Democraty Now !
En 2005, une coalition de groupes de la société civile palestinienne a appelé les gens du monde entier à s’engager dans une campagne non-violente pour boycotter, désinvestir de et sanctionner Israël jusqu’à ce qu’il se conforme à la loi internationale. L’appel était inspiré par les initiatives internationales de boycott et de désinvestissement appliquées à l’Afrique du Sud dans la lutte pour abolir l’apartheid. Nous accueillons un débat entre Omar Barghouti, un membre fondateur de la campagne BDS et un commentateur et militant des droits humains palestiniens, et le rabbin Arthur Waskow, depuis longtemps militant anti guerre et pour les droits civils, fondateur et directeur du Shalom Center.
Invités :
Omar Barghouti
Omar Barghouti, membre fondateur de la campagne BDS et militant et commentateur palestinien des droits humains.
Rabbin Arthur Waskow
Rabbin Arthur Waskow, depuis longtemps militant anti guerre et pour les droits civils, fondateur et directeur du Shalom Center.
Juan Gonzalez : Des négociations indirectes entre les dirigeants Israéliens et Palestiniens doivent commencer au début de la semaine prochaine alors que l’envoyé des États-Unis au Moyen-Orient George Mitchell retourne dans la région. La ligue Arabe a accepté de soutenir la proposition étasunienne de quatre mois de discussions indirectes.
Alors que beaucoup d’observateurs sont sceptiques sur le succès de ces discussions dites de proximité, quand des années de négociations directes ont échoué à produire une paix équitable et durable, pendant ce temps la société civile palestinienne et les militants de la solidarité internationale utilisent des tactiques très différentes pour pousser à une juste résolution du conflit.
En 2005, une coalition de groupes palestiniens de la société civile a appelé les gens du monde entier à s’engager dans une campagne non-violente pour boycotter, désinvestir de et sanctionner Israël jusqu’à ce que il se conforme à la loi internationale. Inspiré par les initiatives de boycott et de désinvestissement appliquées à l’Afrique du Sud dans la lutte pour abolir l’apartheid, le nouveau mouvement de Boycott, Désinvestissement et Sanctions, en bref BDS, était né.
Amy Goodman : Cette semaine marque de ce que beaucoup d’activistes du BDS appellent « la semaine de l’apartheid israélien ». Lancée d’abord à l’université de Toronto en 2005, elle comprend maintenant des événements dans les campus universitaires de plus de 40 villes autour du monde.
Plusieurs responsables Israéliens et des organisations juives de la diaspora ont critiqué les événements, et un rapport récent d’un think-tank israélien met l’accent sur le mouvement BDS comme une partie d’un « réseau de délégitimation » qu’Israël devrait traiter comme une « menace existentielle potentielle ».
Eh bien aujourd’hui nous allons accueillir un débat sur le mouvement BDS, l’appel à boycotter, désinvestir de et sanctionner Israël. Omar Barghouti est un membre fondateur de la campagne BDS. Il est militant des droits humains palestiniens et commentateur. Il se joint à nous depuis Berkeley, Californie. Et pour une position anti-BDS, nous sommes rejoints depuis Philadelphie par le rabbin Arthur Waskow, un militant anti guerre et des droits civils de longue date, fondateur et directeur du Shalom Center, http://wwwtheshalomcenter.org.
Nous vous accueillons tous les deux à Democracy Now ! Omar Barghouti, ne voulez-vous pas expliquer pourquoi vous avez établi la campagne BDS, pourquoi vous voulez que les gens boycottent, désinvestissent et sanctionnent Israël ?
Omar Barghouti : La campagne boycott, désinvestissements et sanctions, ou BDS, est un appel de la société civile palestinienne. Il est soutenu par presque toute la société civile palestinienne, les forces politiques, O.N.G., organisations de femmes, syndicats, etc.
Il appelle les personnes de conscience autour du monde à boycotter Israël et les institutions complices d’Israël, y compris les compagnies, etc., à cause de son système d’oppression à trois niveaux contre le peuple palestinien : son occupation, en 1967, de la Cisjordanie, de Gaza et ceci inclut Jérusalem Est ; ainsi que son système de discrimination raciale contre ses citoyens non juifs, les citoyens Palestiniens d’Israël ; et le troisième et plus éminent est son refus du droit au retour des réfugiés, les réfugiés Palestiniens, en accord avec la résolution 194 de l’ONU. Alors, ces trois formes d’injustices sont exactement ce que nous visons. Nous visons Israël par ce que nous voulons mettre fin à son impunité, et nous voulons mettre fin à la complicité du monde avec ce système d’injustice.
Juan Gonzalez : Et, Rabbin Arthur Waskow, pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous pensez que c’est une fausse approche du problème ?
Rabbin Arthur Waskow : Alors, permettez-moi d’abord de dire shalom et salam et la paix sur vous, Amy et Juan, et à M. Barghouti, et de dire, pour commencer, que dans un sens je pense que la question oui ou non au BDS est la mauvaise question. La bonne question est, comment est-ce que nous parvenons à finir l’occupation israélienne de la Cisjordanie, de Gaza, et du blocus de Gaza, et de Jérusalem Est ? Et il me semble que si on pose la question de cette façon, le BDS devient en réalité inefficace et, à certains égards, une manière antiéthique d’y arriver, et le changement majeur qui doit arriver est un changement profond des actions du gouvernement des USA, et il y avait des indices de cela, plus que des indices, dans la rhétorique du président Obama, mais un échec total de traduire en politique la rhétorique du discours du Caire et un certain travail depuis.
La vraie question est, les Etats-Unis peuvent-ils - ils le peuvent, c’est sûr - les Etats-Unis utiliseront-ils leur énorme influence et pouvoir pour mettre fin à l’occupation, pour finir l’état de guerre entre Israël et le monde arabe entier à l’exception de l’Égypte et la Jordanie ? Les Etats-Unis peuvent-ils parvenir à un traité de paix complet entre un nouvel État de Palestine, l’État d’Israël et les états arabes ? Les états arabes ont, en réalité, proposé cela. Le gouvernement israélien et le dernier gouvernement US, l’administration Bush, ont complètement ignoré la proposition. Il y a des indications que c’est ce que l’administration Obama veut occasionner.
Mais ceci n’aura pas lieu à moins qu’il y ait un mouvement public dans la société américaine pour l’exiger. Sinon ça n’aura pas lieu. Et quand je pose la question, alors qu’elle est le moyen le plus efficace pour y parvenir, il me semble qu’une alliance entre les trois groupes de gens en Amérique qui sont passionnément intéressés par les peuples du Moyen-Orient - les Musulmans, les Chrétiens sérieux et les Juifs sérieux - une alliance de ceux de ces trois camps qui sont engagés pour la paix est maintenant possible. Dans la communauté juive, il y a maintenant des organisations et des engagements et des êtres humains prêts à agir sur cela, même si la structure classique, formelle, institutionnelle du système institutionnel juif établi ne le fait pas. Mais les juifs oui, et parmi des musulmans et parmi la plupart des protestants et des chrétiens catholiques — par certains des fondamentalistes chrétiens de droite, mais le reste de la communauté chrétienne. Mais ils ne se sont pas du tout unis pour que cela ait lieu. Et c’est ce qui doit avoir lieu.
Ce sont les raisons qui me font penser que le BDS est une fausse approche. Et je vais aborder ces —
Omar Barghouti : Est-ce que je peux interrompre ?
Rabbin Arthur Waskow : — mais je voudrais indiquer que je pense qu’il est un autre moyen d’y parvenir.
Amy Goodman : Avant qu’Omar Barghouti réponde, j’aimerais rester avec vous, rabbin Waskow. Vous avez soutenu le mouvement anti-apartheid. Vous avez soutenu le mouvement de désinvestissement et de sanctions contre l’Afrique du Sud. Mais vous appelez le mouvement BDS contre Israël, comme vous venez juste de dire, peut-être anti-éthique. Quel est pour vous la différence ?
Rabbin Arthur Waskow : Eh bien, une différence majeure est une différence stratégique. L’énorme soutien au régime d’apartheid d’Afrique du Sud ne venait pas de sources gouvernementales. Elle venait de banques privées. J’ai fait un sit-in à la banque Chase Manhattan en 1965 pour demander qu’elle cesse ses prêts au gouvernement d’apartheid. Dans la situation actuelle, l’énorme soutien économique ne vient pas des banques privées et de l’industrie. Il y en a, mais ce n’est pas le gros soutien. Le gros soutien vient du gouvernement des États-Unis. C’est complètement différent de la situation sud-africaine. Si vous appliquez le genre de question de base de l’Afrique du Sud, comment allez-vous changer les relations économiques, avec le comportement injuste du gouvernement israélien maintenant et le comportement injuste et violent et vil à l’occasion de certains leaders Palestiniens ? Comment changez-vous ça ? C’est le gouvernement des États-Unis que vous devez viser, pas l’industrie privée ou le commerce privé. Alors c’est une vraie grosse différence simplement au niveau stratégique et tactique.
Éthiquement, le problème est qu’il y a une vraie société israélienne avec une sous-structure appréciable : culture, économie, mode de vie, la renaissance de l’hébreu, la création de romans, etc., etc. L’ennui avec le BDS, les sanctions et boycotts tous azimuts et tout ça vis-à-vis d’Israël, c’est que ça diabolise la société israélienne. Ca ne dit pas qu’il y a un gouvernement israélien qui se comporte mal, et par conséquent nous devons exercer une pression sur le gouvernement israélien, tout comme, au passage, et pas tellement au passage, les gens qui ont fait le voyage de la liberté de Gaza ont découvert qu’arrivés à Gaza, Hamas a agi de manière injuste et répressive envers eux. Il ne voulait pas qu’ils prennent contact avec les Palestiniens de Gaza, les vrais gens des rues. Aussi ce n’est pas seulement la diabolisation d’un peuple entier et la sanctification d’un autre peuple. Le gouvernement israélien, de manière écrasante, certains leaders palestiniens, moins fortement parce qu’ils ont moins de pouvoir, agissent injustement et oppressivement. C’est là que l’accent doit être placé. Le BDS diabolise toute une société.
Juan Gonzalez : Omar Barghouti, que dites-vous de la question numéro un, sur la campagne diabolisant une société tout entière ? Et aussi, si vous pouvez parler des similarités que vous voyez entre la campagne de boycott antiapartheid et celle-ci, particulièrement dans la situation où les Etats, les Etats existant dans le monde, étaient incapables de remédier à la situation en Afrique du Sud ou à la situation actuelle au Moyen-Orient ?
Omar Barghouti : OK, il y a des similarités évidentes, mais ce n’est pas seulement sur les similarités entre le système colonial et d’apartheid israélien et le système d’apartheid sud-africain. C’est sur la question de savoir si Israël pratique effectivement l’apartheid et un régime colonial contre les indigènes Palestiniens. Et c’est le cas. Et c’est le cas d’après la convention de l’ONU sur la suppression du crime d’apartheid. Nous n’avons pas à prouver qu’Israël est identique à l’Afrique du Sud pour prouver qu’Israël pratique l’apartheid. Nous disons qu’il se conforme à la définition par l’ONU du système d’apartheid.
Qu’est-ce que nous voulons dire par cela ? À l’intérieur même d’Israël — oubliez les territoires palestiniens occupés en 1967 — dans Israël, il y a deux systèmes de lois : un qui s’applique à ses citoyens Juifs, qui sont aussi des nationaux, et un autre qui s’applique aux citoyens non-juifs. Ainsi il y a une claire discrimination. Même le département d’État des USA, dans ses rapports annuels sur les droits humains, accuse Israël de discrimination institutionnalisée légale et sociétale contre les citoyens Palestiniens arabes de l’État d’Israël.
Alors, comment mettons-nous fin à l’occupation, à l’apartheid et au déni des droits des réfugiés ? C’est par le boycott, le désinvestissement et les sanctions comme outil de puissance qui permet aux masses, au mouvement social d’agir pour changer la politique des USA, exactement comme nous vous avons fait — et j’étais dans le mouvement antiapartheid dans le cas sud-africain — comme nous avons fait contre l’apartheid sud-africain.
Bien sûr il y a une complicité des gouvernements occidentaux, mais c’était aussi le cas pour l’apartheid sud-africain, et les compagnies et les institutions. Le moyen le plus important pour remettre en cause ce système de complicité et pour remettre en cause l’impunité et l’exceptionnalisme d’Israël — Israël est mis sur un piédestal, et il n’est pas traité comme le reste du monde quand il s’agit de ses violations des droits humains et de la loi internationale — nous devons l’abattre de ce piédestal et le traiter comme n’importe quel autre offenseur, n’importe quel autre système qui crée de telles injustices. Il ne s’agit pas de diaboliser Israël comme dans une expression abstraite. Ce que le BDS délégitime, c’est le racisme, l’apartheid et le régime colonial, exactement ce que le BDS délégitimait dans le cas sud-africain. Il ne délégitimait pas les blancs ou les Chrétiens, il délégitimait l’apartheid. C’est aussi ce contre quoi nous sommes. Nous ne sommes jamais venus et n’avons jamais dit que nous étions contre tel ou tel groupe de gens sur la base de leur identité. Nous sommes contre l’apartheid et le colonialisme israélien. Ce serait rigoureusement pareil qu’Israël soit un État juif, catholique ou musulman. Tant qu’il nous opprime, nous continuerons à lui résister.
Et le BDS est une forme de résistance très efficace et non violente. Il s’accroit énormément. Personne ne peut parler de la part des Juifs du monde, comme s’ils étaient tous dans le même panier. Je pense que c’est complètement inapproprié. Il y a beaucoup de groupes juifs qui soutiennent le mouvement BDS, y compris à l’intérieur d’Israël, y compris dans ce pays. Et de plus en plus en Europe de l’Ouest, de nombreux groupes juifs rejoignent le mouvement BDS, parce qu’ils le considèrent comme un mouvement très cohérent moralement. Il est basé sur la loi internationale et sur les droits humains universels. Il ne fait pas de distinction entre les gens selon leur identité comme le fait le système israélien.
En second lieu, l’État israélien n’est pas seul dans le vide. Il est complètement soutenu par les institutions de l’État d’Israël, y compris les institutions universitaires et culturelles. Aucune dose de pub, de groupes de danse, de musique et de poésie ne peut masquer le système colonial et d’apartheid d’Israël. Cet effort de changement d’image est précisément anti-éthique, parce qu’il essaie de blanchir ce système d’oppression.
Et le dernier point que je veux mentionner, c’est que c’est un moment très opportun pour débattre de cela, au moment où les étudiants de l’université de Californie se battent contre l’incroyable augmentation des frais d’inscription et contre la privatisation, pour ainsi dire de par l’arrière, de l’éducation supérieure dans ce pays. Pourquoi l’université de Californie devrait-elle augmenter les droits d’entrée de 32 % alors qu’Israël reçoit des États-Unis plus de 5,6 milliards de dollars annuels d’aide militaire et d’autres formes d’aide ? Pourquoi Israël, un système colonial et d’apartheid, continue-t-il de recevoir cet énorme subside, des dizaines de milliards de dollars au cours des années d’occupation et d’apartheid, tandis que le système de santé, d’éducation et l’infrastructure de ce pays s’effondrent et que l’éducation, l’éducation supérieure, devient à nouveau un privilège du riche ? L’éducation devrait être disponible pour tous. Et pour cela nous devons vraiment demander où sont les priorités des financements des USA.
Amy Goodman : Omar Barghouti, que dites-vous du point du rabbin Waskow, qu’il est moins important de viser Israël, que les États-Unis sont le vrai pouvoir dans cette situation avec son énorme soutien pour Israël ? Et aussi, dans votre mouvement BDS, quelles compagnies viseriez-vous ?
Omar Barghouti : OK. Mais précisément parce que ce sont les USA qui sponsorisent l’oppression et l’apartheid israélien, nous essayons effectivement de changer la politique des USA. La question est comment y parvenir. Nous avons le précédent sud-africain, une très bonne leçon à étudier, que c’est la manière de changer la politique aux USA. Pas en mendiant. Pas en écrivant des lettres à Obama qu’il ignorerait. C’est par le mouvement de masse, le mouvement social à la base, les étudiants, les églises, les syndicats, les groupes de femmes et féministes, etc., tous agissant ensemble sur une plate-forme antiraciste, progressiste et qui veut la fin de l’injustice.
Rabbin Arthur Waskow : Je suis d’accord avec ça, mais la question est : le BDS est-il le moyen de mettre ensemble ce mouvement social.
Omar Barghouti : Je le pense — je pense — je pense que c’est la question. Que nous devons agir à partir de la base jusqu’aux pressions et aux changements.
Les compagnies — votre deuxième question est quelles compagnies visons-nous dans le mouvement BDS. Ceci varie. Le BDS n’est pas une taille unique pour habiller tout le monde. Il dépend du contexte. Dans chaque situation, nous visons des compagnies complices de l’apartheid et de l’occupation israélienne pour lesquels nous pouvons gagner dans notre combat. Ainsi aux USA, beaucoup de compagnies militaires américaines sont visées. En Suède, une compagnie française a été visée. En Grande-Bretagne — et ainsi de suite. Ce sont les compagnies israéliennes de même que les compagnies internationales qui sont complices de l’apartheid et de l’occupation israélienne.
Amy Goodman : Rabbi Waskow, votre réponse ?
Rabbin Arthur Waskow : Eh bien, avant tout, il est intéressant que M. Barghouti mette l’accent sur l’aide militaire certainement déraisonnable que les États-Unis donnent à Israël — et, d’ailleurs, aussi à l’Égypte — comme étant le problème pour l’université de Californie, alors qu’en fait 10 ou 20 ou 30 fois cette quantité d’argent est dépensée dans la guerre en Irak et en Afghanistan. Les gigantesques quantités d’argent qui devraient aller aux écoles, aux universités et à l’infrastructure américaine devraient venir de là. Et selon ce standard, c’est presque — une goutte dangereuse et toxique dans le seau, mais c’est une goutte dans le seau — l’aide à Israël et à l’Égypte, avec l’aide militaire pour eux. La grande question de la société américaine devrait être la distorsion écrasante impliquée dans les guerres massives en Afghanistan et en Irak et l’armée américaine congestionnée à part et à côté de ces guerres.
Mais en deuxième lieu —
Omar Barghouti : C’est le même programme.
Rabbin Arthur Waskow : - la question est, effectivement, comment créer vous un mouvement de masse ? Comment créer tout un mouvement social ? Et je pense que ce qui doit se produire, c’est ce que j’ai dit. Les mosquées, les églises, les synagogues et, oui, les féministes et les étudiants etc., devraient se réunir et exiger que le gouvernement des États-Unis insiste sur l’indépendance palestinienne, en Cisjordanie, Gaza et Jérusalem Est, tout cela, approximativement dans les frontières de 1967, et pour un traité de paix total pour Israël avec les états arabes. Ceci est une demande éthique. Elle ne diabolise personne. Elle met fin à l’oppression de l’occupation. Elle met fin au danger -
Omar Barghouti : Mais vous ignorez la majorité des Palestiniens.
Juan Gonzalez : Euh-
Omar Barghouti : Vous ignorez la majorité des Palestiniens.
Rabbin Arthur Waskow : Non, ça n’ignore pas la majorité des-
Juan Gonzalez : J’aimerais demander au rabbin Waskow, la question de — Israël est évidemment ennuyé par cette campagne de délégitimation, et un des think-tank israélien, Reut, a publié toute une analyse et une stratégie pour le combattre. Et il a parlé du fait que généralement Israël s’est concentré sur les relations d’État à État pour parvenir à ses fins. Ici, aux États-Unis, vous dites que nous devrions nous focaliser, ou que les gens devraient se focaliser sur un changement de la politique du gouvernement. Mais est-ce que le fait que aussi bien les partis Démocrates que Républicains, virtuellement toutes les directions des deux partis se sont alignées pendant des décennies derrière la politique israélienne, n’indique-t-il pas que peut-être une direction différente, une approche par la société civile, comme celle représentée par la campagne BDS, est un nouveau moyen d’avancer et que c’est précisément le fait que c’est un mouvement non étatique qui se développe sous le BDS qui gêne par son efficacité certains segments de la société israélienne ?
Rabbin Arthur Waskow : Non, ce n’est pas la raison. Ça les dérange parce qu’il y a de l’organisation en cours. Je vous assure que si, dans les villes, les mosquées, les églises et les synagogues américaines, ensemble, disaient « nous allons exiger que nos membres du congrès insistent — et le président — insiste sur un traité de paix complet pour un État palestinien indépendant, côte à côte avec Israël, et sur un traité de paix complet avec le reste du monde arabe », que le gouvernement israélien — l’actuel — aurait beaucoup plus peur, et que le peuple israélien s’exciterait à l’idée que enfin, enfin, un traité de paix mettant fin aux pressions sur Israël, avec pour seule compensation — et pour beaucoup d’Israéliens ce serait une bonne compensation — de se retirer de la Cisjordanie, de Gaza et de Jérusalem Est.
Et dans la communauté juive américaine, qui a été hostile à toute sorte d’arrangement que le gouvernement israélien n’aimerait pas, une telle approche, incluant un traité de paix complet pour Israël, ainsi qu’un traité de paix complet avec la Palestine, ceci serait attractif pour une proportion énorme de la communauté juive américaine. Les organisations ne le soutenons pas s’aligneraient ou s’effondreraient à la suite. C’est le social — je suis d’accord sur la nécessité du mouvement social, mais ça ne va pas réussir par le BDS. Ça va être en visant la cible la plus importante —
Omar Barghouti : Mais c’est en cours.
Rabbin Arthur Waskow : -le gouvernement des États-Unis.
Omar Barghouti : Mais c’est en cours.
Juan Gonzalez : Omar Barghouti, votre réponse ?
Omar Barghouti : Oui, eh bien d’abord, c’est en cours. Je veux dire, le rabbin nie que c’est en cours. En vérité le BDS s’étend considérablement. Nous avons un important soutien de grands syndicats en Grande-Bretagne, Norvège, Espagne, France, Italie et beaucoup, beaucoup de pays, Canada bien sûr. Et il entre de plus en plus aux États-Unis, plus lentement que dans le reste du monde occidental, mais c’est en cours. Il y a un énorme mouvement de soutien aux BDS qui inclut plusieurs groupes juifs, et c’est ignoré. Il y a un nombre disproportionné de Juifs, — de citoyens de conscience juive des pays occidentaux qui ne sont pas seulement actifs, mais qui mènent certains mouvements BDS dans le monde occidental.
Mais encore une fois, revenons à la question. Il ne s’agit pas seulement de finir l’occupation. Il y a trois droits élémentaires pour le peuple palestinien. Il se trouve que la majorité des Palestiniens ne sont pas dans les territoires palestiniens occupés ; il se trouve que ce sont des réfugiés, nettoyés ethniquement pendant la création de l’État d’Israël en et après 1948. Ils sont complètement ignorés en adressant — en réduisant les droits palestiniens à l’autodétermination à la seule fin de l’occupation. Ceci est tout simplement inacceptable. Nous devons considérer l’apartheid et israélien, le système de discrimination raciale, et nous devons considérer les droits des réfugiés sanctionnés par l’ONU.
Mais la question la plus critique à adresser maintenant — maintenant, pas stratégiquement — est la fin du siège de Gaza. Il y a un siège criminel de Gaza. Le rapport Goldstone, le rapporteur de l’ONU pour les droits humains, tous décrivent les crimes de guerre commis par Israël à Gaza. Et le siège est certainement une grosse punition collective, ce qui est un crime contre l’humanité. Les gens meurent. Les gens réels meurent. Ce n’est pas une notion abstraite. Le siège doit cesser.
Ainsi, nous arrivons au stade où Israël commet des actes de génocide au ralenti contre 1,5 millions de Palestiniens à Gaza. C’est extrêmement critique, et ceci exige des personnes de conscience autour du monde d’agir, et d’agir très efficacement. Et le mouvement BDS offre un outil puissant, non-violent par lequel ils peuvent avoir un impact sur la politique aux USA, dans le monde occidental, et certainement en Israël.
Amy Goodman : Avez-vous le sentiment, rabbin Arthur Waskow-
Rabbin Arthur Waskow : Eh bien, je suis d’accord que le-
Amy Goodman : -Y a-t-il un point — rabbin Waskow, y a-t-il un point où vous soutiendriez — un point à partir duquel vous soutiendriez le BDS ? Qu’est-ce qui - qu’est-ce qui selon vous doit être pire ?
Rabbin Arthur Waskow : Non, ce n’est pas une question de ce qui doit devenir pire. La question est comment mettre fin au pire. Et je ne pense pas que le BDS va y mettre fin. Et si le BDS se répand en Europe occidentale, ça n’aura pas d’importance. Ce sont les États-Unis qui ont le pouvoir réel de faire la différence. Et le BDS ne va pas engager une part suffisante de la population américaine pour compter. Ce qui va compter c’est la structure de l’aide militaire américaine et la structure de la diplomatie américaine vis-à-vis d’Israël, de l’Égypte et du monde arabe. C’est ce qui compte. Et le BDS et l’Europe occidentale n’auront pas d’importance. Alors ce n’est pas une question de ce qui empire, c’est une question de comment stopper le pire. Et je répète, le — oui, il faut un mouvement social. Il y a maintenant — dans la communauté juive —, il n’y a pas seulement J Street qui a absorbé et donné force aux gens de Brit Tzedek v’Shalom, il y a aussi un mouvement à l’intérieur du mouvement juif réformé. Il y a un mouvement parmi les Juifs qui, en théorie, ne sont pas affiliés, mais qui sont préoccupés par cette question, et qui ne se sentent pas représentés par la plupart des institutions juives américaines établies. C’est là que le changement doit assembler, et en parallèle, il doit inclure les églises protestantes et catholiques, il doit inclure l’islam en Amérique. Et le travailler ensemble, c’est ce qui va faire la différence. Ce sont les seuls Américains, à part, je suppose, ceux des compagnies pétrolières, qui sont se sentent concernés par le Moyen-Orient.
Amy Goodman : Nous allons devoir — nous allons devoir en rester là pour maintenant. Nous voulons remercier le rabbin Arthur Waskow, fondateur et directeur du Shalom Center, and Omar Barghouti, qui est un des membres fondateurs de la campagne BDS, la campagne pour boycotter, désinvestir de et sanctionner Israël.
Rabbin Arthur Waskow : Et je veux terminer en répétant shalom and salaam et la paix sur nous tous.
Amy Goodman : Merci.
4 mars 2010 - Democracy Now ! - Vidéo sur : http://www.democracynow.org/2010/3/4/bds
Traduction : Jean-Pierre Bouché
http://info-palestine.net/article.php3?id_article=8330
Traduction : Jean-Pierre Bouché
http://info-palestine.net/article.php3?id_article=8330