Emad Gad, rédacteur en chef d’Israeli Digest, souligne qu’en cas de bonne foi, les pourparlers directs peuvent mener à une solution dans trois mois.
Al-Ahram Hebdo : Tout d’abord, pouvez-vous expliquer pourquoi les négociations sont relancées à présent en particulier ?
Emad Gad : Le conflit israélo-palestinien a toujours occupé une place importante sur l’agenda du président américain Barack Obama même depuis la présentation de sa candidature à la présidence américaine. Des négociations directes entre Palestiniens et Israéliens étaient le moyen qu’il envisageait pour arriver à une solution de ce conflit historique. Il fallait donc du temps pour préparer la relance de ces négociations dans un contexte mondial, ce qui n’est pas du tout facile. Et voilà enfin qu’elles sont lancées.
— Pensez-vous qu’elles puissent vraiment aboutir à une solution au bout d’une année comme prévu ?
— Elles peuvent même donner lieu à des résultats clairs au bout de 3 mois et non pas une année comme il est exigé. Cela dépend du respect des paramètres qu’avait établis l’ex-président américain Bill Clinton et qui furent approuvés en décembre 2000 par les deux camps israélien et palestinien. Ces paramètres se sont intéressés aux sujets sensibles tels que la colonisation, les réfugiés, les frontières et Jérusalem.
— Quels sont les obstacles devant ces négociations ?
— Concernant donc ces paramètres, l’OLP sera flexible parce que Arafat les avait déjà acceptés, on peut donc s’attendre à des résultats positifs. Quant au Hamas et les autres factions, ils se sont déclarés contre ces négociations et ont déclaré et souligné que leur riposte interviendra prochainement. C’est sur cela que compte Israël. Brandir des fusils ou mener des attaques violentes peut être un prétexte pour Netanyahu afin de geler les négociations. Il veut suivre les démarches de Sharon en traçant les grandes lignes d’une solution sans appliquer, c’est Netanyahu seul qui a le pouvoir de mettre les obstacles face aux démarches de paix ou, au contraire, les faire évoluer. Par exemple, Ytzhak Rabin après Oslo a choisi de poursuivre ce qu’il a commencé malgré les attaques violentes du Hamas.
— Comment la présence de l’Egypte et de la Jordanie a-t-elle placé le dossier dans un contexte régional ?
— La présence égyptienne et jordanienne représente une couverture arabe qui légitimise les négociations face au groupe formé de Syrie, du Hezbolah et du Hamas qui les considèrent illégitimes. Le choix de l’Egypte et de la Jordanie peut être expliqué dans le contexte des relations diplomatiques que ces deux pays entretiennent avec Israël, si par exemple l’Arabie saoudite avait des relations diplomatiques avec l’Etat hébreu, elle aurait pu y être invitée. Le président Moubarak, dans un article au New York Times avant les négociations, a indiqué les grandes lignes à respecter : le retour aux frontières de 1967, le gel des colonies et la normalisation avec Israël à condition de régler les dossiers syriens et libanais.
— A quel point il y aura une partie plus privilégiée que l’autre ?
— Les négociations reflètent la situation réelle. Les Palestiniens comprennent sans doute qu’il y a un plafond à leurs ambitions. Pas de droit absolu de retour des réfugiés en Palestine, pas de retour complet aux frontières de 67, donc le but c’est de parvenir au maximum de ce qui est réalisable. Le problème est que les dirigeants mentent à leurs peuples, on fait vivre les gens dans des illusions loin du réel.
— A quel point ces négociations peuvent-elles représenter un tournant de l’histoire du conflit ?
— Pour garantir la réussite de ces négociations, les Palestiniens doivent au moins être d’accord sur les paramètres de Clinton, et ils risquent des dangers s’ils n’arrivent pas à réaliser une réconciliation nationale entre différentes factions. Les Etats-Unis doivent soutenir les négociations puisque c’est la seule chance susceptible de réaliser la paix. L’Egypte soutient Abou-Mazen et lui fournit la couverture convenable. Israël doit faire preuve de bonne foi afin de parvenir à une solution. Si vraiment ces négociations réussissent, cela sera un tournant dans le conflit israélo-palestinien et peut-être le germe de paix entre des générations arabes et israéliennes à venir, surtout que les nouvelles générations arabes n’ont pas été témoins des grands événements du conflit.
Propos recueillis par Mavie Maher