Yousef Munayyer - Al Jazeera
Chaque décennie, se joue un nouvel épisode de la Nakba pour les réfugiés palestiniens, dans les pays d’accueil en difficulté.
- Yarmouk est le dernier rappel de l’échec de la communauté internationale à prendre soin du sort des réfugiés palestiniens, écrit Munayyer
Dans le camp de réfugiés de Yarmouk, la plus grande concentration de
Palestiniens en Syrie parmi les neuf camps de réfugiés dans ce pays, la
population palestinienne estprise au piège et souffre. Le camp se trouve
juste au sud de Damas et son emplacement stratégique en a fait un champ
de bataille, plaçant entre deux feux les réfugiés qui préfèrent adopter
une position neutre pour tenter d’assurer leur propre sécurité.
Avant 2011, le camp accueillait quelque 180 000 réfugiés
palestiniens. Aujourd’hui il n’en reste qu’environ 20 000. La plupart de
ses habitants ont été forcés à devenir à nouveau des réfugiés. Ceux qui
sont coincés à l’intérieur sont pris au piège, et une impasse entre le
gouvernement et les rebelles a provoqué un siège qui a empêché pendant
des mois l’accès humanitaire. Ce n’est que récemment que des colis
alimentaires d’urgence ont pu entrer.
Les protagonistes de la guerre en Syrie ont comme on pouvait s’y
attendre utilisé la crise dans Yarmouk pour dénoncer leurs adversaires ,
mais ils passent à côté du point le plus important et la leçon de
Yarmouk.
Yarmouk est simplement l’épisode le plus récent à la suite de la
Nakba.Chaque décennie, se joue un nouvel épisode de la Nakba pour les
réfugiés palestiniens, dans les pays d’accueil en difficulté.
Aujourd’hui, c’est Yarmouk. Il y a dix ans, les réfugiés palestiniens
étaient pris dans la tourmente de la guerre en Irak.
Une décennie auparavant, les réfugiés palestiniens vivant au Koweït
ont dû abandonner leurs maisons en plein milieu de la première guerre du
Golfe. Une décennie encore avant, les Palestiniens ont été massacrés
dans les camps de Sabra et Chatila au Liban. Et une décennie plus tôt,
les événements connus par les Palestiniens sous le nom de « Septembre
noir » en Jordanie ont également souligné la vulnérabilité des réfugiés
dans les pays d’accueil pris dans des violence politiques.
Oui, ce qui se passe dans Yarmouk est partie intégrante de ce qui se
passe en Syrie, mais cela fait aussi partie de la grande histoire de la
dépossession palestinienne. La leçon que la communauté internationale
doit tirer de Yarmouk, c’est que les efforts visant à résoudre le sort
des réfugiés palestiniens doivent être redoublés et qu’ils sont plus
urgents que jamais .
Aujourd’hui, les réfugiés vivent dans différents pays d’accueil dans
le monde arabe, mais aussi ailleurs. Certains réfugiés palestiniens
fuyant le conflit dans les pays d’accueil ont été réinstallés dans des
pays aussi éloignés que la Suède, l’Islande, le Chili et l’Australie.
Mais pourquoi réinstaller ces réfugiés partout dans le monde alors
qu’ils ont une patrie ?
Au lieu de redoubler d’efforts pour réinstaller les Palestiniens un
peu partout, sauf là d’où ils viennent, la communauté internationale
devrait augmenter la pression sur Israël pour permettre à ces réfugiés
de finalement rentrer chez eux.
Le droit des Palestiniens de retourner dans leurs villes et villages
est non négociable et malgré les [dits] pourparlers de paix visant à une
« fin des revendications », un accord qui ne défend pas le droit au
retour des Palestiniens ne mettra pas fin à ces revendications. Les
droits et les revendications des réfugiés palestiniens ne pourront
jamais être abrogés par un coup de stylo.
Réinstaller des réfugiés palestiniens dans un Etat palestinien ne
serait équitable ni pour les réfugiés, ni pour l’État de Palestine
naissant. Un réfugié de Nazareth ne peut exercer son droit au retour à
Naplouse, ni un réfugié de Jaffa exercer ce droit à Jénine.
En outre, un État palestinien en Cisjordanie et à Gaza serait établi
sur environ 22 pour cent de la Palestine historique. Par rapport à
l’État d’Israël, ce serait un quart de la superficie des terres, deux
fois plus densément peuplé, et avec une économie 30 fois plus faible.
Israël non seulement porte la responsabilité de la Nakba, mais il
dispose aussi d’une capacité beaucoup plus grande pour l’absorption des
réfugiés rentrant chez eux.
Le droit au retour est un droit de l’homme qu’Israël nie aux réfugiés
palestiniens, simplement parce qu’ils ne sont pas juifs et parce que
les changements démographiques pourraient contester le contrôle juif du
pouvoir dans l’État. Le déni des droits humains sur la base de la
discrimination pour maintenir un groupe à l’écart du pouvoir est la
marque de l’apartheid.
Yarmouk n’est que le dernier rappel de l’échec de la communauté
internationale à améliorer le sort des réfugiés palestiniens. Laisser
Israël à l’écart de ses responsabilités et à la recherche de lieux
alternatifs pour résoudre le problème des réfugiés revient en réalité à
,cautionner les politiques discriminatoires d’Israël. Il faut une action
immédiate pour exiger qu’Israël permette le rapatriement [des réfugiés
palestiniens], conformément au droit international.
L’incapacité de faire face à la crise des droits humains - qui est à
la base de la question des réfugiés - a produit crise humanitaire sur
crise humanitaire. Les réfugiés ont besoin d’une solution permanente,
d’un rapatriement, de l’égalité des droits et des protections que le
monde entier désire et mérite.
La question des réfugiés ne doit pas être à nouveau mise en veilleuse
et le temps est venu d’agir. Nous ne pouvons pas nous permettre
d’attendre un inéluctable et prochain épisode tragique, sur les traces
de la Nakba.
* Yousef Munayyer est directeur général du Jerusalem Fund et de son programme éducatif : The Palestine Center
Du même auteur :
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27 février 2014 - Al-Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.aljazeera.com/indepth/op...
Traduction : Info-Palestine.eu - Naguib
http://www.aljazeera.com/indepth/op...
Traduction : Info-Palestine.eu - Naguib