Entre la reprise de la colonisation et la demande de reconnaître Israël comme un « Etat du peuple juif », Benyamin Netanyahu ne laisse plus aucune chance à la paix, à moins d’une intervention musclée de la part des Américains.
En liant l’arrêt de la colonisation à la reconnaissance du caractère juif d’Israël, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a donné un ultime coup au processus de paix. Car l’arrêt de la colonisation était une condition à la poursuite des négociations israélo-palestiniennes. Plus de négociations donc, et plus de processus de paix non plus. Israël s’entête et les Palestiniens ne veulent plus faire davantage de concessions. Tout porte à croire que c’est l’impasse. A moins d’un miracle.
En effet, Benyamin Netanyahu a publiquement proposé un gel de la colonisation en échange de la reconnaissance d’Israël comme « Etat du peuple juif », un marché aussitôt rejeté par les Palestiniens, qui l’estiment comme « sans rapport avec le processus de paix ». « Si la direction palestinienne dit sans ambiguïté à son peuple qu’elle reconnaît Israël comme l’Etat-nation du peuple juif, je serai prêt à réunir mon gouvernement pour demander un nouveau moratoire sur la construction » dans les colonies juives de la Cisjordanie occupée, a déclaré M. Netanyahu devant le Parlement israélien. « J’ai déjà transmis ce message via des canaux discrets et maintenant je le dis en public », a-t-il précisé. Il a assuré ne pas faire de cette question « une condition aux pourparlers », mais a estimé qu’il s’agirait d’une « mesure d’établissement de la confiance » envers la population israélienne, qui témoignerait de la sincérité de la volonté de paix des Palestiniens. « Cette question n’a de rapport ni avec le processus de paix ni avec les obligations qu’Israël n’a pas remplies. Nous la rejetons aussi bien en bloc que dans le détail », a immédiatement rétorqué le principal négociateur palestinien, Saëb Erakat, qui a accusé le gouvernement israélien de s’obstiner à tuer toute chance de reprise des négociations, après sa décision de lancer des appels d’offres pour des logements de colons à Jérusalem-Est.
De son côté, Mahmoud Abbass a réaffirmé que les Palestiniens n’avaient pas à reconnaître le caractère juif de l’Etat d’Israël vu qu’ils ont déjà reconnu l’Etat. « Tous les jours, vous (les Israéliens) venez avec une nouvelle exigence. Cela suffit », a ironisé M. Abbass, un sourire aux lèvres. Et de prévenir : « Le désespoir alimentera l’extrémisme ». Mais le président palestinien tente de rester optimiste, déclarant qu’il gardait « de grands espoirs dans les efforts américains » de relancer le dialogue et en écartant l’hypothèse d’une nouvelle intifada.
Ainsi, le seul espoir à l’heure actuelle est que les Etats-Unis puissent faire suffisamment pression sur Israël. Or, ceux-ci se contentent de manifester leur déception quant à la reprise des activités de colonisation, estimant qu’elle compromettait leurs efforts de relance des pourparlers. « C’est contraire à nos efforts visant à relancer les négociations directes », a déclaré le porte-parole du département d’Etat américain, Philip Crowley. En mars dernier, l’annonce par le ministère de l’Habitat d’un projet de colonisation à Jérusalem-Est, en pleine visite du vice-président américain, Joe Biden, avait profondément irrité les Etats-Unis. Et M. Netanyahu avait dû présenter ses « regrets » pour le moment choisi pour cette annonce. Aujourd’hui, les Israéliens semblent se comporter à leur guise, ne craignant rien ni personne. Les Etats-Unis ont simplement accueilli favorablement la contre-proposition palestinienne à l’offre du premier ministre, Benyamin Netanyahu, estimant qu’elle était « le type de dialogue » susceptible de régler le différend sur la colonisation juive.
De son côté, l’Europe, dont le rôle est marginalisé dans le processus de paix entre Israël et les Palestiniens, tente d’intervenir pour éviter le pire. Le président français, Nicolas Sarkozy, qui dénonce les échecs successifs de ces négociations sous la seule houlette des Etats-Unis, expose régulièrement sa volonté de voir la France et l’Union européenne prendre une plus grande part dans le processus. Il a ainsi proposé un sommet à Paris réunissant le président palestinien, Mahmoud Abbass, le président égyptien, Hosni Moubarak, et le chef du gouvernement israélien, Benyamin Netanyahu. Mais pour l’heure, la rencontre reste hypothétique. « Après consultations, les parties concernées se sont mises d’accord pour décider d’une autre date », a déclaré le bureau de M. Netanyahu, sans plus de précisions. Cette décision a été implicitement confirmée par le principal négociateur palestinien Saëb Erakat. « La poursuite de la colonisation israélienne ruine tous les efforts de paix, que ce soient ceux du président (américain) Barack Obama ou ceux du président (français) Nicolas Sarkozy », a-t-il déclaré. Rien de nouveau .
Ines Eissa