Gilles Paris
La nouvelle Egypte tient sa parole. Le ministre des affaires étrangères Nabil Al-Arabi de l’ère post-Moubarak l’avait promis, le point de passage de Rafah, entre son pays et Gaza, sera rouvert de manière permanente à partir du samedi 28 mai. Pour l’étroite bande de terre, cette annonce ouvre une brève dans le blocus imposé par Israël depuis la prise de contrôle du Hamas, en juin 2007.
La muraille héritée d’Israël entre Gaza et l’Egypte jetée à terre en janvier 2008
A bien des titres, cette décision qui témoigne d’une évolution notable du Caire dépuis l’éviction de Hosni Moubarak est historique. A partir de 1967, la frontière sud de Gaza était passée sous le contrôle israélien. Elle était devenu de plus en plus étanche au fil des années, la route Salaheddine, le principal axe de Gaza qui traverse la bande de terre du nord au sud, se terminant sur ce cul-de-sac.
C’est par Rafah que Yasser Arafat était revenu en terre palestinienne, en juillet 1994, un an après la signature des accords d’Oslo. Avec le déclenchement de la seconde intifada, en septembre 2000, la question du "corridor de Philadelphie", l’appellation israélienne de cette portion de frontière surveillée par l’armée, était devenu centrale. Pour Israël, le maintien d’un contrôle était crucial pour éviter la contrebande d’armes, au prix de la destruction de centaines de maisons palestiniennes, jugées trop proches de cette zone.
Muraille de fer (érigée sur une portion de cette frontière), projet de creusement de douves gigantesques reliées à la mer pour interdire le creusement de tunnels de contrebande, l’état-major israélien se livra à un véritable concours Lépine auquel le premier ministre Ariel Sharon mit fin en décidant un retrait total du territoire en 2005.
Ce fut ensuite l’Egypte qui pris le relais avec le même objectif : contenir les Palestiniens, surtout après la prise de contrôle du Hamas. L’Egypte en fut même réduit à installer des plaques d’acier dans les sables, après l’offensive israélienne contre le Hamas (27 décembre 2008-17 janvier 2009), à l’invitation pressante d’Israël et des Etats-Unis pour faire barrage à la contrebande d’armes comme en témoignent les câbles diplomatiques révélés par WikiLeaks.
Rafah devrait revivre avec la réouverture du point de passage mais partiellement. Il faut parier en effet que l’Egypte, en dépit de cette décision, continuera à respecter l’accord de 2005 qui stipule que seules les personnes sont habilitées à emprunter ce point de passage. Quant à l’aéroport palestinien mis hors d’état de fonctionner par Israël, il passera beaucoup de temps avant qu’il soit relancé. Tout comme le port évoqué mille fois et sans cesse remis à plus tard par Israël pour raison de sécurité.