la campagne menée par le Mouvement islamique pour défendre les lieux saints à Jérusalem , notamment la campagne « El-Aqsa en danger » est une source dangereuse d’incitation indirecte au terrorisme. Shaul Mofaz, le chef de cabinet militaire et ministre de la défense dans le cabinet d’Ariel Sharon , a dit que les accusations de Sheikh Salah selon lesquelles Israël programme la destruction de la mosqu »e d’Al Aqsa , constitue une in citation à l’encontre de la sécurité d’Etat. Mofaz a prévenu que les campagnes d’agitation à l’instigation du mouvement b non seulement encouragent les Palestiniens mais également nombre de jeunes arabes et jeunes musulmans à devenir des ennemis d’Israël.
Les cercles israéliens officiels considèrent que l’adoption de la cause d’El Aqsa par le mouvement islamique et les efforts personnels de Sheikh Salah dans la campagne contre les plans israéliens pour judaïser Jérusalem poussent l’opinion publique arabe - et particulièrement palestinienne - à prendre des positions « extrémistes dans le conflit . En conséquence, les efforts israéliens pour imposer des solutions qui servent leurs intérêts sont contrariés. Liad Orgad , l’orientaliste israélien , a développé ce point de vue quand il dit que même si les Etats arabes étaient sincères dans leur souhait de mettre un terme au conflit israélo-palestinien , les positions et le travail du Mouvement islamique en Israël rendent ceci très difficile. Orgad considère que le mouvement impose à l’opinion arabe des positions « qui sont très dangereuses, en mettant l’accent sur la confrontation résultant des efforts de judaïsation d’Al Aqsa ».
Tel Aviv veut diaboliser le Mouvement islamique pour couvrir ses propres positions hostiles et racistes envers les Palestiniens de 1948. Les décideurs craignent que le mouvement ne se développe jusqu’à mettre en péril le caractère juif de l’Etat. Dans le même temps, Israël refuse d’ouvrir le débat sur les réflexions du Mouvement Islamique et celles d’autres représentant les Palestiniens de 1948. De cette façon, la confrontation entre les deux côtés continuera.
http://weekly.ahram.org.eg/2010/102...Traduction de l’anglais : JS