La semaine dernière, le quotidien suédois le plus largement diffusé a publié un article contenant des informations choc : des témoignages et des preuves circonstanciées indiquant que des Israéliens ont pu collecter des organes vitaux sur des prisonniers palestiniens sans leur consentement, depuis de nombreuses années. Mais il y a pire : certaines des informations dont il est fait état dans cet article suggèrent que dans certains cas, des Palestiniens pourraient avoir été capturés précisément à cette fin macabre.
Dans l’article, « On pille les organes de nos fils » le journaliste chevronné Donald Boström écrit que «les Palestiniens soupçonnent aussi fortement Israël de capturer des jeunes hommes qui lui serviraient à leur corps défendant de réserves d’organes avant d’être tués. Une accusation très grave, avec suffisamment de points d’interrogations pour motiver la Cour pénale internationale (CPI) à ouvrir une enquête sur d’éventuels crimes de guerre.» .
Une armée de responsables gouvernementaux et de thuriféraires d’Israël sont immédiatement montés sur leurs grands chevaux, qualifiant tant Boström (le journaliste) et les responsables de la rédaction du journal d’ « antisémites ». Le ministre israélien des Affaires étrangères s’est dit « atterré » par la lecture de cet article, qu’il a qualifié d’« archétype de diabolisation (sous-entendu des juifs) par l’accusation diffamatoire de crimes rituels» [“a demonizing piece of blood libel”]. Un responsable israélien l’a, quant à lui, qualifié de « pornographie de la haine ».
La revue Commentary a écrit que ce reportage n’était « que la partie émergée de l’iceberg de la haine anti-israélienne stipendiée et sponsorisée en Europe ». Beaucoup de commentateurs ont fait le lien entre l’article et les « diffamations sanglantes » médiévales (ces récits largement réfutés selon lesquels les juifs tuaient des gens afin d’utiliser leur sang dans certains de leurs rituels religieux). Certains auteurs pro-palestiniens se sont joints à la cohorte des critiques, exprimant leur scepticisme.
Le fait est, toutefois, que des preuves étayées de trafics et de vols d’organes tant publics que privés, ainsi que des allégations de méfaits encore pires, ont fait l’objet de reportages largement diffusés, depuis des années. Dans un tel contexte, les accusations venues de Suède sont bien plus plausibles qu’en l’ absence de tels faits; elles laissent entendre qu’une enquête pourrait fort bien révéler des informations fracassantes.
Nous donnons quelques exemples d’informations parues antérieurement sur cette question.
La première transplantation cardiaque réalisée en Israël
La toute première transplantation cardiaque – historique – réalisée en Israël a consisté à implanter un cœur prélevé sur un patient encore en vie, sans avoir recueilli le consentement (ni d’ailleurs seulement consulté) ses proches.
C’est ainsi qu’en décembre 1968, un homme du nom d’Avraham Sadegat (le New York Times le nomme erronément A. Savgat) [2] est décédé deux mois après une attaque cérébrale, bien qu’il ait été indiqué à ses proches qu’il « allait bien ».
Après avoir, dans un premier temps, refusé de remettre son corps, l’hôpital israélien où cet homme avait été soigné finit par rendre sa dépouille à ses proches. Ceux-ci découvrirent alors qu’il avait la partie supérieure du corps entourée de bandages : chose étrange, pensèrent-ils immédiatement, pour quelqu’un décédé des suites d’une attaque cérébrale…
Ils décidèrent de défaire les bandages. Ils découvrirent alors que la cavité pulmonaire de leur proche avait été bourrée de bandages, et qu’il n’avait plus de cœur.
Sur ces entrefaites, la transplantation cardiaque israélienne, qui occupait toutes unes des journaux, avait été réalisée. Après avoir encaissé le choc, l’épouse et le frère du défunt commencèrent à faire le rapport entre les deux événements, et ils exigèrent des explications.
Au début, l’hôpital a nié que le cœur de M. Sadegat ait été utilisé dans la sensationnelle transplantation cardiaque. Mais la famille a suscité une tempête médiatique, et elle a porté plainte, en fin de compte, contre trois ministres. Enfin, après plusieurs semaines, et après que la famille eut signé un document par lequel elle s’engageait à retirer sa plainte, l’hôpital avoua que c’était bien le cœur de M. Sadegat qui avait été utilisé pour la transplantation.
L’hôpital expliqua qu’il s’était prévalu de la loi israélienne, qui permettait que des organes soient prélevés y compris sans consentement de la famille [3]. (La Convention des Nations Unies contre le crime transnational organisé inclut l’extraction d’organes dans sa définition de l’exploitation d’êtres humains).
Les soupçons que l’enlèvement du cœur de M. Sedagat ait pu être à l’origine de son décès n’ont fait l’objet d’aucune investigation.
Déclaration du directeur de la médecine légale au sujet de disparitions d’organes
Un article publié en 1990 par le Washington Report on Middle East Affairs, intitulé « Autopsies et exécutions », sous la plume de Mary Barrett, fait état de tueries monstrueuses de jeunes Palestiniens. Il comporte une interview du Dr Hatem Abu Ghazaleh, ancien responsable de la Santé pour la Cisjordanie sous administration jordanienne [avant 1967, NdE], et directeur de la médecine légale et des autopsies.
Mary Barrett l’interroge au sujet « de l’angoisse largement répandue au sujet de vols d’organes, qui s’est emparée de Gaza et de la Cisjordanie depuis le début de l’Intifada, en décembre 1987 ».
Voici la réponse du Dr Hatem Abu Ghazaleh :
« Des indications existent que, pour une raison ou une autre, des organes, en particuliers des yeux et des reins, ont été prélevés sur les corps [des jeunes Palestiniens victimes de « Tsahal », NdT] durant la première année, ou année et demie, de l’Intifada. Les informations à ce sujet étaient tellement nombreuses, et fournies par des personnes tellement crédibles, qu’il est impossible que rien de tel ne se soit passé. Si quelqu’un est abattu d’une balle dans la tête et qu’on ramène son corps chez lui dans un sac en plastique, sans plus aucun organe interne, les gens vont se poser des questions, non ? » [4]
La mort mystérieuse d’un Ecossais
En 1998, un Ecossais, M. Alistair Sinclair, mourait dans des circonstances plus que bizarres, tandis qu’il était en garde à vue à l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv.
Sa famille fut informée de son décès et, d’après un article publié dans J Weekly, « … elle a déclaré qu’elle avait trois semaines pour réunir les 4 900 dollars nécessaires pour faire rapatrier le corps de M. Sinclair par avion. Le frère d’Alistair a dit que les Israéliens proposaient avec insistance une autre option : enterrer M. Sinclair dans un cimetière chrétien en Israël, pour un coût d’environ 1 300 dollars ».
Mais la famille réussit à réunir l’argent et à rapatrier le corps, après quoi elle demanda qu’il fût autopsié à la Faculté de Médecine de Glasgow. Il s’avéra que le cœur, ainsi qu’un petit os du cou de M. Sinclair manquaient. C’est alors que l’Ambassade de Grande-Bretagne à Tel Aviv porta plainte contre l’Etat d’Israël.
Le J Weekly écrit :
« Un cœur ayant prétendument appartenu à M. Sinclair fut rapatrié en Grande-Bretagne (suite à cette plainte), gratuitement. James Sinclair voulut que l’Institut Médico-légal israélien prenne financièrement en charge un test à l’ADN afin de confirmer que ce cœur était effectivement celui de son frère. Mais le directeur dudit Institut, le Pr Yehuda Hiss refusa, invoquant le prix, à ses yeux prohibitif, estimé à 1 500 dollars par certaines sources. »
En dépit de requêtes répétées de l’Ambassade britannique pour obtenir les rapports des pathologistes et de la police israéliens, les autorités israéliennes refusèrent de transmettre tout document de ce type [5, 6, 7].
Des responsables du gouvernement israélien soulèvent la question
Le journaliste palestinien Khalid Amayreh écrit, dans un article publié le 20 août 2009 :
« En janvier 2002, un ministre du cabinet israélien a implicitement reconnu que des organes extraits de corps de victimes palestiniennes avaient été utilisés pour des greffes sur des patients juifs à l’insu des familles des victimes palestiniennes.
Le ministre, Nessim Dahan, a déclaré en réponse à une question d’un membre arabe de la Knesset, qu’il ne pouvait ni démentir ni confirmer que des organes de jeunes gens et d’enfants palestiniens tués par l’armée israélienne avaient été extraits pour des transplantations ou pour des recherches scientifiques.
« Je ne pourrais pas affirmer avec certitude que ce genre de choses ne s’est pas produit. » »
M. Amayreh poursuit que que le député à la Knesset qui avait posé cette question a déclaré « avoir reçu des preuves crédibles démontrant que des médecins de l’institut médico-légal d’Abu Kabir avaient prélevé des organes vitaux tels que le cœur, les reins et le foie, sur les corps de jeunes et d’enfants palestiniens tués par l’armée israélienne dans la bande de Gaza et en Cisjordanie » [8].
Un pathologiste en chef israélien licencié pour vol d’organes
Durant plusieurs années circulèrent des allégations selon lesquelles le pathologiste le plus en vue d’Israël volait des organes humains. En 2001, la radio nationale israélienne révélait ceci :
« … les parents du soldat Ze’ev Buzgallo, tué dans un accident, lors d’exercices militaires sur les Hauteurs du Golan, sont en train de faire une requête à la Cour suprême, afin de réclamer la suspension immédiate du Dr Yehuda Hiss et que des poursuites criminelles soient engagées contre lui. Hiss est le directeur de l’Institut médico-légal d’Abou Kabir. D’après les parents [de Ze’ev Buzgallo], le corps de leur fils a été utilisé pour des expériences médicales sans leur consentement. Or, ces expérimentations avaient été autorisées par le Dr Hiss. » [9]
En 2002, la même source rapportait :
« La révélation de la présence d’organes humains stockés illégalement à l’Institut médico-légal d’Abou Kabir a amené le député à la Knesset Anat Maor, président de la Commission des Sciences, à exiger la suspension immédiate du directeur, le Professeur Yehuda Hiss. »
La mort d’Alistair Sinclair avait déjà alerté les autorités quant à la malfaisance de Hiss en 1998. Toutefois, rien n’avait été fait, pendant des années. Le journal The Forward a écrit, à ce sujet :
« En 2001, une enquête diligentée par le ministère israélien de la Santé a démontré que Hiss était impliqué depuis des années dans le prélèvement d’organes tels que des jambes, des ovaires et des testicules, sans autorisation des proches, lors d’autopsies, et qu’il vendait ces organes à des écoles de médecine, où ils servaient dans le cadre des enseignements. Il avait été nommé pathologiste en chef en 1988. Hiss n’avait jamais été poursuivi pour un quelconque crime. Mais en 2004, il avait dû renoncer à diriger la morgue nationale, à la suite d’années de plaintes à son encontre. » [10]
Collecte de reins de pauvres
D’après The Economist, un racket de reins a été florissant en Afrique du Sud, entre 2001 et 2003. « Les donneurs étaient recrutés au Brésil, en Israël et en Roumanie, se voyant offrir de 5 000 à 20 000 dollars pour se rendre à Durban et céder un rein… Les 109 receveurs, presque tous Israéliens, payèrent chacun jusqu’à 120 000 dollars leur « séjour transplantation » ; ils prétendirent qu’ils étaient parents des donneurs et qu’il n’y avait eu aucune transaction financière. » [11]
En 2004, une commission parlementaire brésilienne indiquait qu’ « au minimum trente Brésiliens avaient vendu leurs reins à un réseau international de trafic d’organes, pour des transplantations réalisées en Afrique du Sud, Israël fournissant l’essentiel du financement. »
D’après une dépêche d’Inter Press Service (IPS) : « Les receveurs étaient principalement des Israéliens. Ceux-ci perçoivent des remboursements des caisses d’assurance-maladie israéliennes allant de 70 000 à 80 000 dollars pour des procédures médicales vitales effectuées à l’étranger. »
L’agence IPS poursuit :
Les Brésiliens étaient recrutés dans les quartiers les plus déshérités du Brésil, on les payait 10 000 dollars pour un rein, mais, « comme l’ ‘l’offre’ augmentait, ces paiements diminuaient, jusqu’à tomber aussi bas que les 3 000 dollars. » Ce trafic avait été organisé par un officier de police israélien à la retraite, qui a indiqué « ne pas avoir pensé qu’il commettait un délit, étant donné que la transaction elle-même était considérée légale par le gouvernement de son pays, Israël ».
L’ambassade d’Israël [au Brésil, NdT] a publié un communiqué niant toute participation du gouvernement israélien à un trafic illégal d’organes humains, tout en indiquant que les citoyens israéliens, dans certains cas d’urgence, peuvent subir une transplantation d’organe à l’étranger « de manière légale et conformément aux normes internationales en vigueur », avec le soutien financier de leur assurance médicale.
Toutefois, l’agence IPS rapporte que le président de la commission brésilienne avait qualifié la position israélienne « pour le moins d’ « anti-éthique ajoutant qu’un trafic ne peut voir le jour sur une échelle étendue que s’il existe une source importante de financement, telle que le système de santé israélien. » Il a ajouté que les ressources fournies par le système de santé israélien avaient été « un facteur déterminant » dans le fonctionnement de ce réseau [de trafic d’organes] [12].
Le chef d’un hôpital de Tel Aviv fait la promo du trafic d’organes…
A nouveau, l’agence IPS rapporte ce qui suit :
« Nancy Scheper-Hughes, qui dirige le projet Organs Watch [de lutte contre le trafic d’organes humains, NdT] à l’université d’Etat de Californie (Berkeley), a attesté devant la commission législative du Pernambouc qu’un trafic international d’organes humains avait commencé il y a environ douze ans, mis sur pied par Zacki Shapira, ancien directeur d’un hôpital de Tel Aviv.
« Shapira a effectué plus de trois cents greffes de reins, accompagnant, dans certains cas, ses patients à l’étranger, par exemple, en Turquie. Les receveurs sont des gens très aisés, ou disposant d’une très bonne assurance santé, et les « donneurs » sont des gens extrêmement pauvres d’Europe orientale, des Philippines et d’autres pays en voie de développement, a indiqué Mme Schper-Hugues, spécialiste d’anthropologie médicale. »
Israël poursuit des trafiquants d’organes
En 2007, le quotidien israélien Ha’aretz indiquait que deux hommes avaient avoué « avoir œuvré à persuader des Arabes de Galilée et du centre d’Israël, qui étaient handicapés mentaux ou souffraient de graves pathologies mentales, de se faire prélever un rein contre paiement », après quoi, ces deux hommes refusaient de payer les « donneurs ».
L’article rapportait que ces deux hommes faisaient partie d’un réseau criminel comportant un chirurgien israélien. D’après l’acte de mise en examen, ce chirurgien vendait les reins qu’il collectait entre 125 000 et 135 000 dollars [13].
Déjà, un peu auparavant, la même année, un autre quotidien israélien, le Jerusalem Post, avait écrit que dix membres d’un réseau de contrebande d’organes israélien visant des Ukrainiens avaient été arrêtés [14].
Dans le cadre d’une autre affaire, toujours en 2007, le Jerusalem Post faisait savoir que « le professeur Zaki Shapira, un des chirurgiens israéliens en vue dans le domaine des transplantations, a été arrêté jeudi en Turquie, soupçonné d’implication dans un cercle de trafic d’organes. D’après l’article, les transplantations étaient organisées en Turquie et avaient lieu dans des cliniques privées d’Istanbul. »
Zaki Shapira, ancien chef de l’unité de transplantation au Centre Médical Rabin de Petah Tikva, près de Tel Aviv, a été arrêté au milieu d’un échange de coups de feu dans une clinique privée d’Istanbul en mai 2007, après que quatre hommes armés avaient attaqué l’établissement pour exiger d’être remboursés. Après l’incident, la police a mené une enquête et a découvert qu’un tribunal avait ordonné la fermeture de la clinique plus d’un mois auparavant car on y effectuait des greffes illégales d’organes. La clinique avait reçu de nombreux avertissements. Au moment de l’incident, quatre patients étaient en attente d’une greffe.
Le trafic israélien d’organes touche-t-il les USA ?
En juillet de cette année [2009, NdT], même les médias usaméricains ont fait état de l’arrestation récente d’un certain Levy Yitzhak Rosenbaum, originaire de Brooklyn, par des policiers fédéraux, dans une grande rafle anti-corruption effectuée dans l’État du New Jersey, qui visait des maires, des hauts fonctionnaires et un certain nombre de rabbins éminents. Boström [le journaliste suédois, NdT] ouvre son article sur cet incident.
D’après la plainte du procureur fédéral, Rosenbaum, qui entretient des relations étroites avec Israël, a déclaré être impliqué dans la vente illégale de reins depuis dix ans. Un procureur US a expliqué : « Son business consistant à inciter des personnes vulnérables à céder un rein pour 10 000 dollars, et à revendre le même rein à hauteur de 160 000 dollars ». [15]
Il s’agit sans doute là de la première mention d’un trafic d’organes international ayant des ramifications aux USA.
L’anthropologue et experte du commerce d’organes de l’Université de Californie Nancy Scheper-Hughes, qui avait informé le FBI sur le cas de Rosenbaum, il y a sept ans, dit qu’elle a eu vent d’informations selon lesquelles il aurait menacé des « donneurs » en leur braquant le canon de son revolver sur la tempe, afin de s’assurer qu’ils respecteraient effectivement leur accord de « faire don » d’un de leurs organes [16].
La pénurie de donneurs en Israël
Israël se distingue par un nombre extraordinairement faible de donneurs d’organes volontaires. D’après le site ouèbe Ynet (du quotidien israélien Yediot Ahronot), « le pourcentage d’organes faisant l’objet d’un don chez les juifs est plus faible que tous ceux enregistrés dans les autres groupes ethniques… Dans les pays occidentaux, près de 30 % de la population est porteur d’une carte de donneur. En Israël, en revanche, 4 % seulement de la population possède de telles cartes. [17].
« D’après les statistiques du site ouèbe du ministère israélien de la Santé, en 2001, 88 Israéliens sont morts dans l’attente d’une transplantation en raison du manque d’organes disponibles. La même année, 180 Israéliens furent (pourtant) en état de mort cérébrale, et leurs organes auraient pu être utilisés à des fins de transplantation. Mais les proches de seulement 80 d’entre eux ont consenti au don de leurs organes. »
D’après Ynet toujours, ce faible pourcentage de donneurs est dû à des « raisons religieuses ». En 2006, l’on assista à un tollé, un hôpital israélien connu pour sa stricte observance des lois juives ayant procédé à une transplantation utilisant un donneur israélien. La semaine précédente, « un incident similaire s’était produit, mais le patient n’étant pas juif, cela était passé inaperçu. » [18, 19].
L’article suédois indique qu’ « Israël est sans cesse exposé à des tirs à boulets rouges en raison de son absence d’éthique en matière d’organes humains et de transplantations. La France fait partie des pays qui ont cessé toute collaboration dans ce domaine avec Israël, dans les années 1990. Le quotidien Jerusalem Post écrit que « l’on s’attend à ce que les autres pays européens suivent très bientôt l’exemple de la France ».
« La moitié des reins ayant été transplantés sur des Israéliens depuis le début des années 2000 ont été achetés illégalement en Turquie, en Europe orientale ou en Amérique latine. Les autorités sanitaires israéliennes sont parfaitement au courant de ce business, mais elles ne font strictement rien pour y mettre un terme. Lors d’une conférence consacrée à ce sujet en 2003, il a été démontré qu’Israël est le seul pays occidental dont la profession médicale ne condamne pas le trafic illégal d’organes humains. Ce pays n’adopte aucune mesure juridique contre les médecins prenant part à ce business illégal – au contraire, les chefs de service des plus grands hôpitaux israéliens sont impliqués dans l’immense majorité des transplantations extrajudiciaires, indique le quotidien suédois Dagens Nyeheter du 5 décembre 2003 ».
Afin de combler ce déficit en organes, l’ex-Premier ministre israélien Ehud Olmert, qui était à l’époque ministre de la Santé, avait organisé une grande campagne d’incitation aux dons, en été 1992, mais même si le nombre des donneurs avait connu une croissance impressionnante, les besoins continuaient à outrepasser grandement le nombre d’organes disponibles.
Augmentation des disparitions de Palestiniens
Boström, qui avait décrit tout cela dans son livre Inshallah publié en 2001 [20], écrit, dans son récent article retentissant :
«Pendant cette campagne, de jeunes hommes palestiniens ont commencé à disparaître dans les villages de Cisjordanie et de Gaza. Des soldats israéliens les ramenaient morts au bout de 5 jours, le corps ouvert.
Parler de ces corps charcutés terrorisait la population des territoires occupés. Il y avait des rumeurs d’une augmentation spectaculaire du taux de disparition de jeunes hommes, avec des enterrements nocturnes de corps autopsiés.
J’étais dans la région à l’époque, je travaillais sur un livre. À plusieurs reprises, j’ai été contacté par le personnel de l’ONU préoccupé par l’évolution de la situation. Les personnes qui me contactaient disaient que des vols d’organes avaient certainement lieu, mais qu’ils étaient empêchés d’agir contre cela.
Ayant trouvé un réseau de diffusion pour le reportage, je me suis alors déplacé dans le secteur pour interroger un grand nombre de familles palestiniennes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza : j’ai rencontré des parents qui ont raconté comment les organes de leur fils avaient été prélevés, avant d’être tués.»
Il décrit le cas de Bilal Ahmad Ghanem, âgé de dix-neuf ans, abattu par l’armée israélienne qui investissait son village.
«Le premier coup l’a frappé à la poitrine. Selon des villageois qui ont été témoins de l’incident, il a été touché par une balle dans chaque jambe. Deux soldats sont alors descendus en courant de l’atelier de menuiserie et ont tiré à nouveau sur Bilal dans le ventre.
Puis, ils l’ont attrapé par les pieds et l’ont traîné sur les vingt marches en pierre de l’escalier de l’atelier. (…) Les discussions se sont terminées avec le chargement de Bilal grièvement blessé dans une jeep par les soldats israéliens qui l’ont emmené à la sortie du village, où un hélicoptère de l’armée les attendait. Le garçon a été transporté vers une destination inconnue de sa famille. Cinq jours plus tard, il est revenu mort, enveloppé dans un drap vert d’hôpital. »
Boström rapporte que tandis que le corps était descendu dans la tombe, sa poitrine se découvrit, et les témoins virent qu’il avait été grossièrement recousu de l’estomac à la tête. Boström écrit que ce n’était pas la première fois que des gens voyaient une telle chose.
«Les familles en Cisjordanie et à Gaza étaient sûres de ce qui était arrivé à leurs fils : «Nos fils sont utilisés comme donneurs d’organes involontaires», m’a dit un proche de Khaled de Naplouse, de même que la mère de Raed de Jénine et les oncles de Mahmoud et Nafes dans la bande de Gaza, qui ont tous disparu pendant un certain nombre de jours avant de revenir de nuit, morts et autopsiés.».
Pourquoi des autopsies ?
Boströme relate les questions lancinantes que se posaient les familles :
« Pourquoi sinon garder les corps pendant au moins cinq jours avant de nous laisser les enterrer? Qu’est-il arrivé aux corps pendant cette période? Pourquoi effectuent-ils une autopsie, contre notre volonté, lorsque la cause du décès est évidente? Pourquoi les corps sont-ils rendus de nuit? Pourquoi avec une escorte militaire? Pourquoi la zone est-elle bouclée pendant l’enterrement? Pourquoi l’électricité est-elle coupée?»
La réponse d’Israël consistait à dire que tous les Palestiniens tués étaient autopsiés ; question de routine. Toutefois, Boström fait observer que sur les 133 Palestiniens tués cette année-là, seuls 69 d’entre eux avaient fait l’objet d’une telle autopsie.
Il poursuit :
«Nous savons qu’Israël a un grand besoin d’organes, qu’il existe un vaste commerce illégal d’organes, qui a lieu depuis de nombreuses années maintenant, que les autorités sont conscientes de cela et que les médecins à des postes de direction dans les grands hôpitaux y participent, ainsi que des fonctionnaires à différents niveaux.
Nous savons aussi que des jeunes hommes palestiniens ont disparu, qu’ils ont été ramenés au bout de cinq jours, de nuit, dans un secret absolu, recousus après avoir été ouverts du menton à l’abdomen, charcutés et recousus.
Il est temps d’apporter de la clarté sur ce commerce macabre, de faire la lumière sur ce qui se passe et ce qui s’est passé dans les territoires occupés par Israël depuis le début de l’Intifada.» [21].
Sommes-nous en présence d’une version actualisée de l’accusation diffamatoire de crimes rituels ?
Lorsqu’on passe en revue les réactions à l’article de Boström, l’on est frappé par la multitude d’accusations selon lesquelles cet article serait une nouvelle version de la vieille « diffamation sanglante » antisémite. Ceci étant, il est intéressant d’examiner un ouvrage publié en 2007 par un éminent expert dès histoire médiévale juive, et ce qu’il lui est advenu…
L’auteur est Ariel Toaff, professeur à l’université Bar-Ilan (et rabbin). Il est le fils d’un ancien grand rabbin de Rome, un chef religieux si célèbre qu’un journaliste israélien a écrit que le père de Toaff « est à la communauté juive italienne ce que la Tour Eiffel est à Paris ». Ariel Toaff est lui-même considéré comme « un des plus grands spécialistes de son domaine » [22-23].
En février 2007, les médias israéliens et les médias italiens débordaient (mais la plupart des médias usaméricains ont peu ou prou négligé cette polémique) d’informations selon lesquelles le Professeur Toaff avait écrit un ouvrage intitulé « Pasque di Sangue » [Pâque Sanglante] [24] renfermant des preuves qu’il y a bien « une base factuelle à certaines des diffamations sanglantes contre les juifs, au Moyen Âge ».
En se fondant sur trente-cinq années de recherches, Toaff était parvenu à la conclusion qu’il y a bel et bien eu quelques cas réels [de crimes rituels juifs, NdT], et peut-être un grand nombre de tels incidents.
Dans une interview accordée à un quotidien italien (l’ouvrage avait été publié en Italie), Toaff dit :
« Mes recherches montrent qu’au Moyen Âge, un groupe de juifs fondamentalistes ne respectait pas l’interdit biblique et utilisait du sang à des fins thérapeutiques. Il ne s’agit que d’un petit groupe particulier de juifs, qui appartenaient à des communautés qui avaient souffert des persécutions les plus graves durant les Croisades. De ce traumatisme est né une soif de revanche, qui, dans certains cas, a conduit à des rétorsions telles que l’assassinat rituel d’enfants chrétiens » [25, 26].
Le Professeur Toaff fut immédiatement attaqué de toutes parts, il fut notamment l’objet de pressions orchestrées par le président de l’Anti-Defamation League Abe Foxman. Mais il tint bon sur ses positions et sur les résultats de ses trente-cinq années de recherches, annonçant :
« Je ne renoncerai pas à ma dévotion à la vérité et aux libertés académiques, même si le monde entier me crucifiait… Personne ne doit avoir peur de dire la vérité. »
Peu après, toutefois, sous des pressions publiques et privées incessantes, Toaff se parjurait, retirait son livre de la vente et promettait de donner tous les bénéfices qu’il en avait retirés (le livre s’était vendu comme des petits pains) à l’Anti-Defamation League de Foxman. Un an plus tard, il en publiait une « version révisée » [27].
L’expérience que traverse Donald Boström semble une redite de ce que le Professeur Toaff a subi : calomnies, vitupérations et diffamation. Boström a reçu des menaces de mort ; sans doute une expérience vécue par le Professeur Toaff, lui aussi.
Si Israël est innocent de ces accusations de pillage d’organes, ou si sa culpabilité est considérablement moindre que ce que suggèrent Boström et d’autres auteurs, il devrait accueillir avec soulagement des enquêtes honnêtes qui l’exonéreraient certainement de tout méfait. Mais ce à quoi nous assistons, c’est le contraire : le gouvernement israélien et ses thuriféraires s’activent à étouffer dans l’œuf tout débat et à écraser ceux dont ils considèrent manifestement menaçantes tant les questions que les déductions.
Au lieu de se plier aux demandes d’enquête, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu exige du gouvernement suédois qu’il rejette son engagement à respecter la liberté de la presse et condamne cet article. Le bureau de presse israélien, apparemment en représailles et afin d’empêcher toute enquête supplémentaire, refuse d’accorder des accréditations de presse aux reporters du journal (Afftonbladet) qu’il estime « offensant».
Exactement comme dans les précédents des ravages perpétrés à Jénine, de l’attaque délibérée contre le navire de guerre USS Liberty, du massacre de Gaza, de l’écrasement de la militante pacifiste américaine Rachel Corrie sous les chenilles d’un bulldozer, des tortures infligées à des citoyens US et d’une multitude d’autres exemples, Israël se sert de ses ressources considérables et planétaires afin de faire obstacle à toute enquête.
Il est difficile d’en conclure qu’il n’a rien à cacher.
Notes :
[1] Il en existe deux traductions en anglais ; cet article utilise celle-ci: Lien. L’article original, en suédois, paru dans Aftonbladet : Lien
[2] New York Times, 3 février 1969, p. 8, colonne 6 (53 mots)
[3] 40 years after Israel’s first transplant, donor’s family says his heart was stolen By Dana Weiler-Polak, Haaretz Correspondent, Dec. 14, 2008
[4] Washington Report on Middle East Affairs, April 1990, Page 21, The Intifada: Autopsies and Executions.
[5] Bizarre death of Scottish tourist involves suicide, missing heart by NETTY C. GROSS, Jerusalem Post Service, October 30, 1998,
[6] The Forward, Illicit Body-Part Sales Present Widespread Problem, By Rebecca Dube, Aug. 26, 2009.
[7] Masons, Muslims, Templars, Jews, Henry and Dolly.
[8] Al-Jazeerah: Cross-Cultural Understanding, Khalid Amayreh, August 20, 2009
[9] www.israelnationalnews.com
[10] Forward, Illicit Body-Part Sales Present Widespread Problem, By Rebecca Dube, August 26, 2009.
[11] The Economist, Organ transplants: The gap between supply and demand, Oct. 9, 2008
[12] BRAZIL: Poor Sell Organs to Trans-Atlantic Trafficking Ring By Mario Osava, IPS, Feb. 23, 2004
[13] Haaretz, Two Haifa men sentenced to jail for organ trafficking, By Fadi Eyadat, Dec. 18, 2007
[14] Police uncover illegal organ trade ring By REBECCA ANNA STOIL, July 23, 2007.
[15] Sting rocks U.S. transplant industry, David Porter, Carla K. Johnson, ASSOCIATED PRESS, july 25, 2009.
[16] U.S. Professor: I told FBI about kidney trafficking 7 years ago By Natasha Mozgovaya, Haaretz Correspondent, August, 3, 2009.
[17] A mitzvah called organ donation, Efrat Shapira-Rosenberg, 10.6.07.
[18] Orthodox in uproar over organ donation incident, Neta Sela, 06.22.06
[19] The Return of the Body Snatchers, By Israel Shamir. L’écrivain israélien Israel Shamir rapporte que, voici de cela quelques années… « un rabbin chabad en vue, Yitzhak Ginzburgh, a accordé sa permission à un juif de prélever le foie d’un non-juif, même sans sa permission. Il a dit : « Un juif est en droit d’extraire le foie d’un goy s’il en a besoin, car la vie d’un juif a plus de valeur que celle d’un goy, de la même manière que la vie d’un goy a plus de valeur que celle d’un animal. »
[20] www.bokus.com
[21] www.tlaxcala.es
[22] Ha’aretz. The Wayward Son, by Adi Schwartz, March 1, 2007.
[23] Ha’aaretz, Bar-Ilan to order professor to explain research behind blood libel book By Ofri Ilani, Haaretz Service and The Associated Press, Feb 11, 2007.
[25] Haaretz, Bar Ilan to order professor to explain research behind blood libel book, by Ofri Hani, Feb. 11, 2007.
[26] De précédents ouvrages contenant des informations sur le judaïsme médiéval et le judaïsme contemporain, dont certaines sont d’un intérêt tout particulier pour le débat autour des prélèvements d’organes, ainsi que sur l’étouffement largement répandu de telles informations, ont été publiés il y a de cela quelques années, également par un universitaire israélien, Israel Shahak, au sujet duquel Noam Chomsky a pu écrire : « Shahak est un chercheur hors pair, il a une profondeur de vues et une culture remarquables. Son œuvre est étayée et pénétrante, c’est une contribution d’une très grande valeur ». De cet auteur, nous encourageons nos lecteurs à lire dans leur intégralité les ouvrages suivants : Jewish History, Jewish Religion, The Weight of Three Thousand Years”et Jewish Fundamentalism in Israel , coécrit avec le Professeur Norton Mezvinsky.
[27] Ha’aretz, ‘Historian recants theory that Jews killed Christian child in ritual murder,’ By Adi Schwartz, Feb 24, 2008.
Pour les liens vers les articles cités en note, voir Tlaxcala.
Source : CounterPunch
Traduit par Marcel Charbonnier. Édité par Fausto Giudice pour Tlaxcala.
Photo: Le journaliste Donald Boström