AFP, LE Nouvel Observateur, jeudi 27 mars 2014
Amman (AFP) - Le secrétaire d’Etat
américain John Kerry, en tournée jeudi en Jordanie, a averti Israël
qu’un échec des pourparlers de paix avec les Palestiniens pourrait
conduire à davantage de violences dans la région.
"L’alternative à la reprise des pourparlers est le potentiel de
chaos", a dit M. Kerry dans une interview diffusée jeudi soir par la
deuxième chaîne israélienne et la télévision publique palestinienne.
"Est-ce qu’Israël veut une troisième Intifada ?", a-t-il ajouté.
La première intifada, un mouvement d’insurrection des Palestiniens contre l’occupation israélienne, a eu lieu de 1987 à 1993 et la seconde, très meurtrière, de 2000 à 2005.
M. Kerry a encore appelé à "résoudre la question des colonies (…) et
mettre fin à la présence perpétuelle des soldats israéliens
en Cisjordanie".
"Autrement, il y aura un sentiment croissant(chez les Palestiniens, NDLR)
qu’on ne peut pas parvenir à la paix avec une direction engagée à la
non-violence, et on pourrait se retrouver avec une direction engagée
à la violence", a-t-il prévenu.
M. Kerry se trouvait jeudi à Amman dans le cadre d’une tournée qui
l’a conduit mercredi à Jérusalem et en Cisjordanie lors de laquelle
il s’est efforcé de convaincre Israéliens et Palestiniens d’aller de
l’avant dans les négociations qui traversent une grave crise.
Lors d’une conférence de presse avec son homologue jordanien
Nasser Joudeh, M. Kerry a assuré que les négociations avaient fait
"des progrès importants dans quelques domaines".
Il a cependant refusé de révéler aux journalistes tout détail sur
ces progrès, suite à l’engagement de toutes les parties de maintenir un
black-out sur ces pourparlers.
"Nous avons éclairci certains points" du processus de paix. "J’en
suis satisfait", a déclaré M. Kerry à l’issue de sa rencontre avec le
roi Abdallah II.
"La chose la plus importante est la confiance qui vous est accordée" à l’échelle internationale, lui a dit le roi.
Mais alors qu’il s’est dit "absolument" convaincu qu’un accord final
sur tous les sujets difficiles pouvait être signé, M. Kerry n’a pas
écarté dans le même temps la possibilité de conclure, d’abord, un
accord intérimaire.
La presse israélienne avait évoqué une nouvelle approche de
Washington qui pourrait présenter aux deux parties une proposition
pour parvenir à un accord intérimaire, des affirmations qu’avait
catégoriquement démenties M. Kerry jusqu’à présent.
Navettes entre Israéliens et Palestiniens
Cela "pourrait constituer un pas" mais "seulement si cela comprend
le concept de statut final (…) Vous ne pouvez pas juste faire un accord
intérimaire et prétendre régler le problème", a-t-il dit jeudi
à la presse.
"Si vous laissez les principaux sujets traîner, (…) de mauvaises
choses arriveront dans l’intervalle qui rendront encore plus
difficile l’obtention d’un statut final", a-t-il poursuivi.
Après une rencontre mercredi à Bethléem, en Cisjordanie, avec le
président palestinien Mahmoud Abbas, M. Kerry l’a vu de nouveau jeudi
soir à Amman.
Il doit aussi s’entretenir une nouvelle fois vendredi matin avec le
Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, après déjà deux
rencontres qui ont duré au total plus de sept heures entre les deux
dirigeants mercredi.
Les négociations de paix, qui ont repris fin juillet après
quasiment trois ans d’interruption en raison de profonds désaccords,
se déroulent dans une atmosphère de crise, notamment après la relance
de la colonisation israélienne en Cisjordanie occupée et
à Jérusalem-Est annexée.
Un responsable palestinien avait annoncé mardi soir la suspension
des discussions face à "une offensive de colonisation
sans précédent".
Selon des hauts responsables israéliens, les dirigeants
palestiniens et les Etats-Unis auraient consenti tacitement à une
relance de la colonisation, contre la libération de prisonniers
palestiniens. Ce que Washington et l’Autorité palestinienne
ont démenti.
Les Palestiniens réclament que les discussions se tiennent sur la
base des lignes antérieures au début de l’occupation israélienne en 1967,
avec des échanges de territoires équivalents. Mais Israël veut que
le tracé de la barrière de séparation en Cisjordanie, qui isole 9,4% du territoire palestinien, serve de base aux discussions, selon les médias israéliens.
En outre, Israël exige de maintenir une présence militaire dans la vallée du Jourdain, ce que refusent les Palestiniens.