La construction a repris lundi dans les colonies de Cisjordanie. Un coup fatal aux négociations de paix, qui, du reste, n’ont abouti à rien depuis leur reprise il y a plus d’un mois.
Les négociations de paix piétinaient déjà, la reprise des constructions de colonies en Cisjordanie leur a donné le coup de grâce. Cinq semaines à peine après la reprise des négociations de paix directes entre Palestiniens et Israéliens — des négociations qui n’avaient, du reste, abouti à rien, on se retrouve à la case départ. Comme prévu donc, le gouvernement israélien a laissé expirer dimanche dernier son moratoire sur la colonisation en Cisjordanie, malgré les appels incessants des Etats-Unis à prolonger le gel des constructions, une mesure exigée par les Palestiniens pour poursuivre les pourparlers de paix. Le lendemain à peine, la construction a recommencé dans des colonies de la Cisjordanie occupée, à une échelle limitée certes, mais suffisante pour donner le ton. Des bulldozers s’activaient notamment dans la colonie d’Adam dans le nord de la Cisjordanie, alors que les constructions doivent aussi reprendre dans au moins huit autres colonies, selon les médias israéliens.
Comme à l’accoutumée, Israël a fait fi des intenses pressions de la communauté internationale, notamment des Etats-Unis, en refusant de reconduire tel quel le gel des nouvelles constructions dans les colonies, au risque de compromettre la poursuite des pourparlers. Selon la presse israélienne, le ministre de la Défense, Ehud Barak, a examiné avec l’administration américaine la possibilité de freiner de facto la construction en échange d’un soutien américain sur des exigences israéliennes, en particulier la reconnaissance d’Israël par les Palestiniens comme « Etat du peuple juif », et de garanties de sécurité sur sa frontière orientale. Un deal qui n’a apparemment pas réussi. Rien n’a filtré à ce sujet côté américain, Washington se contentant de répéter jusqu’à la dernière minute que la position américaine sur la construction de colonies n’a « pas changé ». « Nous restons en contact étroit avec les deux parties et nous allons les rencontrer à nouveau dans les prochains jours », a précisé le porte-parole du département d’Etat, PJ Crowley, à la veille de l’expiration du moratoire. « Nous restons concentrés sur l’objectif de faire progresser les négociations vers une solution à deux Etats (israélien et palestinien) et nous encourageons les parties à faire des gestes constructifs dans ce sens ».
Réunion de la Ligue arabe le 4 octobre
Sans scrupules, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a appelé le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbass, à poursuivre le dialogue, l’exhortant à « continuer à mener les pourparlers bons et honnêtes que nous venons de lancer pour tenter de parvenir à un accord de paix historique entre nos deux peuples », sans la moindre mention à la question de la colonisation.
Côté palestinien, l’heure est pour le moment à la retenue. Nabil Abou-Roudeina, porte-parole du président Mahmoud Abbass, a déclaré lundi à Paris que les Palestiniens ne se prononceraient pas officiellement sur la poursuite des négociations de paix avec Israël avant le 4 octobre et des consultations avec les pays arabes. Le 4 octobre est la date prévue pour une réunion de la Ligue arabe à la demande de l’Autorité palestinienne pour débattre de la poursuite des négociations. Mais à quelques heures de l’expiration du moratoire, M. Abbass, en visite à Paris, avait répété que les négociations de paix seraient « une perte de temps » si Israël ne maintenait pas son moratoire sur la colonisation.
Or, toute cette polémique autour du moratoire et de la poursuite ou non des négociations israélo-palestiniennes nous éloigne du fond du problème. En attirant l’attention sur cette simple question, celle des colonies, Israël a réussi à omettre un tas d’autres questions non moins délicates, dont le règlement est un préalable à tout accord de paix final. Il y a quelques semaines, on s’était réjoui de la simple reprise des négociations de paix directes, présentée alors comme un succès en soi. Aujourd’hui, on prie pour que ces négociations se poursuivent, coûte que coûte, oubliant ou feignant d’oublier que depuis leur reprise, aucun bon signe n’a été donné.
C’est dire que pour ce qui est du processus de paix, on va de mal en pis.
Abir Taleb