Dimanche 16 Octobre 2011
Une nomination improbable est passée quasiment inaperçue dans le tsunami
créé par l'affaire DSK, accusé aux Etats-Unis du viol d'une femme de
chambre noire. Cette nomination concerne la présidence du Haut Conseil
de l'IMA. L'IMA, c'est l'Institut du Monde arabe, dont la mission
première est de faire connaître la culture et la civilisation arabes aux
Français et par extension, au monde occidental en général. Son
objectif, est-il indiqué dans son acte fondateur (1987), est «de
développer la connaissance du monde arabe, d'animer une recherche en
profondeur sur sa langue, ses valeurs culturelles et spirituelles, ainsi
que de favoriser les échanges et la coopération, en particulier dans
les domaines des sciences et des techniques, entre la France et le monde
arabe, contribuant par là au développement des relations entre celui-ci
et l'Europe». Cela suppose que ses gestionnaires, choisis conjointement
par la France et ses 22 partenaires arabes, ont des connaissances
pointues du Monde arabe, de sa culture, de sa langue, de ses différences
et de sa complexité. En un mot, de sa civilisation et de son apport à
la civilisation universelle. Cela suppose aussi que le postulant à la
direction de cet Institut possède un bagage intellectuel élevé, connaît
bien un monde dont il aura à défendre l'image auprès des Français et de
l'Occident. Cela veut dire que cette personnalité est connue pour ses
interventions sur le Monde arabe, par ses travaux sur une culture et une
région qui ont beaucoup apporté au patrimoine mondial et, toutes choses
égales par ailleurs, a eu à défendre le droit des Palestiniens à
édifier leur Etat indépendant. Aussi, quelle ne fut pas la surprise
d'apprendre la nomination, par le président français, Nicolas Sarkozy,
du député UMP des Bouches-du-Rhône, Renaud Muselier à cette haute
fonction. Surprise pourquoi? Rien en effet, ne justifiait la nomination
de cette personnalité française, qui n'a aucune qualification pour
postuler à cette fonction, nonobstant un CV impressionnant. La réalité
est autre. Elle est bien amère lorsque l'on constate que les dirigeants
français ont tendance à se servir de cette institution pour des raisons
de basse politique, quand l'IMA devient un marchepied pour l'accession à
des postes politiques plus valorisants. En nommant Renaud Muselier à la
présidence de l'IMA, Nicolas Sarkozy voulait surtout préparer et rendre
plus visible, une personnalité candidate à la relève, en 2014, de
l'inamovible Jean-Claude Gauguin à la tête de la mairie de Marseille.
C'est l'IMA et son statut qui sont ainsi pervertis. L'atterrissage de M.
Muselier à l'IMA pose en fait problème. Outre l'incompétence du
Monsieur pour tout ce qui est du Monde arabe, ce qui est encore plus
grave est que M.Muselier est un «ami» déclaré d'Israël et un soutien
zélé de sa politique de colonisation des territoires palestiniens
occupés. A juste raison, l'IMA est, rappelle-t-on, au Quai d'Orsay, «un
instrument essentiel et unique du dialogue entre la France et les pays
arabes». Or, M.Muselier n'est pas la personne la plus qualifiée pour ce
faire. Aussi, le choix de Renaud Muselier ne s'explique pas, d'autant
plus qu'il intervient en pleine bourrasque des révoltes arabes, à un
moment «primordial», précise-t-on encore à Paris «où nous souhaitons
renforcer le dialogue et la compréhension avec les pays de cette région
du monde». Dès lors, comment peut-on confier une telle mission à
quelqu'un qui ne cache pas ses accointances avec les milieux sionistes,
par son activité au sein du groupe d'amitié «France-Israël» au Parlement
français? A ce que l'on sache, M.Muselier ne s'est pas signalé, se
prévalant de son amitié pour Israël, par des prises de position
courageuses sur le dossier palestinien. Alors, pour qui roule donc
l'IMA? Sert-il le Monde arabe ou est-il le cheval de Troie de ses
ennemis, lorsque l'on note que le président sortant, Dominique Baudis,
est membre de l'Association «France-Israël». Que disent, que font donc
les Etats arabes qui laissent passer de telles dérives?