Entre Washington et Tel-Aviv, c’est un conflit larvé au sujet de la question palestinienne. Si le parti pris pour Israël est le plus évident, il y a un courant qui s’oppose à cet état de fait.
Depuis son arrivée au pouvoir aux Etats-Unis, le président Barack Obama essaie de tenir ses promesses et de trouver une solution au conflit israélo-palestinien. Il a donc fait appel aux négociations directes entre l’OLP et Israël et a marqué toute sa détermination à faire réussir le processus de paix, appelant les Israéliens à prolonger le gel de la colonisation. Ce qu’Israël n’a pas respecté, suscitant des tensions entre Washington et Tel-Aviv.
Hillary Clinton aurait transmis sept demandes au premier ministre, lui demandant de renoncer aux implantations annoncées. Elle exigerait plusieurs gestes comme la libération de centaines de prisonniers palestiniens, l’allégement du blocus de Gaza et l’inclusion des sujets centraux du conflit (frontières, réfugiés, Jérusalem …) dans l’agenda des négociations à venir. Les Américains ne semblent pas avoir l’allant nécessaire à une confrontation avec leur allié privilégié et le puissant lobby pro-israélien et pro-Likoud de l’Aipac (American Israel Public Affairs Committee), dont la voix domine toujours le débat sur Israël aux Etats-Unis, malgré la montée de groupes libéraux comme J Street.
L’Aipac, 100 000 membres, 75 millions de dollars de budget et 165 employés, constitue un soutien indéfectible à la droite israélienne de Benyamin Netanyahu et à l’alliance stratégique entre les Etats-Unis et l’Etat hébreu.
J Street, nouveau venu sur la scène politique américaine, ayant à sa disposition 3 millions de dollars et 15 employés, fait figure de progressiste et n’hésite pas à réclamer des concessions de la part d’Israël pour faire progresser la paix, et fut créée en 2008 pour concurrencer l’Aipac, jugé peu représentatif de la communauté juive américaine. J Street représente l’avis d’autres groupes, y inclus les juifs, mais qui ne partagent pas les croyances de l’Aipac. Il gagne en représentativité et donc en légitimité. Il a publié une série de sondages, dont les résultats sont édifiants : 64 % des juifs américains veulent une diplomatie volontariste au Proche-Orient impliquant une critique d’Israël. Et 66 % prônent une reprise des négociations avec le Hamas et la Syrie.
Depuis les tensions entre Israël et les Etats-Unis à cause des nouvelles implantations à Jérusalem-Est, les deux lobbys ennemis (Aipac et J Street) ont renforcé leurs positions. L’Aipac, qui voit d’un œil de plus en plus critique la volonté d’Obama de rééquilibrer la politique extérieure des Etats-Unis au Proche-Orient, a critiqué l’attitude de l’administration américaine à l’égard d’Israël et a appelé l’administration américaine à « prendre des mesures immédiates pour apaiser la tension avec l’Etat hébreu ».
J Street a une attitude tout à fait opposée à celle de l’Aipac. Il juge la colère de l’administration à la fois compréhensible et juste. « L’heure n’est plus aux vaines paroles mais à l’action », peut-on lire sur le site Internet du lobby, qui soutient la solution à deux Etats prônée par la diplomatie américaine. En plus, J Street assure que le plan de paix doit être négocié avec l’ensemble des parties du conflit, le Hamas y compris.
Malgré la divergence entre ces deux groupes et les promesses d’Obama, les pressions américaines sur Israël restent contrôlées par les intérêts stratégiques qui relient les deux pays depuis longtemps. « L’arrivée d’Obama n’a rien changé au fond des relations stratégiques entre les Etats-Unis et Israël », a dit Dr Abdel-Menaam Al-Mashat, professeur de sciences politiques et spécialiste de sécurité nationale américaine. Habiba Mohsen, doctorante et chercheuse au Forum arabe des alternatives, explique que les bonnes intentions d’Obama ne suffisent pas pour restaurer la paix et qu’Israël restera l’allié stratégique des Etats-Unis. Donc les pressions s’arrêtent à une ligne rouge.
Mavie Maher