Comme d’habitude, les Israéliens ne voient qu’eux-mêmes, considèrent que leurs réclamations doivent être réalisées à tout prix et les autres parties doivent les accepter sans discussion, même si elles impliquent des menaces directes. Comme il est connu, l’expression d’« Etat hébreu » a été mentionnée dans la décision de la division de 1948, qui a réclamé un Etat pour les Arabes et pour les juifs. Remarquons que les pères spirituels ou les fondateurs d’Israël ne définissaient pas l’Etat qu’ils ont usurpé d’« Etat juif » mais d’« Etat d’Israël », prenant en considération la vérité que dans le nouvel Etat vivent un grand nombre d’habitants non-juifs, comme les Arabes musulmans et chrétiens qui sont les vrais propriétaires de la terre.
Depuis cette date, ces habitants, qui constituent entre 18 et 20 % de la population en Israël, représentent un grand problème à plusieurs dimensions. Premièrement, la présence des non-juifs affecte la conception sioniste de l’Etat d’Israël en tant qu’Etat purement réservé aux juifs selon des légendes religieuses et non religieuses. Deuxièmement, la présence arabe suscite la problématique de l’Etat à double-nation, même si un Etat palestinien est fondé selon les frontières de 1967. En effet, les Arabes palestiniens continueront à constituer un obstacle face à la judaïsation de l’Etat, malgré toutes les lois promulguées par la Knesset et imposées par force aux Arabes d’Israël.
Ceci nous mène à la troisième dimension relative à la discrimination pratiquée par l’Etat et protégée par la loi contre une partie des habitants. La fameuse expression répétée par des hommes politiques de 1948 qui est « Israël est l’Etat de tous ses citoyens » n’est qu’une tentative politique et juridique visant à mettre fin à la discrimination pratiquée par les institutions de l’Etat et la communauté juive contre les Arabes, propriétaires originaux de la terre. Et en contrepartie, les extrémistes israéliens affirment que les Arabes d’Israël peuvent être musulmans ou chrétiens à l’intérieur de leur maison, mais à l’extérieur, il doivent être juifs sionistes.
Tous ces aspects reflètent le dilemme dans lequel vit l’élite israélienne au pouvoir. Elle désire un Etat purement juif et fait son possible pour imposer ce concept à tous les citoyens. Mais au fond d’elle-même, quelque chose manque : la reconnaissance de l’entourage direct d’Israël en tant qu’Etat purement juif. Cette reconnaissance ne constitue pas uniquement une question psychique commune, mais concerne également la sécurité et la légitimité historique du projet sioniste sur les territoires palestiniens.
En effet, malgré toutes les réalisations juives, du point de vue sioniste, cette légitimité ne s’est pas encore réalisée. En fait, pour les juifs, il n’est pas uniquement question du présent mais de l’avenir. Cette légitimité signifie mettre fin au conflit, réaliser une défaite commune pour les Arabes et surtout garantir leur droits à purifier la terre des ancêtres de tous les éléments étrangers, c’est-à-dire procéder à l’expulsion de tous ceux qui ne sont pas juifs. Les Israéliens veulent un Etat basé sur une assise religieuse qui octroie les droits de citoyenneté à ceux qui appartiennent à cette religion seulement et non pas aux musulmans et aux chrétiens. Et la légitimité historique du point de vie sioniste signifie avant tout compléter le projet sioniste.
Certains observateurs pensent que les négociations nécessitent de traiter avec la réclamation de l’Etat juif selon le principe du marchandage. Et ce pour parvenir le mieux possible à un Etat palestinien prévu et pour ne pas donner à Israël des prétextes pour entraver les négociations et les questions relatives au statut final. Or, il suffit de s’approfondir dans les significations de la conception de l’Etat juif pour comprendre que toutes les solutions possibles resteront dans un cadre sioniste. Avec toutes ces répercussions stratégiques sur la région et sur l’Etat palestinien au cas où les négociations aboutiraient à une formule autour de cet Etat, avec ses 2 scénarios probables.
Premièrement, un Etat palestinien sur les frontières de 1967 sous une autorité palestinienne unique dont les territoires sont la Cisjordanie et le secteur de Gaza. La seconde probabilité est un Etat palestinien sur une partie des territoires palestiniens, la Cisjordanie ou Gaza, et sous une autorité palestinienne qui ne représente pas tout le peuple palestinien et qui est en litige avec une autre autorité sur l’autre partie des territoires. Ce qui ressemble beaucoup à la situation palestinienne actuelle.
Dans tous les cas de figure, si le négociateur palestinien et après lui le négociateur arabe, acceptent le principe de l’Etat juif, les répercussions seront désastreuses, comme le démantèlement géographique et démographique et la perte du droit au retour des réfugiés, ce qui causera des troubles sécuritaires et sociaux dans toute la région arabe.
Hassan Abou-Taleb