Pierre Barbancey
Nicolas
Sarkozy s’est félicité de l’accord passé entre le Hamas et le
gouvernement israélien, mais n’a pas eu un mot pour le jeune
Franco-Palestinien toujours emprisonné, malgré l’illégalité des
tribunaux d’occupation.
Le soldat franco-israélien
Gilad Shalit va être libéré. L’annonce, faite mardi soir, est le
résultat de négociations secrètes entre le mouvement islamiste
palestinien Hamas et le gouvernement israélien, sous l’égide de l’Égypte
et de l’Allemagne. En échange, Israël relâcherait 1 027 prisonniers [1].
Le numéro un du Hamas, Khaled Mechaal, s’est exprimé depuis Damas. Il a
qualifié cet accord d’échange de prisonniers comme « une réalisation
nationale ». Il s’est également adressé à l’Autorité palestinienne et à
toutes les forces palestiniennes pour travailler main dans la main pour
la réalisation du projet national palestinien jusqu’à la libération de
la Palestine et l’édification de l’État palestinien. Il a indiqué que
cet accord d’échange se fera en deux phases : 450 premiers prisonniers
sortiront au cours de la semaine, et 550 d’ici deux mois. Parmi les 450
premiers, il y aurait 315 condamnés à la perpétuité. Toutes les femmes
emprisonnées dans les prisons israéliennes, qui sont au nombre de 27,
seraient également libérées. Les prisonniers sont issus des différentes
composantes du peuple palestinien : la Cisjordanie, Gaza, Jérusalem et
les territoires de 1948, ainsi que le Golan. Il y aurait parmi eux
certains réfugiés.
Mais, selon nos informations, Marwan Barghouti,
dirigeant du Fatah et condamné à cinq fois la prison à perpétuité, ne
serait pas sur la liste, pas plus qu’Ahmed Saadat, leader du Front
populaire de libération de la Palestine (FPLP), ni même d’importants
dirigeants du Hamas, comme Abdallah Barghouti, Abbas Sayyed, Jamal Abou
El Hija, Ibrahim Ahmad et Hassan Salama. Les principaux dirigeants du
Hamas libérés seront « éloignés » ainsi que les deux prisonnières les
plus célèbres : Saher Saïdi et Ahlam Tamimi, qui seront expulsées vers
la Jordanie et l’Égypte. L’accord a été réalisé et finalisé par Ahmad
Jaabari, chef des brigades d’Izz Al Din Al Qassam, et de David Fidan,
côté israélien. 110 pourront retourner en Cisjordanie, y compris à
Jérusalem, 203 seront expulsés vers des pays étrangers, dont la Turquie,
133 vers Gaza. La liste comporte six Palestiniens de l’intérieur.
Tirs de joie
dans la bande Gaza
Le caporal Gilad Shalit, Français et Israélien, était
âgé de dix-neuf ans lorsque, en opération militaire, il a été fait
prisonnier et retenu dans la bande de Gaza, le 25 juin 2006. Il a depuis
été promu sergent. La dernière preuve de vie, une vidéo tournée par ses
ravisseurs, remonte à septembre 2009. Selon les correspondants de
l’Humanité dans la bande de Gaza, des tirs de joie ont éclaté après la
nouvelle.
Il s’est produit comme un pas de deux assez surprenant
entre le Hamas et le gouvernement israélien. « Nous sommes très heureux
de ce grand succès et nous rendons grâce à Dieu. Mais notre joie est
teintée de tristesse parce que nous n’avons pas pu obtenir la libération
de tous les prisonniers », a déclaré Khaled Mechaal dans une
allocution télévisée. Benyamin Netanyahou a dit avoir téléphoné aux
parents de Gilad Shalit pour leur annoncer qu’il était sur le point de
tenir sa promesse au sujet de sa libération. « J’attendais impatiemment
le moment de passer ce coup de téléphone », a-t-il souligné. « Je
pense que nous avons conclu le meilleur accord possible alors que la
tempête agite le Proche-Orient. J’ignore si nous aurions pu en obtenir
un meilleur ou même en obtenir un tout court dans un avenir proche,
a-t-il ajouté. Il était possible que la fenêtre d’opportunité se referme
pour de bon et nous n’aurions pas pu ramener Gilad chez lui. » Selon
la deuxième chaîne de télévision israélienne, les deux parties se sont
montrées plus conciliantes lors des dernières négociations secrètes,
dont l’ultime session au Caire a duré vingt-quatre heures et s’est
achevée mardi matin, selon les négociateurs israéliens. « Israël a
accepté un grand nombre de noms (de détenus), le Hamas en a sacrifié
d’autres, et ils ont trouvé un juste milieu », a dit sous couvert
d’anonymat un médiateur étranger.
À Paris, Nicolas Sarkozy s’est « très vivement »
réjoui de l’annonce de l’accord, mais n’a pas eu un mot pour l’autre
français détenu – en Israël, il est vrai – Salah Hamouri, jugé et
condamné par un tribunal militaire d’occupation et donc illégal, et
alors que les charges retenues contre lui reposent sur des
« présomptions ».