Par Christian Merville | 06/07/2010
Depuis l'épilogue de la malencontreuse « affaire Stanley McChrystal », les médias américains ne tarissent pas d'éloges sur le choix de son successeur à la tête des troupes de la coalition engagée en Afghanistan. Par contre, s'il est une partie qui devrait remercier le ciel parce que la mission du général David Petraeus n'englobe pas le Proche-Orient c'est bien Tel-Aviv. Appelé à témoigner devant la commission sénatoriale des forces armées, le haut gradé avait estimé jadis, en des termes fort peu diplomatiques, que « la persistance du conflit entre Israël et certains de ses voisins entrave grandement notre capacité à protéger nos intérêts dans la région ». Et dans un évident souci de ne laisser aucune place au doute, il avait ajouté : « L'irritation causée dans les pays arabes par la question palestinienne limite la force et la profondeur de nos liens avec eux. »
Vingt et un ans auparavant, le secrétaire d'État de Bush père, James Baker, lui non plus n'avait pas été tendre pour les Israéliens. En mai 1989, il avait pris la parole devant l'Aipac (American Israel Public Affairs Committee), le puissant lobby prosioniste qui compte parmi ses inconditionnels la moitié du Sénat, le tiers de la Chambre des représentants et une impressionnante cohorte de personnalités influentes. Ce fut pour appeler Yitzhak Shamir et les siens à « renoncer à la vision irréaliste d'un Grand Israël » incluant Gaza et la rive occidentale du Jourdain (Cisjordanie). Peut-être serait-il bon que quelqu'un se souvienne aujourd'hui des fortes paroles prononcées par l'un et l'autre, alors que la capitale fédérale s'apprête à accueillir le plus turbulent de ses protégés, Benjamin Netanyahu.
Dire que l'actuel Premier ministre israélien n'a jamais réussi à entretenir de bons rapports avec Washington relève de l'euphémisme. Reçu une première fois dans le bureau Ovale par un Bill Clinton qui entamait son mandat, il s'était lancé dans un doctoral et horripilant exposé sur la crise avec les Palestiniens, faisant dire, après son départ, à son hôte, courroucé par tant d'outrecuidance : « Mais pour qui se prend-il ? Et lequel de nous deux représente la superpuissance ? » Avec Barack Obama non plus, par Joe Biden interposé, le démarrage ne s'était pas effectué en douceur.
Que s'est-il passé depuis le fiasco de la visite à Jérusalem du vice-président qui justifie ce mardi le retour sur les rives du Potomac ? D'abord le sentiment qu'au rythme où, depuis, se défont les rapports entre les deux camps, le dialogue ne sera plus possible bientôt, faute de bonnes volontés. Ensuite la certitude dans le camp du Likoud que le navire de la boiteuse alliance montée par son leader est en train de prendre eau de toute part, ballotté de plus par les vagues d'Israel Beiteinou et du Shass. Enfin le fait que la décision - très partielle et limitée dans le temps - de stopper la colonisation en Cisjordanie expire en septembre prochain et que les durs du cabinet recommencent à s'agiter, à l'exemple de Daniel Hershkowitz, ministre de la Science et de la Technologie, et représentant d'un groupuscule relevant de l'ultradroite, le Habayit Hayehudi, qui exige la reprise immédiate de la colonisation « dans l'ensemble de la terre biblique d'Israël ».
Le quotidien Haaretz n'hésite pas à noter que « l'heure de vérité a sonné pour le Premier ministre, sommé de choisir entre ses convictions religieuses, c'est-à-dire la poursuite de la coopération politique avec la droite, et la nécessité de continuer à bénéficier de l'appui américain ». Et le journal de souligner à cet égard, détail qui a son importance, que « le carburant et les pièces détachées nécessaires à l'armée de l'air, de même que le système d'alarme antifusées sont fournis par les États-Unis ». Il ajoute que « notre nation n'a pas d'autre allié face à la menace posée par la République islamique ». Fort bien, mais un divorce au sein du ménage ministériel déboucherait sur une crise politique dont nul pour l'heure n'est capable de prévoir l'issue...
À quelques heures d'une rencontre que d'aucuns qualifient déjà de décisive, l'administration démocrate donne la pénible impression qu'elle ne sait toujours pas comment s'y prendre avec son protégé. À l'image de Hillary Clinton, après l'incident Biden, se déclarant « insultée » un jour pour, le lendemain, parler des « liens indéfectibles » avec Israël. Cependant, les choses ont changé depuis. Le successeur de George W. rappelait à juste titre l'autre jour, à l'adresse de ceux qui pourraient ne l'avoir pas compris, qu'il n'était pas « soft », mais qu'il savait prendre son temps. Quelqu'un ne devrait pas l'oublier, à bord de l'avion qui le mène à Washington.
Vingt et un ans auparavant, le secrétaire d'État de Bush père, James Baker, lui non plus n'avait pas été tendre pour les Israéliens. En mai 1989, il avait pris la parole devant l'Aipac (American Israel Public Affairs Committee), le puissant lobby prosioniste qui compte parmi ses inconditionnels la moitié du Sénat, le tiers de la Chambre des représentants et une impressionnante cohorte de personnalités influentes. Ce fut pour appeler Yitzhak Shamir et les siens à « renoncer à la vision irréaliste d'un Grand Israël » incluant Gaza et la rive occidentale du Jourdain (Cisjordanie). Peut-être serait-il bon que quelqu'un se souvienne aujourd'hui des fortes paroles prononcées par l'un et l'autre, alors que la capitale fédérale s'apprête à accueillir le plus turbulent de ses protégés, Benjamin Netanyahu.
Dire que l'actuel Premier ministre israélien n'a jamais réussi à entretenir de bons rapports avec Washington relève de l'euphémisme. Reçu une première fois dans le bureau Ovale par un Bill Clinton qui entamait son mandat, il s'était lancé dans un doctoral et horripilant exposé sur la crise avec les Palestiniens, faisant dire, après son départ, à son hôte, courroucé par tant d'outrecuidance : « Mais pour qui se prend-il ? Et lequel de nous deux représente la superpuissance ? » Avec Barack Obama non plus, par Joe Biden interposé, le démarrage ne s'était pas effectué en douceur.
Que s'est-il passé depuis le fiasco de la visite à Jérusalem du vice-président qui justifie ce mardi le retour sur les rives du Potomac ? D'abord le sentiment qu'au rythme où, depuis, se défont les rapports entre les deux camps, le dialogue ne sera plus possible bientôt, faute de bonnes volontés. Ensuite la certitude dans le camp du Likoud que le navire de la boiteuse alliance montée par son leader est en train de prendre eau de toute part, ballotté de plus par les vagues d'Israel Beiteinou et du Shass. Enfin le fait que la décision - très partielle et limitée dans le temps - de stopper la colonisation en Cisjordanie expire en septembre prochain et que les durs du cabinet recommencent à s'agiter, à l'exemple de Daniel Hershkowitz, ministre de la Science et de la Technologie, et représentant d'un groupuscule relevant de l'ultradroite, le Habayit Hayehudi, qui exige la reprise immédiate de la colonisation « dans l'ensemble de la terre biblique d'Israël ».
Le quotidien Haaretz n'hésite pas à noter que « l'heure de vérité a sonné pour le Premier ministre, sommé de choisir entre ses convictions religieuses, c'est-à-dire la poursuite de la coopération politique avec la droite, et la nécessité de continuer à bénéficier de l'appui américain ». Et le journal de souligner à cet égard, détail qui a son importance, que « le carburant et les pièces détachées nécessaires à l'armée de l'air, de même que le système d'alarme antifusées sont fournis par les États-Unis ». Il ajoute que « notre nation n'a pas d'autre allié face à la menace posée par la République islamique ». Fort bien, mais un divorce au sein du ménage ministériel déboucherait sur une crise politique dont nul pour l'heure n'est capable de prévoir l'issue...
À quelques heures d'une rencontre que d'aucuns qualifient déjà de décisive, l'administration démocrate donne la pénible impression qu'elle ne sait toujours pas comment s'y prendre avec son protégé. À l'image de Hillary Clinton, après l'incident Biden, se déclarant « insultée » un jour pour, le lendemain, parler des « liens indéfectibles » avec Israël. Cependant, les choses ont changé depuis. Le successeur de George W. rappelait à juste titre l'autre jour, à l'adresse de ceux qui pourraient ne l'avoir pas compris, qu'il n'était pas « soft », mais qu'il savait prendre son temps. Quelqu'un ne devrait pas l'oublier, à bord de l'avion qui le mène à Washington.