lundi 24 janvier 2011

Al-Jazira divulgue les dessous des négociations israélo-palestiniennes

24/01/2011
Surfant sur la mode WikiLeaks et fuites en tout genre, al-Jazira a commencé à divulguer hier des documents secrets relatifs aux négociations israélo-palestiniennes. Des documents dont la chaîne qatarie estime qu’ils montrent l’ampleur des concessions, notamment sur Jérusalem, auxquelles les négociateurs palestiniens ont pu être prêts. Côté israélien, le Haaretz indiquait qu’Avigdor Lieberman envisageait la constitution d’un mini-État palestinien sur moins de 50 % de la Cisjordanie occupée.
La chaîne d'information arabe al-Jazira a commencé à divulguer, hier soir, et avec force sensationnalisme, des « documents confidentiels » relatifs aux négociations de paix israélo-palestiniennes. Les documents, dont la chaîne basée au Qatar précise qu'elle en possède plus de 1 600, révèlent « les vrais détails tenus secrets sur les négociations entre l'Autorité palestinienne et Israël pendant la décennie écoulée », selon al-Jazira, qui affirme que les révélations annoncées sont corroborées par « des minutes de rencontres, des mémos internes et des documents originaux ». Un site Internet dédié à ces « révélations », intitulé « Palestine Papers » (http ://english.aljazeera.net/palestinepapers/), a également été lancé. Selon al-Jazira, ces documents montrent l'ampleur des concessions que les négociateurs palestiniens seraient prêts à faire. Sur la question des réfugiés, al-Jazira a fait un état d'un accord palestinien portant sur le retour de 10 000 réfugiés par an pendant dix ans. L'ancien Premier ministre palestinien, Ahmad Qorei, est également cité, dans l'un des documents, demandant à l'ancienne ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni, en 2008 de « renforcer le blocus israélien ».
Mais c'est surtout sur la question de Jérusalem que le site d'al-Jazira s'est concentré hier soir. Ainsi, selon la chaîne qatarie, en 2008, les négociateurs palestiniens étaient prêts à des concessions considérables. Ils auraient ainsi accepté d'autoriser Israël à annexer le site de colonisation de Ramat Shlomo ainsi que la quasi-totalité des zones de construction illégales israéliennes à Jérusalem-Est. Cette offre serait intervenue lors d'une rencontre trilatérale à Jérusalem entre Condoleezza Rice, alors secrétaire d'État américaine, Tzipi Livni, Ahmad Qorei et Saëb Erekat, chef des négociateurs palestiniens. Le seul site de colonisation à Jérusalem que l'Autorité aurait refusé de lâcher aux Israéliens serait Har Homa. Selon al-Jazira, M. Erakat aurait affirmé à Livni : « Ce n'est pas un secret que nous vous avons proposé la plus grande Yourshalayem (Jérusalem en hébreu) de l'histoire. »
En ce qui concerne les colonies en Cisjordanie, Qorei aurait dit à Livni que l'Autorité palestinienne « ne pouvait accepter l'annexion des colonies de Ma'ale Adumim, Ariel, Giv'at Ze'ev, Ephrat », des colonies qui mettent en péril la continuité territoriale d'un futur État palestinien. Pour les Israéliens, lâcher ces colonies n'est pas non plus une option.
Les négociateurs palestiniens auraient alors proposé que les colonies israéliennes passent sous souveraineté palestinienne dans un futur État palestinien. « Ma'ale Adumim pourrait rester sous souveraineté palestinienne et devenir un modèle de coopération et de coexistence », aurait dit Qorei à Livni. « Vous savez que ce n'est pas réaliste », aurait répondu Livni.
« Je ne crois pas qu'un leader israélien céderait Ma'ale Adumim », aurait dit Rice.
« Ni aucun leader palestinien », aurait rétorqué Qorei.
« Alors vous n'aurez pas d'État », aurait dit Rice.
Al-Jazira rapporte également que Saëb Erakat aurait proposé, lors d'une rencontre en octobre 2009 avec l'envoyé américain pour le Proche-Orient, George Mitchell, une division de la vieille ville de Jérusalem, le quartier juif et « une partie du quartier arménien » passant sous contrôle israélien. M. Erakat aurait également laissé entendre que l'esplanade des Mosquées (mont du Temple pour les Israéliens) pourrait être le sujet d'une » solution innovante, al-Jazira évoquant la mise sous contrôle international de ce lieu saint. Plus loin, Erakat rappelle aux Américains que des négociations bilatérales sont exclues en l'absence d'un gel de la colonisation.
En face, les Israéliens ont régulièrement répété leur rejet de toute discussion sur Jérusalem. Ainsi, en janvier 2010, lors d'une rencontre avec le président américain Barack Obama, Saëb Erakat souligne le fait que les Palestiniens ont fait des offres sans précédent. « Les Israéliens veulent une solution à deux États, mais ils ne font pas confiance. Dans ce papier, nous leur donnons le plus grand Jérusalem de l'histoire juive, un nombre symbolique en termes de retour de réfugiés, un État démilitarisé... Que puis-je donner de plus ? »
Les révélations d'al-Jazira doivent se poursuivre aujourd'hui.