Pascal Boniface
Le président de l’Union européenne des associations de football (UEFA), Michel Platini, vient d’affirmer que les mesures israéliennes vis-à-vis du sport palestinien constituaient une violation des réglementations et lois internationales en vigueur, susceptible de le pousser à reconsidérer la qualité de membre de l’UEFA pour Israël.
Michel Platini vient de rencontrer Jibril Rajoub, président de la Fédération palestinienne de football. Celui-ci a mis en avant les pratiques israéliennes qui ont pour effet d’isoler le sport palestinien évoquant les restrictions imposées pour les allers et venues des sportifs palestiniens et les difficultés à pouvoir importer des équipements sportifs. Israël a interdit par ailleurs l’entrée de matériels destinés à favoriser le développement du sport en Palestine, octroyés en juillet 2009 par Platini, et qui sont toujours bloqués au niveau des ports israéliens. Jibril Rajoub a fourni un rapport détaillé au président de l’UEFA sur les difficultés des sportifs palestiniens, et notamment des footballeurs, à pouvoir se réunir, s’entraîner et se déplacer. Michel Platini a alors déclaré qu’Israël avait été accepté en Europe et qu’ils doivent respecter les messages des lois et réglementations sportives internationales, faute de quoi leur présence en Europe n’aura pas lieu d’être : « Je vais peser de tout mon poids pour mettre un terme à la souffrance du joueur palestinien notamment au football et je présenterai cet état de fait au bureau exécutif lors de la prochaine réunion prévue en automne 2010 d’autant plus qu’Israël est membre du bureau exécutif. » C’est un message particulièrement ferme et tout à fait inhabituel qu’Israël reçoit de la part d’un organisme international.
Israël avait quitté la confédération asiatique du fait du boycott des pays arabes et avait été accepté dans les instances européennes de football. C’est pour cela que les équipes de clubs israéliens disputent la Champion’s League et la Ligue Europa, tandis que l’équipe nationale dispute sa qualification pour la Coupe du monde au sein de la zone Europe et participe aux qualifications pour le championnat d’Europe des Nations. En 2002, l’UEFA avait empêché provisoirement des matchs internationaux de se dérouler en Israël mais pour des considérations liées à la sécurité et du fait de la menace d’attentats. Ce n’était en rien une condamnation politique d’Israël.
Si Platini maintient sa menace, le coût serait particulièrement lourd pour Israël. La menace de suspension de la participation des équipes nationales ou de clubs israéliens à des compétitions européennes serait un coup très dur porté à Israël. On se rappelle ainsi qu’en 1992, l’équipe de Yougoslavie avait été écartée du fait du début des guerres balkaniques. Contrairement à l’ONU avec l’Assemblée générale qui multiplie les résolutions sans aucune valeur juridique contraignante et où le Conseil de sécurité est bloqué par le veto des Etats-Unis, l’UEFA peut prendre de vraies décisions. La visibilité du sport, son impact quotidien profondément ancré dans les sociétés, donneraient au débat sur la participation d’Israël à l’UEFA, une importance politique et symbolique énorme.
On peut penser qu’Israël ne se méprendra pas sur le message envoyé par Platini en sachant que, pour de simples raisons d’attachement au sport, il ne cédera pas et que les moyens traditionnels de pression qui fonctionnent très bien pour les Etats européens n’auront pas d’effets sur l’instance suprême européenne sportive. Il est donc très probable qu’Israël revoit assez rapidement sa politique de restriction des déplacements des sportifs palestiniens et de la fourniture d’équipements sportifs à la Palestine. Les dirigeants israéliens sont suffisamment perspicaces pour savoir quelles pressions sont réelles ou purement verbales. Et Platini et l’UEFA auront probablement plus d’impact et d’influence sur leur décision que les différentes protestations verbales sans consistance des dirigeants politiques occidentaux.