Le groupe des ex-dirigeants européens
En 2009, l’Autorité palestinienne a défini une période de deux ans au cours de laquelle elle entendait achever le processus de construction des institutions du futur Etat palestinien. L’Union européenne a encouragé et soutenu cet effort en apportant son assistance financière et technique et en exprimant son appui politique à cet objectif.
Aujourd’hui, la question de la reconnaissance de cet Etat est posée. En septembre, l’Autorité palestinienne pourrait solliciter la reconnaissance formelle de la souveraineté palestinienne sur les territoires occupés auprès de l’Organisation des Nations unies et de ses Etats membres.
Si cette demande est formulée, l’Union européenne devrait la soutenir en insistant sur la nécessité pour la Palestine indépendante de négocier avec Israël sur la base des paramètres reconnus internationalement.
Une majorité d’Etats membres a d’ores et déjà reconnu l’Etat palestinien, mais la reconnaissance par l’Union européenne fera la différence.
Les signataires de ce texte considèrent que l’Europe ne peut s’opposer à cette demande légitime des Palestiniens. Refuser de leur reconnaître l’indépendance après avoir soutenu leurs efforts, après avoir reconnu qu’ils se sont rapprochés de cet objectif en construisant un système de gouvernance cohérent et après avoir reconnu qu’ils ont coopéré avec Israël sur les questions de sécurité serait contredire directement et de manière inacceptable nos propres positions et nos propres politiques. Les Etats européens se sont déjà engagés en déclarant au travers du Comité de liaison ad hoc et de la Banque mondiale que la Palestine est prête pour l’indépendance. Revenir maintenant sur cet engagement serait faire preuve d’incohérence, de faiblesse et de manque de volonté politique. Ce serait également offrir une victoire aux forces du statu quo.
Un nombre croissant d’Israéliens – d’anciens responsables sécuritaires comme des personnalités éminentes de la société civile – ont récemment rejoint le chœur de ceux qui souscrivent à la reconnaissance d’un Etat palestinien et qui réclament la fin de l’occupation.
Les termes de l’accord de réconciliation inter-palestinien signé le 3 mai 2011 entre les mouvements Fatah et Hamas suggèrent qu’un gouvernement d’unité nationale pourrait être formé. Ceci ne devrait pas être perçu comme un obstacle et pourrait même constituer un levier efficace pour pousser Hamas à évoluer dans la bonne direction.
Les paramètres internationalement agréés pour un accord de paix – qui garantirait la sécurité de l’Etat d’Israël et d’un Etat de Palestine viable – ont été réitérés par le président Obama dans son discours du 19 mai. Les Etats-Unis n’en ont cependant pas dit davantage sur la manière dont ce résultat pourrait être atteint et le processus de négociations bilatérales tel qu’il a été mené jusque là a abouti à une impasse.
En reconnaissant la souveraineté et l’indépendance de la Palestine, et en accompagnant ce geste de l’indispensable soutien financier qu’il requiert, l’Europe ancrera solidement l’Etat palestinien dans le camp de la paix et de la coexistence et renforcera la stabilité de la région. Au moment même où l’Union européenne s’efforce de redéfinir ses relations avec les sociétés de la région, les Etats membres ne doivent pas laisser passer cette occasion de jouer un rôle significatif et positif. C’est avec à l’esprit ces considérations politiques et éthiques que les signataires de ce texte appellent les gouvernements européens à reconnaître l’Etat de Palestine en septembre prochain.
Hubert Védrine, président du groupe des ex-dirigeants européens, France ; Frans Andriessen, Pays-Bas ; Giuliano Amato, Italie ; Laurens Jan Brinkhorst, Pays-Bas ; Hervé de Charette, France ; Uffe Elleman-Jensen, Danemark ; Jean François-Poncet, France ; Felipe Gonzales, Espagne ; Lena Hjelm-Wallén, Suède ; Lionel Jospin, France ; Michael Lothian, Royaume-Uni ; Louis Michel, Belgique ; Andrzej Olechowski, Pologne ; Romano Prodi, Italie ; Mary Robinson, Irlande ; Michel Rocard, France ; Jorge Sampaio, Portugal ; Pierre Schori, Suède ; Clare Short, Royaume-Uni ; Peter Sutherland, Royaume-Uni ; Erkki Tuomioja, Finlande ; Andreas van Agt, Pays-Bas ; Hans van den Broek, Pays-Bas ; Vaira Vike-Freiberga, Lituanie ; Richard von Weizsäcker, Allemagne.